la feuille volante

Riquet à la houppe

 

La Feuille Volante n° 1363 Juillet 2019.

 

Riquet à la houppe Amélie Nothomb – Albin Michel.

 

Quand j’ai pris ce roman d’Amélie Nothomb sur les rayonnages de la bibliothèque, j’avais en mémoire le conte de Perrault qui racontait l’histoire d’un jeune prince dont l’esprit cachait la laideur et d’une jeune princesse peu douée mais fort belle mais dont on ne remarquait pas la beauté. Les fées qui avaient présidé à leur naissance les firent se rencontrer, chacun donnant à l’autre ce qui lui manquait, et bien entendu ils se marièrent... Comme dans tous les contes pour enfants, c’est surtout une morale pour adultes qu’il faut rechercher et là je me suis demandé ce qu’elle allait bien pouvoir en tirer. Elle reprend donc le thème et crée le personnage de Deodat, un jeune homme, ornithologue de son état, laid et même contrefait mais fort doué et surtout qui plaît aux femmes et qui finit par rencontrer Trémière une beauté un peu niaise et bien entendu ils finirent par vivre ensemble mais sans se marier parce que maintenant cela ne se fait plus beaucoup. Même si c’est un peu long à venir et même un peu laborieux, nous assistons au triomphe de l’amour et l’honneur est donc sauf et l’esprit du conte respecté.

 

C’est une sorte de réécriture de « la belle et la bête » mais je dois dire que je me suis un peu perdu dans les arcanes des aventures séparées des deux tourtereaux avant leur rencontre en me demandant où notre auteure voulait en venir d’autant que la conclusion se fait un peu attendre. D’aucuns appellent cela le suspens et je ne suis pas sûr de l’avoir vraiment goûté. Certes ils ont eu des aventures avant de se rencontrer (surtout Deodat) mais ils ont surtout en commun de susciter les jalousies et une sorte de solitude que leur amour efface comme par enchantement comme il gomme chez eux et entre eux la laideur et la sottise. Notre auteur s’approprie ce conte pour en donner une version personnelle d’où le happy end n’est pas exclu, même si j’ai toujours déploré cette manière d’épilogue un peu trop facile et souvent si éloignée de la réalité. C’est vrai qu’ici ce dénouement est attendu et peut-être aussi souhaité tant l’enfance de nos deux personnages a été difficile surtout à l’école (spécialement sur la cour de récréation) qui, bien loin des clichés convenus, nous donne souvent un avant-goût de ce qui nous attend dans notre vie future. Pourtant Amélie Nothomb, qui porte peut-être en elle une part de romantisme, explique à la fin que la plupart des œuvres inspirées par ce courant littéraire se terminent souvent tragiquement. J’observe quand même que, malgré cet amour fou ils prirent la précaution de ne pas passer à la mairie, se laissant sans doute le choix de se séparer quand ce bel amour se sera émoussé et que le quotidien sera passé par là. C’est sans doute une sage précaution, une prise en compte de la réalité des choses humaines parce que c’est comme cela, « amour » ne rime avec « toujours » que pour les idéalistes où ceux qui préfèrent les illusions ou la vie dans un monde imaginaire. Là aussi la trahison et le mensonge font partie du décor, mais c’est un autre sujet !

 

Le livre refermé j’avoue avoir apprécié cette version sous la plume d’Amélie Nothomb parce que c’est bien écrit, ironique, fantasque même, richement documenté, d’une lecture facile et rapide. Je le précise ici volontiers parce que, depuis que je lis ses ouvrages, il m’est souvent arrivé de m’ennuyer et de marquer ma déception, de dénoncer les critiques souvent dithyrambiques qui accompagnent la sortie de ses romans, voire de déplorer que l’auteure cherche surtout à marquer de son empreinte les rentrées littéraires successives.

 

 

©Hervé Gautier.http:// hervegautier.e-monsite.com

 

 

 

 

 

 
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