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la feuille volante

L'herbier des villes

N°1862– Avril 2024.

 

L’herbier des villes – Hervé Le Tellier – Textuel.

 

J’ai pris ce livre un peu au hasard sur les rayonnages de la médiathèque, un peu aussi de confiance à cause du nom de l’auteur dont j’avais apprécié la très oulipienne « Anomalie » couronnée par le prix Goncourt 2020. J’ai cru avoir emprunté un livre pour enfants à cause des « illustrations » mais en réalité ce livre est le résultat d’une collecte que l’auteur a réalisée avec son fils en 2005 dans le 18° arrondissement de Paris, un peu en hommage au génial Georges Perec. Il a présenté le résultat de sa triste récolte d’objets abandonnés sur la chaussée avec des haïkus. A la réflexion, cela pourrait parfaitement être un livre pour enfants, pour les sensibiliser à une des incivilités qu’il vaut mieux éviter si on veut favoriser le « vivre ensemble » dont on nous parle souvent. Cela ne coûte effectivement rien de jeter dans une poubelle ces petits objets dont on veut se débarrasser plutôt que de les abandonner sur la voie publique. Par dérision ou par humour Le Tellier à baptisé son livre du nom « d’herbier » comme ce qui nous était demandé jadis par les instituteurs pour apprendre les plantes de la nature. Cela consistait à présenter fleurs et herbes séchées dans un cahier documenté et ainsi apprendre par nous-mêmes ce qui composait notre environnement. C’est bien le nom qui convient en effet puisque nos trottoirs offrent tout un panel d’objets devenus inutiles qui font partie de notre décor urbain. On devrait même dire un « urbier » ! Le haïku, par sa simplicité de rédaction (5-7-5) et surtout parce qu’il ne dit pas, convient bien à cette démarche négative, révélatrice d’un état d’esprit de plus en plus développé chez nos contemporains qui, se croyant tout permis, transforment aisément en décharge publique la moindre parcelle de territoire. La nature humaine est décidément peu fréquentable. C’est certes oulipien mais c’est aussi le rôle de l’écrivain d’être témoin de son temps !

C’est une sorte d’inventaire où on trouve pêle-mêle une collection qui va de cannettes écrasées, aux billets froissés de cinéma, en passant par les PV pour stationnement interdit, ou un foulard de soie où une femme a laissé son parfum…J’ai pensé que s’il avait fait un vrai herbier, rural celui-là, il aurait sans doute été moins fourni que celui que jadis les potaches studieux réalisaient puisque, à force de jeter des objets dans la nature, cette dernière a fini par dépérir à cause des détritus qu’on y déverse. C’est malheureusement le résultat de notre comportement qui détruit autour de nous la flore et la faune sauvages et on est fondé à se demander le but de tout cela et la raison de ce qui n’est pas autre chose qu’une volonté irrationnelle d’autodestruction.

 

 

 

 
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