Robert Van Gulik
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l'énigme du clou chinois
- Par hervegautier
- Le 24/03/2016
- Dans Robert Van Gulik
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La Feuille Volante n°1025– Mars 2016 ans
l'énigme du clou chinois - Robert Van Gulik– 10/18
Traduit de l’anglais par Anne Duchanet, Roger Guerbet et Jos Simons
A peine installé dans la ville de Pei-Tcheou, proche de la frontière tartare, le juge Ti est confronté à la disparition d'une jeune fille dont on se demande si elle a été enlevée, assassinée ou s'il ne s'agit que d'une simple escapade amoureuse. Puis c'est la découverte du cadavre d'une jeune femme, décapitée dans la chambre conjugale. Entre accusations, disparition suspecte et solide alibi du mari, l'affaire s'annonce mal. Enfin, un célèbre champion de boxe est retrouvé empoisonné dans un établissement de bains où il avait ses habitudes ; des bouts de carton formant un puzzle, une voix de femme et un surnom aideront Ti a élucider cette affaire. Cette région inhospitalière favorise largement la pratique de la sorcellerie, du mystère et de la violence
J'avais l'habitude de lire les aventures de ce magistrat à la fois intègre et fort talentueux qui a, sa vie durant, déployé de louables efforts au service de l’État, sous la plume de Frédéric Lenormand. Cette chronique s'en est très souvent fait l'écho. Cette fois c'est Robert Van Gulik (1910-1967), ambassadeur mais aussi fin lettré, sinologue érudit et homme de Lettres hollandais qui nous fait partager des épisodes de la vie de cet authentique fonctionnaire chinois, Ti Jen-tsie (630-700), dont la carrière se déroula sous la dynastie des Tang, dans différentes villes de province pour se terminer dans la Capitale en qualité président de la Cour Métropolitaine de Justice. Ce roman nous montre un juge mais aussi un homme habité de sentiments pour une femme qui n'est pas la sienne mais que sa fonction officielle rend solitaire. De mes lectures précédentes, j'ai retiré l'impression d'un juge omnipotent, craint de ses administrés et quasiment infaillible. Le magistrat de cette époque détenait en effet une sorte de pouvoir absolu puisqu'il représentait et appliquait la loi, mais cette dernière ne lui conférait aucune immunité puisqu’elle prévoyait que toute personne (lui y compris) ayant accusé à tort quelqu'un d'autre devrait subir le châtiment de la personne injustement poursuivie. En outre la culte des ancêtres était, chez les Chinois de cette époque, une obligation religieuse à laquelle nul ne pouvait se soustraire et la non-observance des préceptes légaux était lourdement punie. La vie sexuelle des hommes avant la mariage faisait l'objet d'une grande tolérance, mais il n'était pas question de consommation avant la cérémonie elle-même entre les deux futurs époux.
Ce recueil policier est donc ainsi l'occasion d'en connaître davantage sur la civilisation chinoise de cette époque, sur son système judiciaire et pénal, un simple manque de respect pour la Cour étant, par exemple, punis de coups de fouet. Les faits rapportés sont réels mais pas forcément traités par Ti lui-même. En tout cas, les personnages de Van Gulik sont ceux des romans policiers chinois traditionnels : le juge , ses sbires, les prêtres, les lettrés, les brigands ... C'est un réel dépaysement culturel et un bon moment de lecture.
© Hervé GAUTIER – Mars 2016. [http://hervegautier.e-monsite.com ]