la feuille volante

Solo al vivo

 

N°371– Octobre 2009

SOLO AL VIVO – Un disque de Gianmaria TESTA.

 

Décidément ces chanteurs italiens sont des enchanteurs.

 

Cette chronique s'est déjà fait l'écho de la poésie et des chansons de Paolo Conte, cette fois je ne manquerai pas l'occasion d'évoquer un auteur-compositeur-interprète que le hasard m'a permis de découvrir et dont le talent ne peut laisser indifférent d'autant qu'il a une parenté avec le crooneur piémontais, une parenté musicale et même physique. Sa rencontre à travers les chansons de ce disque constitue des moments précieux. Le personnage a quelque chose d'attachant, imaginez un chef de gare qui un jour choisit d'abandonner sa situation, ce qui est déjà extraordinaire parce que sous toutes les latitudes le Chemin de Fer est quelque chose d'autre qu'un simple métier et les cheminots des gens qui ont de leurs fonctions une certaine idée. Voilà, il a pris un jour sa décision , au lieu de voir chaque jour des gens monter dans des trains, il allait, grâce au son de sa voix et des accents de sa guitare, les faire voyager.

La langue italienne est déjà, à elle seule une musique et personnellement je n'aime rien tant que d'entendre parler des Italiens entre eux... même si je ne comprends pas ce qu'ils disent. Mais en plus, la voix de Testa a quelque chose de rocailleux, d'envoutant, peut-être parce qu'elle n'est pas mélodieuse, qu'elle est très mélancolique et un peu sourde comme voilée par un brouillard de montagne, parce qu'elle a des accents d'une authenticité un peu oubliée.

Ce disque est le septième dans sa discographie. C'est le résultat d'un concert en solo donné à l'auditorium de Rome, le 3 mai 2008, qui n'était pas destiné, à l'origine, à devenir un disque mais à la suite d'un miracle comme il s'en produit parfois, la complicité poétique qui s'est tissée entre le chanteur et son public, a transformé la vingtaine de morceaux tirés de ses précédents albums en moment d'exception.. On pourra en retenir le thème douloureux de la migration [Rital] ou celui du quotidien éphémère [Al mercato di porta Pallazzo ], mais chacun de ses textes de chanson qui sont autant de poèmes distille cette atmosphère où se conjuguent réel et imaginaire.

L'amour n'est pas absent de son répertoire, (comment pourrait-il en être autrement?)[come al cielo gli aeroplani], la sensibilité, la poésie délicate non plus qui tresse si belles images [« Et si jamais, comme par hasard, te cherchaient d'autres mains et d'autres mains dessinaient d'autres empreintes sur toi »]. Comme lui, l'univers des femmes et de l'amour qu'elles inspirent, parfois comme de simples passantes, qui croisent votre regard et disparaissent sans même se retourner, m'émeut.

 

Son côté poète me plait bien aussi parce qu'il sait que le temps passe, que la vie est un bref moment [« Oui la vie est un instant et nous passe sur les pieds et puis, tout devient souvenirs »], son aspect fragile, éphémère souligné par la simple conjugaison des mots à peine chantés et des arpèges de son instrument, comme une flamme qui vacille dans un courant d'air.

Les textes ont quelque chose de surréaliste, d'agréablement mystérieux qui pourtant ne m'est guère étranger.

 

Je lis sur le livret qui accompagne son disque que chacun de ses concerts s'accompagne d'un verre de vin et d'une cigarette. Enfin quelqu'un qui ne cache rien de ses envies, de ses origines populaires, pas un de ces intellectuels au discours abscons qui veulent être originaux et pour cela n'hésitent pas à jouer une comédie ridicule !

 

Et puis j'aime bien sa manière de vivre les choses « Les gens comme moi commencent par batailler tout seuls avec une guitare. Jusqu'à ce que le bois en perde son vernis et que les doigts se creusent de cordes- Ainsi avons -nous décidé, Paola et moi,de laisser une trace d'un jour de mai à Rome ». Je suis heureux d'avoir été au rendez-vous dont il parle, l'empreinte en reste vive!

 

 

©Hervé GAUTIER – Octobre 2009.http://hervegautier.e-monsite.com

 
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