LES MAINS NUES - Simoneta GREGGIO.
- Par hervegautier
- Le 05/08/2009
- Dans Simoneta GREGGIO.
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N°356– Aout 2009
LES MAINS NUES – Simoneta GREGGIO– Stock.
J'aime bien les artistes italiens, les différents articles de cette revue en attestent. J'ai donc lu ce roman, dont je ne connais pas l'auteure et dont j'apprends qu'il est écrit directement en français, avec une curiosité favorable, d'autant que le style narratif se teinte parfois d'une agréable poésie.
L'histoire, puisqu'il faut bien commencer ainsi, est celle d'un retour brutal d'un passé qu'Emma aurait sans doute souhaité révolu « Je me vois à travers les années, une série de poupées russes, la plus petite, toute neuve, loin dans le temps, la dernière encore debout dans son vernis écaillé ». Emma, donc, 43 ans, célibataire, vétérinaire de campagne, à la vie rude, solitaire mais sexuellement libérée et ne vivant que pour son travail, reçoit un soir la visite de Giovanni, bientôt 15 ans, en rupture avec sa famille et dont elle a jadis connu les parents, Raphaël et Micol, partageant avec eux quelques années d'une jeunesse qu'elle aimerait mieux oublier.
Avec cet adolescent, c'est donc son passé qui lui revient en pleine figure et, calée dans son quotidien solitaire et laborieux, Emma souhaiterait que Giovanni parte au plus vite, mais il n'en fait rien et s'installe entre eux une relation ambiguë qui se transforme rapidement en liaison amoureuse. A cause de l'âge des deux amants, cela devient tabou, Giovanni n'est plus un enfant mais pas encore adulte, il y a donc détournement de mineur et la chose, bien sûr se termine devant les tribunaux. Le juge cherchera à comprendre et pour cela fouillera dans le fameux passé qu'on aurait souhaité définitivement enfoui.
C'est que, avant le mariage de Raphaël, Emma et lui ont été amants, qu'il avait voulu renouer leurs relations intimes longtemps après son mariage mais qu'elle avait refusé puis sans doute accepté et cette visite de Gioavanni c'est un peu, sans qu'il le sache, comme souffler sur de vieilles braises mal éteintes, raviver des souvenirs qu'on voudrait à jamais effacés.
Et puis, la liaison révélée, il y a ce déferlement médiatique, les journalistes charognards qui se croient tout permis au nom de l'information mais qui sont surtout avides de scoop et pour cela n'hésitent pas à dire et à écrire n'importe quoi, à bousculer quiconque pourra s'opposer à ce qu'ils fassent « leur métier ». D'autant qu'à la campagne, une femme vivant seule, sans enfant et sans homme à ses côtés, cela inquiète[« Non, les braves gens n'aiment pas que, on suive une autre route qu'eux » chante Brassens] ! Il a y aussi cette vindicte populaire allumée par la presse pour faire vendre du papier, et qui se croit obligée de se nourrir du scandale et de recouvrir d'opprobre au nom d'une morale désuète ce qui n'est après tout qu'une aventure amoureuse dont ceux qui la dénoncent rêveraient peut-être pour eux-mêmes sans oser se l'avouer. C'est ici un tabou qui a été bousculé, une vengeance ainsi vidée qu'Emma assume, un témoignage émouvant sur la solitude et sur la déconvenue amoureuse d'une jeune femme qui voit son amour de jeunesse lui échapper. Raphaël ne s'est-il pas vu forcer la main par la fausse promesse de Micol d'un enfant à naître, ce Giovanni justement qui, après toutes ces années revient auprès d'Emma, comme pour lui donner enfin l'amour qu'elle n'avait pas eu avec Raphaël? C'est l'expression d'une vengeance entre deux femmes amoureuses du même homme, comme si une justice immanente existait, différente bien sûr de la justice des hommes qui passe et peut-être apaise?
Mais, heureusement, à la fin, les choses reprennent leur vraie place, l'espace s'emplit de gestes quotidiens à l'image de cette nature si joliment évoquée.
©
Hervé GAUTIER – Aout 2009.http://hervegautier.e-monsite.com
Hervé GAUTIER – Aout 2009.
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