la feuille volante

La panthère des neiges

N°1874– Mai 2024.

 

La panthère des neiges – Sylvain Tesson – Vincent Munier – Gallimard.

 

Sylvain Tesson est vraiment l’homme de tous les défis, surtout quand il y a y a un voyage en jeu. Ainsi quand le photographe animalier Vincent Munier lui a proposé de l’accompagner au Tibet à la poursuite de la panthère des neiges, sa réponse ne pouvait être que positive et enthousiaste puisque cette quête supposait aussi une qualité supplémentaire ; la patience. Avec Marie, cinéaste animalière, compagne de Vincent et Léo, doctorant en philosophie et aide-photographe, ils formèrent cette « bande des quatre » qui allaient arpenter la Chine.

Ils escaladèrent donc jusqu’à 5 200 mètres, aux sources du Mékong et après avoir croisé des ânes sauvages, des chèvres bleues, des yacks, des aigles, leur patience a été récompensée par des « apparitions » de cette panthère des neiges qui les observait sans crainte et même avec une certaine tolérance, comme des voyageurs curieux, avec qui elle partageait temporairement son territoire et un moment de sa vie sauvage.

Pour Tesson, cette solitude et ce froid évoquent cette fille « tiède et blanche qui vivait dans la forêt des Landes ». Elle, son seul amour, était retournée à sa vie sauvage, sans lui, et la regrettait . Ce voyage vers la nature avait quelque chose de symbolique. Il associe aussi cette période de sa vie à l’enterrement de sa mère où les sentiments et les certitudes exprimés, comme à chaque fois devant un cercueil, ne durent qu’un moment devant la vie qui reprend ses droits. Dans l’image de la panthère, distante et insaisissable il revoyait les traits de sa mère qui avait tout sa vie cultivé l’art de disparaître et le goût du silence . Ce fut pour lui une consolation.

L’affût, l’attente silencieuse et glacée de cette bête mythique favorisent la réflexion de Tesson sur le monde qui l’entoure et sur l’humanité. Il y jette un œil désespéré, constatant que ce monde va à grands pas vers sa perte dans l’indifférence générale. Cela fait naître sous sa plume une bonne dose d’aphorismes quelque peu désabusés. Lors de ce séjour glacé il retrouve cette nature et nous la fait partager. C’est aussi, un peu comme toujours, un retour sur lui-même.

 

J’ai retrouvé avec plaisir la belle écriture, poétique et érudite de Tesson qui illustre les sublimes photographies de Vincent Munier où l’œil peine à distinguer la présence de l’animale tant son pelage se confond avec les rochers.

 

 
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