la feuille volante

Tombouctou

 

N°503 – Février 2011.

TOMBOUCTOU – Paul Auster – Actes Sud.

Traduit de l'américain par Christine Le Boeuf.

 

Le titre d'abord. Il évoque une ville mythique, à la fois mystérieuse et lointaine dont l'origine serait, selon la légende, rattachée à un puits et à une femme. Elle reste dans notre inconscient ou peut-être dans notre histoire une cité qui a été explorée par René Caillié en 1828.

Mais, avec Paul Auster, on est jamais au bout de ses surprises et la lecture d'un de ses romans est toujours un moment d'exception, plein de curiosités pour le lecteur attentif. C'est que ce récit commence par l'évocation de Willy, un personnage un peu bizarre, à la fois vagabond et rimailleur qui se prend pour l'assistant du Père Noël. Il erre dans la ville de Baltimore en compagnie de son chien, Mr Bones, un authentique bâtard. Pourtant cet animal n'est pas le commun des canins, il est plein de sensibilité et son maître ne le tient pas pour un inférieur mais au contraire pour un véritable ami. L'animal est même animé d'aspirations métaphysiques ! Willy va mourir, il le sait, mais avant de faire le grand saut, il tient à assurer à son compagnon un nouveau gîte en lui conseillant d'éviter la police, la fourrière... et les restaurants chinois ! Le mieux serait qu'il le confie à Bea Swanson, son ancienne professeur d'anglais. Il veut aussi assurer un avenir à ses écrits consignés sur soixante quatorze cahiers. Ce sont des poèmes mais aussi les premiers balbutiements d'une longue épopée « Jours vagabonds » où il évoque ce qu'a été sa vie personnelle. Las, il meurt misérablement avant d'avoir mené à bien ce dernier projet. Ainsi, happé par la mort, il doit bien se résoudre à faire une croix sur ses légitimes et littéraires ambitions !

Mr Bones se retrouve donc seul, orphelin, et recherche vainement l'ancien professeur de Willy. Il va donc errer et rechercher un maître. Après un long voyage « à pattes » qui peut, si on veut le voir ainsi, ressembler à une démarche labyrinthique (et que Paul Auster affectionne) analogue à celle de son maître, il trouve enfin une famille qui l'adopte, s'occupe de lui et l'aimera... Poursuivant ses préoccupations philosophico-religieuses, l'animal, qui rêve parfois à son maître et entreprend avec lui des dialogues d'outre-tombe, s'imagine que cet homme réside maintenant dans un lieu de félicité paradisiaque qu'il a du mal à situer sur la carte du monde et qu'il nomme Tombouctou ! Willy lui parle, lui donne des conseils sur la façon de survivre...

 

C'est que cette fable romanesque, pleine de sensibilité où les hommes portent des noms d'animaux et vice versa, donne la parole à ce brave chien qui va faire part de ses remarques sur sa vie devenue aussi vagabonde que celle de feu son maître. Perdu dans ce monde, il se révèle un peu naïf, parfois malchanceux mais se montre plus humain que bien des hommes. Il mènera à son terme sa quête personnelle pour, le pense-t-il, retrouver Willy dans cet ailleurs

 

Ce roman a la caractéristique, rare à mes yeux, de capter l'intérêt du lecteur dès la première ligne, de le prendre par la main en quelques sorte et de ne l'abandonner qu'à la fin sans que l'ennui se soit insinué dans sa lecture. Paul Auster s'y révèle encore une fois un narrateur exceptionnel. Son style fait d'humour, de tendresse et de réflexions parfois grinçantes sur la vie a quelque chose d'attachant, de magique même !

 

J'ai vraiment bien aimé et je continue d'explorer l'univers tissé par cet auteur qui ne cesse de m'étonner.

 

 

 

 ©Hervé GAUTIER – Février 2011.http://hervegautier.e-monsite.com

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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