la feuille volante

LA LIONNE BLANCHE – Henning MANKELL

N°653– Juin 2013.

LA LIONNE BLANCHE – Henning MANKELL – SEUIL Policiers.

Traduit du suédois par Anna Gibson.

Nous sommes en avril 1992 et une jeune mère de famille, agent immobilier, Louise Åkerblom a disparu. C'est son mari qui vient en faire la déclaration au commissaire Wallander. D'emblée, celui-ci subodore une disparition peu commune qui n'a rien à voir avec une passade amoureuse. C'est là une de ses intuitions coutumières. Le couple était heureux, méthodiste de confession, très croyant et pratiquant au sein d'une petite communauté religieuse. Les recherches aussitôt entreprises orientent les policiers vers l'explosion d'une maison inhabitée et isolée. Dans les décombres, on retrouve les débris d'un poste émetteur, des restes épars d'un revolver uniquement fabriqué en Afrique du Sud et un doigt humain... noir ! A priori rien à voir avec la disparition de Louise qui est cependant retrouvée assassinée au fond d'un puits d'une ferme abandonnée. C'est évidemment Kurt Wallander qui est chargé de cette affaire au demeurant assez obscure.

La chute du mur de Berlin et la disparition de l'ex-URSS ont éparpillé dans le monde entier des agents du KGB qui, contre la promesse d'une nouvelle vie et d'un passeport, sont prêts à tout. Le meurtre est une de leurs spécialités et Konovalenko en fait partie. La démocratie suédoise reste pour eux un refuge. A peu près à cette époque, en Afrique du Sud, une organisation criminelle favorable au maintien de l'apartheid projette d'assassiner une personnalité politique de premier plan. Konovalenko qui souhaite se réfugier en Afrique du Sud pour y changer de vie, lui offre de familiariser un tueur professionnel sud-africain noir, Victor Mabasha, avec de nouvelles armes mises au point en Union soviétique et pour cela le fait venir en Suède. L'affaire tourne mal cependant, une femme est assassinée par hasard et Mabasha s'évanouit dans la nature, après avoir perdu un doigt.

Sur place, en Afrique du Sud, l'insécurité grandit, la tension monte, et , au sommet de l’État, on sent que quelque chose va se passer qui ressemble à un attentat. Frédéric de Klerk, alors président de la République et désireux de mettre fin à l'apartheid fait figure de victime potentielle mais Nelson Mandela, enfin sorti de prison, porte les espoirs du peuple noir. L'Afrique du Sud est encore gouvernée par une minorité blanche et la perspective d'un changement politique en faveur des Noirs fait craindre une guerre civile, une vengeance collective et une répression sanglante.

Ces deux affaires n'ont rien à voir l'une avec l'autre au départ. Wallander est chargé du meurtre de Louise Åkerblom, mais ses investigations l'amènent à Stockholm où un jeune policier vient d'être tué au cours d'une opération. Encore une fois l'intuition de Wallander lui dit qu'il y a sans doute un lien entre ces affaires. C'est donc le début d'une histoire un peu compliquée avec des complications, des débordements, des erreurs qui égarent un peu le lecteur. La toile de fond est constituée par l'Afrique du Sud où notre commissaire n'a jamais mis les pieds, la silhouette de deux personnalités d'exception que sont Nelson Mandela et Frederick de Clerk et la marche inexorable de l'Histoire dans ce pays.

Au cours de ce roman, le lecteur n'est pas à l'abri de ses surprises et les rebondissements du scénario vont l'étonner autant sur le plan du dépaysement géographique que sur l'attitude de Wallander. Il perdra un temps tout sens de la raison et même des réalités en n'écoutant que son devoir de policier pour mener à bien une mission qui, petit à petit le dépasse. Malgré lui sa fille Linda sera impliquée dans cette enquête et lui sera un peu malgré lui l'acteur médiatique de cette affaire qui se déroule dans la petite ville d'Ystad, d'ordinaire tranquille. Il devient le meurtrier d'un homme et ce geste, même accompli en état de légitime défense, le transforme complètement au point qu'il est lui-même recherché comme un authentique criminel. L'auteur nous montre ici un Wallander vieillissant qui doute à la fois de lui-même et de sa mission de policier, qui culpabilise à cause de la mort d'un homme dont il s'estime responsable. Cela provoque chez lui une grave dépression dont il aura sans doute du mal à se remettre d'autant qu'il est seul après un divorce difficile et qu'il a du mal à renouer avec une femme.

J'ai rencontré cet auteur par hasard et je dois dire que l'écriture de ce roman, et probablement sa traduction (je ne lis pas le suédois dans le texte) distillent le suspense jusqu'à la fin pour le plus grand plaisir du lecteur attentif et passionné.

© Hervé GAUTIER - Juin 2013 - http://hervegautier.e-monsite.com









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