LES PRINCESSES VAGABONDES - Frédéric LENORMAND - Editions FAYARD.
- Par hervegautier
- Le 29/03/2009
- Dans Frédéric LENORMAND
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N°310 – Août 2008LES PRINCESSES VAGABONDES – Frédéric LENORMAND - Editions FAYARD.Je l'ai déjà écrit dans cette chronique, ce n'est pas, à mes yeux, la nouveauté qui fait la seule qualité d'un livre même si la durée de vie « commerciale »de celui-ci est forcément limitée. Cet ouvrage publié en 1999 n'échappe pas à cette remarque.Bref, ici, comme à son habitude, Frédéric Lenormand s'approprie un morceau de l'histoire et le rend à sa manière, c'est à dire en prêtant sans doute un peu de lui-même aux personnages, en fait quatre vieilles princesses hors du temps, tantes de Louis XVI, qui fuient en Italie la Révolution Française et sa volonté de changement autant que l'agonie de cette monarchie fantomatique et la perspective de finir sur l'échafaud. Elles cherchent désespérément un hôte, fût-il leur cousin ou le pape lui-même, qui voudrait bien les accueillir, mais de Naples à Parme à Rome ou à Venise, personne n'en veut et tous ne souhaitent qu'une chose, les voir déguerpir au plus vite! Dans leur fuite éperdue, elles incarnent des temps qui ont irrémédiablement changés, refusent obstinément de s'y adapter, espèrent une restauration des valeurs anciennes qui leur redonnera leur rang et le lustre de leur ancienne condition, mais en vain!Leur équipage est à la fois grotesque et affligeant, leur voyage pour échapper au vide, à la vieillesse et à la mort, poignant. Malgré le style alerte que l'auteur a choisi d'adopter, la manière de vivre des « Mesdames » continue d'être gouvernée par des repères surannés voire complètement surréalistes que sont les valeurs aristocratiques et l'existence de Dieu, quand ce n'est pas des références mal digérées aux écrivains du siècle des Lumières. Et de noter « Elles comprirent que c'était de l'exil qu'elles souffraient, leurs vies s'installaient dans un pénible hiver d'où rien ne sortirait, que la mort ». Et la mort en terre étrangère! Comme pour nous rappeler que, pour être princesses, elles n'échappent pas pour autant à la condition humaine. Chacun d'elle glissera donc vers le néant, de la même manière qu'elle avait vécu, en solitaire! Mais avant c'est la folie qui mettra un terme à cette équipée, la folie qui est une autre manière d'échapper à cette vie. Mais leur existence n'avait-elle pas été un long délire, cet état qui vous fait fuir le réel ou l'habiller au couleurs de vos envies, de votre inconscience ou de vos fantasmes?J'entends dire qu'on lit de moins en moins. C'est évidemment très dommage, pourtant, il est des écrivains qui sont fort capables de réconcilier les plus réticents avec la lecture pour peu qu'ils veuillent bien leur accorder quelques moments de leur temps. En effet, quand l'acte de lire, que d'aucuns tiennent de plus en plus pour un pensum quand ce n'est pas une perte de temps, correspond à un moment de plaisir, surtout quand le style est jubilatoire et léger, les phrases cousues d'humour et quand le texte mêle le dérisoire, le sérieux et la précision documentaire, l'affaire est d'une autre nature et mérite qu'on s'y arrête.Écrire, ce n'est pas seulement aligner des mots qui forment des phrases et des chapitres [les gens pressés appellent cela des livres], c'est pour l'écrivain l'occasion unique de faire naître chez son lecteur une envie de poursuivre en sa compagnie ce voyage intérieur et immobile que seules les oeuvres d'art, et donc les livres, sont capables de susciter. On apprend des choses, certes, et ce n'est pas là le moindre atout d'un ouvrage, mais surtout on garde de celui-ci un vif souvenir puisé dans cette complicité qui peu à peu s'installe. A cette occasion on goûte le dépaysement, le rêve ou de plaisants moments qui vous font sourire parce que les personnages s'animent devant vous par la seule force des mots et que vous croyez les avoir toujours vus et connus. Vous devenez, sans presque vous en rendre compte, le témoin privilégié du narrateur qui vous confie, à vous seul, ses saillies, ses remarques pertinentes et impertinentes parfois! Quand, en plus le style est somptueux, respectueux de la grammaire, des nuances de la langue, de la musique des mots, avec en plus le sens de la formule, à la fois simple, juste et percutante, le temps consacré à la lecture devient un moment précieux, indispensable même puisqu'il devient un antidote aux vicissitudes de notre quotidien. |
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© Hervé GAUTIER – Août 2008.http://monsite.orange.fr/lafeuillevolante.rvg |
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