Les moissons du ciel – Un film de Terrance Malick.
- Par hervegautier
- Le 26/10/2010
- Dans Terrance Malick
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N°469– Octobre 2010.
Les moissons du ciel – Un film de Terrance Malick.
C'est une version restaurée d'un film datant de 1979 (Prix de la meilleure réalisation- Cannes 1979) qui nous est ici donnée à voir.
Ce qui m'a attiré dès l'abord, c'est le titre. Je ne sais pas pourquoi, j'ai pensé à Romain Gary, à cause sans doute de son roman, « les racines du ciel »? Mais cela n'a rien à voir.
Ce qui me reste de ce film, ce sont les somptueux paysages américains, cette grande plaine où le blé pousse à perte de vue, où les animaux sauvages s'épanouissent dans cette nature authentique, la liberté qui émane de tout cela, le temps qui passe au rythme des saisons, tout juste esquissé par des images lentes et apaisantes, souligné par une grande économie de dialogue, de cette contrée généreuse.
Les splendides images de Nestor Almendros (Oscar de la meilleure photographie 1979) où l'homme et la nature sont en harmonie contrastent avec le rythme effréné du travail en usine qu'on entraperçoit au début. Les éléments, quoique menaçants sous ces latitudes y sont présents comme quelque chose de rassurant, de reposant. Voilà pour la forme.
Pour le fond, c'est autre chose. L'histoire qui nous est racontée par la voix off de Linda, gamine sauvage mais qui incarne elle aussi la liberté pauvre des hommes et des femmes qui voyagent au gré du travail à l'usine ou aux champs, de ces ouvriers sans véritable métier qui ne peuvent que louer leurs bras pour survivre dans cette Amérique de la libre entreprise et de l'opposition entre le prolétariat et les riches. La symbolique du train qui amène les hommes et les femmes dans cette ferme perdue dans la campagne et celui qui emportent les hommes (probablement les mêmes?) vers une armée et peut-être une guerre qui prendra leur vie à son tour, est très forte. Le mouvement des wagons, l'allure lente des convois évoquent cette transition entre deux mondes autant qu'ils suggèrent la liberté, la nouveauté de ce que vont découvrir ceux qui font ce voyage vers l'inconnu. Leurs visages ont cette clarté de ceux qui goûtent le plaisir de cette vie itinérante qui a fait partie de notre parcours personnel, voire de notre idéal à tous pendant au moins quelques temps!
Pour autant, de quoi s'agit-il? Bill, le grand-frère de Linda assure sa subsistance en travaillant au rythme du marché du travail. Il vit avec Abby, sa petite-amie. Mais Bill est querelleur et à cause d'une rixe avec un contre-maître à l'usine où il travaille (Là aussi les photos de l'aciérie sont très belles, le rouge des fourneaux contrastant avec celui du ciel de la plaine). Le hasard les amène tous les trois à s'embaucher comme ouvriers agricoles pour une misère (3 dollars la journée) dans une ferme où, bien sûr, ils sont exploités. Là, le trio, à travers la vie dure mais parfois festive de la terre, retrouve cette opposition entre les riches et les pauvres, symbolisée par la maison du fermier, solennelle, solitaire, grande, confortable, lointaine. Elle domine tout. Un fermier jeune et célibataire l'habite et, toujours par hasard, Bill découvre qu'il est malade et qu'il n'a plus que quelques mois à vivre. Dans le même temps, ce même homme tombe amoureux d'Abby. Pour la caméra, la jeune-fille émerge soudain du flot des humains qui suent à la moisson. Le vent dans ses cheveux la révèle aux yeux de cet homme qui sait qu'il va mourir mais la demande en mariage.
Bill, l'opportuniste a une idée. Après les hésitations d'usage, elle accepte ce qui ressemble fort à un contrat : à condition de demeurer en compagnie de son compagnon présenté comme son frère et Linda, elle sera sa femme. L'associé du fermier flaire l'arnaque et part après la cérémonie. C'est le début de la fin pour cette grande fortune, malgré les moments d'une joie éphémère entre les deux jeunes époux, malgré une complicité feinte avec Bill où la velléité d'assassinat du fermier commence à poindre. C'est que cet homme, promis à une mort prochaine reprend goût à la vie grâce à son mariage et recouvre peu à peu la santé, ce qui contrecarre les plans du trio. Il commence lui-même à se demander la nature exacte des relations réelles qui existent entre Abby et Bill, qui, jaloux part pour mieux revenir.
Et puis tout se précipite, les sauterelles qui viennent dévaster les récoltes et l'incendie des blés, une explication qui tourne mal entre les deux hommes et le meurtre du fermier, la fuite éperdue du trio, maintenant non plus libre mais traqué par la police et l'ancien associé, la mort enfin de Bill, poursuivi et abattu.
C'est un peu la morale de cette fable, le bien qui triomphe du mal, le happy-end de cette histoire dont je ne suis pas sûr que ce soit la même règle dans la vraie vie, le nouveau départ, toujours sous le signe de la liberté d'Abby et de Linda.
J'ai été un peu déçu par ce film dont je ne retiens que le beau titre et les magnifiques photos.
©Hervé GAUTIER – Octobre 2010.http://hervegautier.e-monsite.com
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