Trafic
- Par ervian
- Le 26/08/2025
- Dans cinéma français
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La Feuille Volante - N° 2010 – Août 2025.
Trafic – Un film de Jacques Tati.(1971)
M. Hulot (JacquesTati) est dessinateur chez « Altra » un constructeur automobile français. Il est chargé avec Marcel, le chauffeur (Marcel Fraval) et Maria, l’attachée de presse (Maria Kimberly), d’accompagner un modèle de son invention, une 4L aménagée en camping-car, ce qui est révolutionnaire pour l’époque, et qui sera présenté au salon d’Amsterdam. Tout le film est basé sur ce voyage mouvementé entre Paris et Amsterdam, fait de problèmes techniques (crevaison, panne d’essence), d’accidents de la circulation, d’une rétention dans un commissariat où tous les gadgets de la voiture sont dévoilés devant des policiers étonnés, de nombreux plans sur les véhicules en mouvement ou d’événements annexes, souvent provoqués par Hulot ou Maria, au point qu’on en oublie le but réel de cette expédition. Au bout du compte, l’’équipage arrive bien au salon, mais à la fermeture de celui-ci et Marcel a la présence d’esprit de présenter le camping-car à un public dont on se demande d’où il sort ... et d’engranger les commandes. Quand à Hulot, Il est licencié sur le champ et part avec Maria.
Ce film est le cinquième long métrage de Jacques Tati (1907-1982) qui n’en réalisa de son vivant que six. Il fait suite à Playtime (1967) qui le ruina au point que Trafic fut financé par Alec Wildenstein, un marchand d’art français, à la condition que le principal rôle féminin soit tenu par Maria Kimberly, sa compagne. On y retrouve le Hulot de Mon oncle (1958), ce célibataire dégingandé avec son chapeau déformé et ses pantalons trop courts, éternel gaffeur décalé qui veut surtout rendre service autour de lui tout en semblant être ailleurs. Il n’est pas sans évoquer les personnages de Charlie Chaplin ou de Buster Keaton dont Tati s’est sans doute inspiré tout en donnant à Hulot une dimension à la fois réelle et imaginaire, embarquant le spectateur dans un récit qui bien souvent reste en suspension, à la fois drôle, mélancolique, délirant et burlesque,poétique fait de grands gestes, d’expressions dubitatives, de sons extérieurs, de silences…
J’ai voulu avec cet article qui sera sans doute un des derniers de cette chronique, rendre un modeste hommage à Jacques Tati parce que, une nouvelle fois, il nous fait partager son écriture cinématographique si particulière, son sens de la dérision, son sens de la découverte, son esprit toujours en éveil, son humour subtil qu’on n’apprécie que dans l’instant à condition d’être attentif à chaque geste, à chaque attitude des personnages. Et cela en vaut la peine puisque, malgré tout ce temps passé depuis sa sortie, ce film n’a pas vieilli et garde toujours, à mes yeux, cette faculté de nous étonner, et de nous faire sourire, l’humour étant une des armes à notre disposition pour lutter contre ce monde qui autour de nous explose et contre cette société qui a perdu tous ses repères. Et puis, regarder un tel film où il n’est question ni de sang ni de violence ni de sexe est plutôt apaisant.
Après avoir oublié Jacques Tati pendant de nombreuses années, il semblerait qu’on redécouvre actuellement le talent original qui était le sien. C’est une bonne chose mais il n ‘a pas échappé à ce cette malheureuse amnésie qui est le propre de l‘espèce humaine et aussi un peu de l’abandon, ce qui a fait dire à Philippe Labro « Adieu Monsieur Hulot, On le pleure mort, il aurait fallu l’aider vivant »
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