Caravage
- Par hervegautier
- Le 14/01/2023
- Dans Michele Placido
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N°1706– Janvier 2023
Caravage – Un film de Michele Placido .
"L'ombra di Caravaggio"est un film franco-italien sorti en 2022. Il retrace les dernières années de la courte vie du célèbre peintre italien Michelangelo Merisi, dit Le Caravage (1571-1610) dont le talent révolutionna la peinture sous le nom de "caravagisme", s'appropriant et améliorant la technique du "clair-obscur" qui fut ensuite développée par d'autres artistes notamment Rembrandt.
Malgré des débuts difficiles, il étudie, dans l'atelier d'un peintre milanais puis à Rome, les techniques picturales de son temps notamment centrées sur les natures mortes et les portraits, le nouveau regard qu’il porta sur la peinture il valut un grand succès de son vivant, notamment à Rome. En 1606, un duel où il blesse mortellement son adversaire l'oblige à quitter les états pontificaux pour vivre en exil à Naples, à Malte et en Sicile. Pendant cette période et malgré sa réputation sulfureuse, ses peintures ont pour but de racheter cette faute et d'obtenir le pardon du pape. A cette époque un peintre dépendait de riches collectionneurs et commanditaires et les autorités religieuses contrôlaient les images destinées au public. On devait à l'époque en effet représenter des scènes bibliques ou illustrer l’Évangile. Le Caravage, sous l'influence de celui qui deviendra Saint Philippe Neri, fondateur des Oratoriens, et sous la protection à Naples de Costanza Colonna, pratique cet exercice mais pour représenter les saints il prend pour modèles des indigents, des voleurs et des prostituées, c'est à dire tout simplement la vie, ce que ne peut tolérer l’Église malgré l'intérêt que certains prélats portent à son style. Le film de Placido insiste tout particulièrement sur cet aspect de la démarche du Caravage. Le peintre est notamment sous la protection du Pape Paul V et de son neveu le cardinal del Monte et après moult mésaventures violentes il trouve la mort sur une plage de Toscane dans des circonstances restées mystérieuses.
Il semblerait que le Caravage ait obtenu la grâce papale mais dans ce film Michele Placido fit intervenir un personnage fictif, " l'Ombre "(Louis Garrel), chargé par le pape d'instruire le procès qui fait suite à l'assassinat d'un jeune noble pour lequel Le Caravage est condamné à mort. Cet inquisiteur, tout entier sous l'influence des dogmes catholiques de la contre-réforme cherche par tous les moyens, jusques et y compris la ruse, à traduire le peintre devant le tribunal de l'Inquisition. Que Merisi ait croisé le dominicain Giordano Bruno (1548-1600) en prison n'est pas établi, mais après tout pourquoi pas puisqu'ils étaient contemporains et le moine a été incarcéré à Rome avant sa condamnation au bûcher pour apostasie et la conduite scandaleuse du peintre le jetait souvent dans les geôles papales.
La distribution est exceptionnelle, Michele Placido incarne le cardinal del Monte, Ricardo Scamarcio, montre une ressemblance étonnante avec le peintre à tout le moins si on peut en juger d'après le portrait qu'à fait de lui Ottavio Leoni. Isabelle Huppert est rayonnante dans le rôle de la marquise Costanza Colonna protectrice du peintre et Louis Garrel incarne à merveille le personnage de « l’Ombre » qui joue sur les vices du peintre, sur son talent et donc sur sa vie.
C’est un excellent film dont chaque scène est montrée comme un tableau, servi par une distribution prestigieuse qui se penche sur les démêlés du Caravage avec l’Église toute puissante à cette époque, intolérante aussi, se recroquevillant sur des dogmes surannés en contradiction avec l’Évangile dont pourtant les prélats se recommandaient. C'est donc un hommage à un grand peintre qui a connu une longue période d’oubli et aussi une création que j'ai personnellement trouvée convaincante.
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