la feuille volante

Jean-Louis Bocquet

  • OLYMPE DE GOUGES

    N°1003– Janvier 2016

     

    OLYMPE DE GOUGES Catel & BocquetCasterman écritures.

     

    Étonnant parcours que celui de Marie Gouze (1748-1793) qui prendra comme nom de plume Olympe de Gouges, fille bâtarde d'Anne-Olympe Mouisset et du marquis Jean-Jacques Lefranc de Pompignan, futur académicien, mariée à seize ans elle sera veuve deux fois et à dix-huit ans pourra jouir de sa dot et d'une indépendance que sa nouvelle condition lui confère et dont elle va profiter. Elle ne se remariera plus ! Elle fut une femme de Lettres passionnée de théâtre, de politique et de liberté dans une société où une femme ne pouvait qu'être sous la dépendance d'un homme, féministe, polémiste, révolutionnaire, morte guillotinée… Son authentique et passionnante biographie est détaillée à la fin de cet ouvrage et romancée en trente et un tableaux, au long de ces quatre cents pages.

    Son parcours, de Montauban à Paris a été semé d’embûches, de rumeurs calomnieuses mais aussi de belles rencontres, de pièces de théâtre dont elle était l'actrice mais surtout l'auteure. Elle a effectivement été libre et même libertine voire scandaleuse mais a profité d'un riche amant qui lui a permis de vivre fort confortablement dans la capitale en compagnie de son fils Pierre dont elle a soutenu la carrière. Elle était cultivée, pleine d'esprit et de reparties, et douée d'une bonne plume. Elle a à la fois fréquenté les salons parisiens où elle n'a pas manqué, malgré son accent rocailleux, de s'y faire accepter et d'y briller et a fait évoluer les mentalités sur la société, l’esclavage, l'émancipation du peuple, la condition des femmes et la reconnaissance politique de leurs droits, notamment celui de voter, d'être éduquées et de divorcer. Elle a en effet pris conscience que l'affranchissement récent des hommes du peuple s'est fait aux dépens des femmes qui ainsi furent les oubliées de cette révolution. Elle est en effet à l'origine de la « déclaration des droits de la femme et de la citoyenne » qui fut ignorée bien qu'elle soit dans le droit fil des idées nouvelles mais et que les révolutionnaires comme le roi, qu'elle respectait et courtisait, ont refusée. Donner le pouvoir aux femmes n'était pas dans les projets du législateur et la libération des hommes n’incluait pas celle des femmes qu'il convenait de maintenir dans leur état de subordination ancestral ! Si elle a su s'imposer dans la société de l'Ancien Régime et y faire prévaloir son talent, avec, il faut le dire, une bonne dose d'opportunisme, la Révolution qu'elle avait pourtant appelée de ses vœux, qu'elle avait inspirée et dont elle avait souhaité ardemment la réussite, fut fatale à la patriote passionnée par ses idées qu’elle était devenue. Pour elle aussi la roche Tarpéienne fut proche du Capitole, ce qui est bien souvent la rançon du succès et une des leçons de la condition humaine. Elle vécut la trahison, la palinodie des révolutionnaires, participa à sa manière à la chute de ses meneurs, se fit journaliste pour dénoncer les dérives sanguinaires de la Terreur, pris parti pour les Girondins, s’offrit à être l'avocat de Louis XVI mais fut victime de sa notoriété et de sa soif de changement.

     

    Le graphisme en noir et blanc aurait peut-être mérité un peu plus de détails notamment sur les visages.

     

    C'est un roman graphique, et non pas une BD (quoique je ne ne fasse pas bien la différence) mais ce que je retiens c'est que cette histoire passionnante se lit bien et surtout rend hommage à cette femme d'exception, fort belle, généreuse et altruiste, qui fut pleinement de son temps, fut une amoureuse de la vie, sut s'adapter à cette période troublée de notre histoire en y survivant un temps et marqua son époque.

     

    Hervé GAUTIER – Janvier 2016 - http://hervegautier.e-monsite.com

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