Pierre Loti - Le pèlerin de la planète- Alain Quella-Villéger
- Par hervegautier
- Le 13/02/2023
- Dans Pierre LOTI
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N°1716 – Février 2023
Pierre Loti – Le pèlerin de la planète- Alain Quella-Villéger- Éditions Auberon.
Si le festival « Étonnants voyageurs » de Saint-Malo avait existé, Pierre Loti (1850-1923) en aurait sûrement été l’invité. Cet écrivain-voyageur, officier de marine à la longue carrière à la mer, humaniste, écrivain malheureusement oublié de nos jours, a connu de son vivant à la fois la consécration, la contestation, l’admiration, l’incompréhension et le mépris, ce qui est l’apanage des des êtres d’exception qui ne laissent pas leurs contemporains indifférents. Si sa jeunesse rochefortaise fut protestante, scolairement discrète même en narration, bouleversée par la mort de proches, modeste financièrement, valétudinaire, il devait porter en lui cet appétit de curiosités, de découvertes et de grands espaces que la mer lui a permis d’assouvir. Ses années de carrière militaire ont satisfait son goût des voyages (« Homme libre, toujours tu chériras la mer » écrivait Baudelaire) et développé son envie de témoigner par écrit de ses découvertes du monde sur lequel il portait un regard à la fois curieux et critique. En même temps qu’il dénonçait ce qui le révoltait, il menait, malgré son mariage, sa recherche des femmes, de leur compagnie voire de leur complicité mondaine, de leur beauté, de leur amour, entre scandales, échecs, remords et désespoir.
Écrivain du XIX° siècle, il y a chez lui cette dimension romantique et exotique, cette exploration du moi jusqu’au solipsisme, cette fascination de l’inconnu, cette recherche de Dieu, cette volonté d’être lui-même, entre marginalité affirmée et volonté d’inscrire sa vie dans un contexte officiel de reconnaissance « Académique » et de carrière professionnelle, avec obéissance hiérarchique et obligation de réserve, et cette aptitude à témoigner avec cette qualité de style qui personnellement m’a toujours passionné. Être libre, engagé, patriote jusque dans la guerre, mélancolique, tourmenté par la fuite du temps, par la mort, par une sorte de quête constante mais fervente et peut-être inassouvie, il a puisé dans cet itinéraire secret les sources de son talent (n’a t-il pas avoué « Mon mal j’enchante » ?)et a marqué son passage sur terre de la plus belle des manières.
La précision, la pertinence et la qualité documentaire de cet ouvrage d’Alain Quella-Villéger, éminent spécialiste de Loti que sa seule naissance à Rochefort ne suffit pas à expliquer, donne à voir un écrivain d’exception qui a si bien servi notre belle langue française.
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