Francis Ponge
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Le parti pris des choses suivi de Proêmes
- Par hervegautier
- Le 26/02/2020
- Dans Francis Ponge
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N° 1432 - Février 2020.
Le parti pris des choses (1942) suivi de Proêmes (1949) – Francis PONGE- Gallimard.
Ce sont des poèmes en prose écrits par Ponge (1899-1988) au cours des années pendant lesquelles il a travaillé au Messageries Hachette et qu’il a qualifiées de « bagne ». On retrouve cette ambiance et ce rythme de la journée de travail dans certains de ces textes. Il a prétendu que cette période lui a laissé peu de temps pour écrire mais il s’est cependant laissé émouvoir par les choses les plus banales du quotidien comme une bougie, un cageot, une huître, le pain, la pluie, les lieux familiers, les humains… On est loin des sources d’inspiration des surréalistes dont il a pourtant été proche sans adhérer au mouvement. Le langage est précis avec la volonté de se dégager des contraintes de le versification. Pour Ponge, la poésie n’est ni romantique ni même une façon de s’engager mais au contraire de une manière de célébrer la matérialité des choses. C’est sans doute la raison pour laquelle il contestait pour lui-même la qualité de poète. Le titre même du recueil indique qu’il prend effectivement le parti des choses, qu’il les choisit. Il multiplie les images, file des métaphores, use de périphrases, joue sur les mots, réenchante le quotidien par la description qu’il en fait. Quand il évoque à sa manière, c’est à dire d’une façon fine et subjective, un objet ordinaire, il insiste sur son utilité, sa trivialité, sa brève durée de vie, sa simplicité, sa vanité, mais, paradoxalement il en souligne l’importance et nous invite à porter sur lui un regard différent. En choisissant ainsi de parler des objets banals, il renouvelle à sa manière le langage poétique. Cela m’évoque cette citation de Victor Ségalen « Voir le monde et l’ayant vu dire sa vision ». Il choisit de collationner les choses, de leur donner sa propre définition comme le ferait un dictionnaire, de procéder à une véritable « leçon de choses ».
Ce recueil est aussi une sorte d’exorcisme à cause de la douloureuse perte de son père. Après cette épreuve, il se réfugie dans le monde des objets quotidiens dont il croise chaque jour la réalité. Dans une moindre mesure il évoque aussi la réalité de la vie de salarié.
Avec « Poême », mot valise qui est la contraction de prose et poème mais aussi vient d’un mot latin signifiant prélude, il semble nous dire que ce qu’il écrit n’est finalement qu’un préliminaire à autre chose qui viendra par la suite puisque toutes les choses qui sont le prétexte de sa poétique sont elles-mêmes perpétuellement changeantes. Il réitère en créant l’expression « l’objeu », contraction des mots objets et jeu, non seulement il joue sur les lettres d’un mot mais il semble aussi nier ainsi l’arbitraire du langage. Il y a une forme de lyrisme chez Ponge, dans la façon d’appréhender les choses et de les évoquer pour son lecteur, de leur donner en quelque sorte une âme.
Il reste pourtant un poète inconnu du grand public, un « inconnu célèbre » que Sartres révéla à l’occasion de la publication de ce recueil. Ponge est sans doute un grand poète mais je dois bien avouer que j’ai assez peu vibré à ces textes.
©Hervé Gautier http:// hervegautier.e-monsite.com