la feuille volante

Les gommes

N°1864– Avril 2024.

 

Les gommes – Alain Robbe-Grillet – Les Éditions de Minuit.

Ça commence comme un roman policier classique Daniel Dupond a été assassiné à son domicile la veille, mais on n’a pas retrouvé son corps.Le détective Wallase, un jeune enquêteur parisien, fraîchement muté dans cette ville, est chargé de l’enquête qui s’annonce difficile en l’absence de corps. C’est donc un « meurtre » sans témoin et on s’oriente, grâce à un homme providentiel et lui-même très énigmatique, dans une histoire un peu obscure d’une organisation terroriste à cause des opinions politiques de la « victime ». L’enquêteur rame beaucoup à cause du peu d’indices et il a même l’impression que sa hiérarchie le laisse patauger dans cette mystérieuse affaire en l’abandonnant à ses investigations hasardeuses. Était-ce par dépit ou pour conjurer un mauvais sort qui s’acharnerait sur lui, Wallace achète convulsivement des gommes dont il sait parfaitement qu’elles ne lui serviront à rien (cet achat se reproduit de la part d’un client d’une papeterie). Pour ses supérieurs, il finit lui-même par être une véritable énigme puisque que, notamment, on sait seulement qu’il vient de Paris mais c’est à peu près tout. En effet, il apparaît que Dupond n’a que légèrement touché et, avec la complicité du docteur Juard, il a organise sa disparition physique et a voulu faire croire à un cambriolage qui aurait mal tourné. On apprend que Dupond aurait songé au suicide mais aurait préféré le scénario de l’assassinat avec disparition du corps

J’ai relu ce roman dont la première approche remonte à ma scolarité déjà bien lointaine et que mon professeur de français, à la fois ironique et sceptique, avait présenté, comme appartenant à ce mouvement dont la principale caractéristique était d’être nouveau, sans plus de commentaires. J’ai donc voulu approfondir à travers les écrivains emblématiques qui l’avaient illustré, ce qui pour moi restait une sorte de mystère qui m’avait laissé sur ma faim. J’ai d’abord eu un peu de mal à y entrer dans ce roman et quand finalement, vers la moitié du livre, ma démarche a suscité de l’intérêt et je l’ai lu comme un roman policier. L’originalité de ce parti-pris d’écriture qui consiste à faire se déplacer le narrateur dans la conscience de chaque personnage au point d’emporter peut-être l’adhésion du lecteur qui devient ainsi une sorte d’enquêteur parallèle, est intéressant. Cela se complique par l’arrivée d’autres personnages, dont Marchat, qui, sous couvert d’aider la police va se présenter comme la prochaine victime tout se ne révélant pas tout ce qu’il sait. Le déroulé labyrinthique de l’enquête rapproche ce livre du thriller bien qu’on sache tout depuis le départ, mais les hésitations de Wallace, comme perdu dans un tourbillon sans fin, tisse une ambiance un peu malsaine, accentuée par une unité de lieu qui donne une idée d’enfermement des personnages dans cette histoire. Notre enquêteur en vient même à être lui-même soupçonné à cause d’une vague ressemblance. Malgré mon attention et ma volonté de comprendre, j’ai fini par perdre un peu la notion du temps et même celle des évènements, j’ai ressenti une sorte d’impression de malaise, de doute et d’absurde devant ces investigations qui recherchent un mort qui ne l’est pas encore et des devinettes incertaines d’un pilier de bistrot, mais c’est peut-être un des buts recherchés par l’auteur. Quant aux gommes que Wallace achète sans trouver vraiment ce qu’il cherche, je ne sais pas. Le livre refermé, je suis assez perplexe, pas vraiment emballé. Peut-être suis-je passé à côté de quelque chose?

 

 
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