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la feuille volante

ENQUETE SUR LA DISPARITION D'EMILIE BRUNET – Antoine Bello

  

 

 

 

 



N°521 – Mai 2011.

ENQUETE SUR LA DISPARITION D'EMILIE BRUNET – Antoine Bello – Gallimard.

 

 

L'intrigue, condition indispensable à tout bon roman policier, est simple, à tout le moins en apparence. Comme l'indique le titre, Émilie Brunet, une des femmes les plus riches du pays, a disparu. Là où cela se complique, c'est que sa disparition coïncide avec celle de Stéphane Roget, professeur de Yoga, mais aussi amant d'Émilie et que Claude Brunet, son mari, connaissait leur liaison ! C'est même lui qui avertit la police en l'absence de son épouse. On sent déjà le vaudeville et ce d'autant plus que ce brillant professeur d'université s'octroyait largement des libertés de Don Juan ! Bien évidemment, ce dernier est suspecté et même quelque peu molesté lors d'une garde à vue musclée par un inspecteur zélé, partisan des méthodes expéditives, qui sans doute sont classiques et ont fait depuis longtemps la preuve de leur efficacité. Pourtant, dans son cas, cela amène notre suspect à l'infirmerie et certainement pas aux aveux. L'ennui c'est que Brunet est neurologue, professeur de sciences cognitives... mais ne se souvient de rien !

 

Achille Dunot, détective de son état, compatit à ce qui pourrait être regardé comme une opportunité intéressante pour Brunet, et ce d'autant plus qu'il souffre lui aussi d'une amnésie chronique dite « antérograde ». Il ne peut, en effet, imprimer dans sa mémoire ses souvenirs immédiats. Chargé de l'enquête sur la disparition d'Émilie Brunet, notre détective s'en tient à la rédaction d'un journal relatant les différentes phases de ses investigations. Chaque matin il tente, grâce à sa chronique de se remémorer ce qu'il a fait la veille. Pourtant, cet adepte d'Agatha Christie à qui il fait constamment référence devient, petit à petit et sans presque s'en rendre compte le héros d'un roman policier dont il est aussi l'auteur.

 

Le médecin est dans une bien étrange posture puisque tout l'accuse. Il a, en effet a plusieurs mobiles, et notamment financier... et aucun alibi ! Pour aggraver son cas, il fait constamment l'apologie du crime parfait, donnant à penser au détective qu'il n'est pas étranger à la disparition de son épouse. Il a d'ailleurs pour ce concept une véritable fascination. De part ses études sur le cerveau humain, il est parfaitement capable de compartimenter et de domestiquer sa propre mémoire. Il joue même avec Dunot en lui proposant d'écrire lui aussi ses propres sentiments sur cette affaire et de les livrer à l'enquêteur, tout en gardant, bien entendu, la maîtrise de cette situation. Dunot suspecte Brunet d'être coupable de ce double meurtre et ce dernier n'ignore rien des soupçons qui pèsent sur lui. Ainsi assiste-t-on à un chassé-croisé entre les deux hommes, le policier cherchant à s'identifier au médecin à travers son témoignage écrit et ainsi le confondre, le médecin s'obstinant à rester à l'hôpital, et donc à ne pas fuir, refusant puis acceptant de livrer ses écrits au policier pour mieux l'abuser par ses développements intellectuels et universitaires. Il sollicite même la justice pour être innocenté le plus vite possible, histoire de bénéficier de « la chose jugée ». Une sorte d'amitiés naît même de cet échange, ce qui fausse un peu les choses.

 

Les personnages peuvent paraître peu originaux : un flic violent et borné, une domestique puritaine, tout droit sortie d'un roman d'Agatha Christie, un universitaire prétentieux et brillant, une étudiante fascinée par son professeur avec qui elle a, bien entendu, eu une liaison, et dans tout cela le mythe du crime parfait et le contexte un peu facile de l'amnésie. D'autre part les références souvent trop érudites sur l'œuvre d'Agatha Christie (mais aussi d'Edgar Poe et d'Alfred Hitchcock) donnent lieu à des longueurs quelque peu inutiles et tournent carrément à l'exégèse de ses romans et au panégyrique d'Hercule Poirot. Au point qu'on en oublie l'intrigue ! Le lecteur reste sur sa faim puisque cette sorte de mise en abyme (un roman dans le roman) ne conclut rien, n'explique rien, laisse en suspens toutes les questions que le lecteur s'est posées. C'est un peu dommage, la présentation du récit sous forme de journal dont Dunot caviarde certaines lignes pour tenter de circonvenir le médecin est intéressante. C'est un roman bien écrit, agréable à lire et au suspense savamment entretenu jusqu'à la fin, mais franchement, je m'attendais à autre chose !

 

 

 

 

 

©Hervé GAUTIER – Mai 2011. http://hervegautier.e-monsite.com

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 





 

 

 

 

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