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la feuille volante

MADAME TI MENE L'ENQUÊTE [Les nouvelle enquêtes du juge Ti - Vol 5]

 

N°307 – Juillet 2008

 

MADAME TI MENE L'ENQUÊTE [Les nouvelle enquêtes du juge Ti – Vol 5]

Frédéric LENORMAND - Fayard.

 

Le hasard, à moins que ce ne fût l'absence de scrupules des habitants de Han-yuan, n'a pas eu, en cette année 666 de respect pour le juge Ti inopinément tombé de cheval et précipité dans un ravin à la suite d'un attentat perpétré contre sa personne. Il s'en tire heureusement avec une jambe brisée mais qui lui interdit tout mouvement. Pourtant autour de lui les meurtres ne cessent pas et il doit, peut-être un peu malgré lui, mais aussi probablement par calcul, recruter pour le seconder, un ancien repris de justice. Très vite, ce dernier comprend tout l'intérêt que lui réserve cette situation et confond allégrement son intérêt personnel avec la bonne administration de la justice.

 

Sa première épouse qui se morfond dans ce tribunal mais surtout dans le rôle très secondaire que la société chinoise réserve aux femmes, sent l'obligation de porter assistance à ce magistrat qu'elle voit désireux d'action. Aussi, prend-elle des initiatives autant pour aider son infirme de mari que pour contrer l'aigrefin qu'il a engagé. Pourtant, elle conserve en secret, au magistrat, toute sa loyauté et toute son efficacité, permettant au malheureux mandarin d'exercer quand même son ministère, de déployer toute sa sagacité pour démêler l'écheveau compliqué de ces meurtres en série que ses prédécesseurs ont parfois laissé en plan. De rebondissements en faits nouveaux Ti, décidément au mieux de sa forme, malgré les apparences, confondra à la fois le coupable de ces forfaits... et l'auteur de l'attentat commis contre lui.

 

Ce roman est aussi la découverte de cette femme, à la fois intelligente et perspicace, servant les intérêts de son époux, mais aussi, accessoirement les siens. Elle sera ses yeux mais aussi son témoin d'exception puisque cette affaire lui permettra de sortir de la maison où elle s'étiole. Elle se révèle son double, aussi douée pour les investigations que dans l'appréciation fine des évènements qu'elle rencontre. Elle se meut à merveille dans ce monde interlope du crime que son mari côtoie chaque jour, s'adapte à toutes les circonstances, possède l'art de la maïeutique.

 

Il y a les investigations que mène cette épouse zélée, mais, à mes yeux, ce récit est plus qu'un roman policier. Le titre lui-même annonce les choses, mais tout en nuances. Ce texte révèle une femme, certes de haute lignée, mais qui a été mariée dans les règles ancestrales de la société chinoise d'alors, c'est à dire qu'elle a été unie à un mari qu'elle ne connaissait pas et que, à tout le moins au début, elle n'aimait pas. Elle était certes la première épouse d'un magistrat important, mais elle devait cohabiter avec deux épouses secondaires qu'elle n'appréciait guère, mais qui avaient donné une descendance à ce mari, ce qu'elle s'était, elle, révélée incapable de faire. C'était là une condition importante pour qu'elle gardât son rang et cette infertilité faisait d'elle une épouse que son mari pouvait répudier légalement à tout moment. Les circonstances de cette enquête lui révèlent la vie différente et heureuse qu'elle aurait pu avoir avec un autre homme et cette intuition la laisse songeuse...

 

Au delà de l'enquête, toujours passionnante, il y a le regard du juge enfin, remis de ses malheurs, posé sur cette épouse « Il regarda sa Première s'affairer autour de lui pour préparer sa nuit. Il sentit, pour la première fois depuis longtemps, combien elle lui était précieuse. Il avait beau être moins possessif que ce fou de Pei Hang, il lui aurait été infiniment désagréable que son épouse principale lui fût ôtée, soit par les suites tragiques de sa témérité de tout à l'heure, soit d'une autre manière qu'il ne voulait même pas considérer. ».

 

j'ai toujours plaisir à rencontrer le juge Ti par delà le temps et par le miracle de l'écriture de Frédérique Lenormand. J'apprécie son humour où la formule lapidaire le dispute à l'usage de l'euphémisme, voire de la litote. Je passe vraiment de bons moments

 

 

 

© Hervé GAUTIER – juillet 2008.http://monsite.orange.fr/lafeuillevolante.rvg 

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