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la feuille volante

Aleph 0

La Feuille Volante n° 1153

ALEPH 0 Jérôme Ferrarri – Babel

 

Ce roman met en scène un jeune professeur hanté par l'Aleph Zéro (noté א o du nom de la première lettre de l'alphabet hébraïque) n'a rien à voir avec la vile d'Alep en Syrie mais fait référence à une nouvellel de Borges. C'est, d'après la quatrième de couverture  « un être mathématique  désespérément intact quels que soient les éléments qu'on lui soustrait », autant dire quelque chose qu'on altère pas, qui reste constant quoiqu'on fasse. Même si au départ, je suis assez imperméable aux mathématiques, c'était cependant assez pour susciter mon intérêt. Ce livre, baptisé « roman » et qui a cependant l'aspect d'un recueils de nouvelles, donne la parole, sur le ton de la confidence à ce jeune homme obsédé par cette idée qui semble gouverner sa vie et qui est celle de la solitude. Il la combat comme il peut et il a choisi les femmes qu'il baise, mais, même si son potentiel de séduction est grand, le résultat est toujours le même et souvent nul et met en évidence ce destin néfaste qui ne le lâche pas et que rien ne peut altérer. Même quand il parle d'une collègue qui a subit l'ablation d'un sein suite à un cancer et qui de ce fait a une vie sexuelle amputée au point qu'elle choisit la mort, c'est de sa propre vie dont il nous entretient. Il le fait par ailleurs sans artifice ni retenue, évoquant autant ses conquêtes féminines parfois bizarres que l'onanisme de son adolescence, puisque, selon lui, le plaisir sexuel est seul à pouvoir triompher de la solitude, même si son esprit n'engendre bien souvent que des fantasmes féminins. Ni l'alcool ni la drogue ne peuvent en venir à bout, un peu comme s'il devait en passer par ces artifices délirants et brumeux pour connaître l'extase qu'il n'atteint jamais vraiment. A chaque fois qu'il tente ce genre d'expérience, il a l’impression d'être étranger à son propre corps. Seule les femmes le ramènent à la réalité sans que pour autant il puisse faire la différence entre le désir et le plaisir qu'elles suscitent pour lui. L'attrait des femmes reste la seule chose qui compte, qu'on ne pourra jamais altérer même si sa gaucherie et parfois sa timidité lui interdisent d'en profiter.

Cela veut-il dire que, quoiqu'on fasse pour faire cesser un état de chose délétère, cela est voué à l'échec et que se battre contre les moulins est certes un acte enthousiasmant mais vain, un peu comme si une divinité perverse, qu'on peut appeler hasard ou malchance, avait résolu définitivement de contrecarrer nos efforts ? Peut-être, et j'ai personnellement déjà fait ce genre d''expérience qui porte en elle les racines de son fiasco. Je veux bien le suivre sur ses interrogations existentielles à propos de l'amour et même dire qu'il n'existe pas, que c'est un concept parfois étrange, en revanche je suis assez imperméable à l'explication du monde par les mathématiciens et plus précisément les tenants de la physique quantique. Le narrateur choisit d'explorer le temps et sa relativité à travers l'histoire de son grand-père. La durée semble ne pas exister, nonobstant les dates égrenées, dans ce parcours de sa jeunesse militaire et ultramarine ponctuée de voyages, de combats et de virées dans les bordels pour soldats. Là aussi ce qui surnage c'est la solitude et aussi la mort qui en est le complément, comme si tout ce qui lui était arrivé s'était déroulé en dehors de lui, comme s'il était lui-même en état d'exil dans sa propre vie. La vie pourtant ne cesse jamais, quelqu'un prend toujours la place de l'autre, n'altérant donc pas le principe actif de l'existence, pourtant la mort existe qui est précisément la fin incontournable de chacun de nous.

Tout cela m'a paru un peu labyrinthique et même parfois obscur, avec des relations du narrateur qui donne parfois la parole à d'autres, que j'ai eu parfois un peu de mal à suivre et peut-être à comprendre surtout à travers l'évocation de certaines notions scientifiques, d'où une certaine déception . J'avoue que cet auteur qui recevra le prix Goncourt dix ans plus tard et que je ne connaissais pas, a suscité mon attention par ce premier roman paru en 2002 mais j'ai eu un peu de mal à le suivre. © Hervé GAUTIER – Juillet 2017. [http://hervegautier.e-monsite.com]

 
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