la feuille volante

Je l'aimais – Anna Gavalda.

 

N°464 - Octobre 2010

Je l'aimais – Anna Gavalda.

Une histoire d'amour banale qui commence bien mais qui finit mal, par la fuite du mari Adrien, mais une fuite sans retour simplement parce qu'il n'aime plus sa femme Chloé, qu'il en aime une autre...

Cette épouse avec ses deux filles, Marion et Lucie, se retrouve chez son beau-père, Pierre, tout aussi malheureux qu'elle de ce qui arrive. Il fait ce qu'il peut pour la consoler, pour amuser ses petites-filles mais on sent bien que le cœur n'y est pas? C'est vrai qu'il a toujours soutenu son fils et qu'il continue de le faire, parfois avec humour, parfois avec un certain détachement un peu feint, seulement pour sauver les apparences. Elle qui ne s'est jamais sentie très proche de cet homme n'oppose à cette situation que des larmes, se sent seule, « larguée »... Elle va devenir rapidement mauvaise, laide parce que c'est là une réaction quasi normale face à ce qui lui arrive. Dans cette maison étrangère elle est en transit et dehors il fait froid (l'été c'eût été sûrement un peu différent). Elle se dit qu'elle sort du piège du mariage (« Le piège c'est de penser qu'on a le droit d'être heureux ») et s'en veut de s'être laisser griser par tout ce qu'il a représenté pour elle et qui maintenant s'est effondré.

La vie s'organise donc sans Adrien et Chloé, la narratrice, sent que tout peu à peu lui échappe et devient agressive face à ce beau-père désemparé (« J'étais la femme de ce garçon, vous savez, la femme, ce truc pratique qu'on emmène partout et qui sourit quand on l'embrasse ») et qui pourtant n'accable pas son fils.

C'est que, profitant de cette cohabitation avec sa belle-fille, il va tenter quelque chose dans sa direction, lui avouer qu'il n'a pas été « le type bien » qu'il aurait voulu être ce qu'il paraissait sans doute. Toute sa vie il a été un patron tyrannique, un père absent, un époux en pointillés... Maintenant il se sent vieux et pense peut-être déjà à la mort! Cela ne semble pas fonctionner au début et Choé reste sur la défensive (« Je suis vieille. Je suis toute cabossée. Je sens que je vais devenir méfiante. Je vais regarder ma vie à travers un judas. Je n'ouvrirai pas la porte ») Puis, Pierre va souhaiter partager avec elle un secret qu'il gardé depuis tant d'années, timidement au début (« Toute ma vie est comme un poing serré »), plus plus précisément ensuite (« On parle toujours du chagrin de ceux qui restent mais as-tu déjà songé à celui de ceux qui partent »). Il finit par lui avouer «  je suis tombé amoureux comme on attrape une maladie , sans le vouloir, sans y croire , contre mon gré et sans pouvoir m'en défendre... et puis je l'ai perdue ». Rien là d'étonnant dans cette histoire, rien de bien original en somme mais il précise que bien qu'amoureux fou de cette Mathilde qui avait fait irruption dans sa vie, il a été lâche devant l'amour, refusant d'être heureux avec celle qu'il croit être la femme de sa vie, sans trop savoir si c'est à cause de son épouse, de ses enfants... Il la laisse partir pour une autre vie sans lui. Qu'en eut-il été s'il avait fait un autre choix? Les choses eussent-elles été différentes? L'usure du couple ne serait-elle pas manifesté avec son cortège de regrets et de remords? Autant de questions qui restent en suspens pour cet homme qui a préféré le confort d'un foyer au grand frisson des amours interdites...

C'est un peu comme si ce père voulait racheter par son témoignage la fuite de son fils, l'expliquer peut-être, lui dire qu'Adrien avait été courageux là où lui avait été lâche... Mais cela ne fonctionne pas (on s'en serait douté ), Chloé reste avec son chagrin, la certitude d 'avoir été abandonnée pour une autre (« Être soi-même, ça veut dire planter sa femme et ses gosses ?») pour finalement éclater et refuser cette main gauchement tendue (« Partez maintenant. Laissez-moi. Je n'en peux plus de vos bons sentiments... Vous me gavez monsieur l'Ecorché Vif »).

 

J'avoue que j'avais mal commencé avec Anna Gavalda (la feuille volante n° 463).

Une histoire d'amour est toujours unique et l'écrivain par son style est un médiateur d'exception pour nous la faire partager. Cette fois j'ai goûté la couleur et même la douleur des mots. C'est à la fois simple et juste, colle parfaitement dans son dénuement à la situation.

Je ne regrette cependant pas d'avoir persisté dans la lecture de cet auteur.

 

 

 

 

 

© Hervé GAUTIER – Octobre 2010.http://hervegautier.e-monsite.com

 

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