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la feuille volante

LE PONT D'ARCUEIL

N°790 – Août 2014.

 

LE PONT D'ARCUEIL - Christian Oster- Les éditions de Minuit. (1994)

 

Le narrateur est abandonné par Laure qui le quitte sur le quai d'une gare et, de retour de son centre de Sécurité-Sociale pou une histoire de carte, il se rend dans l'appartement de France dont il possède les clés mais qui est absente. Ici, il rencontre une troisième femme, Catherine. Comme c'est, sans doute, l'anniversaire de France, il convient de lui faire un cadeau ce dont notre héro se met en devoir, déambulant dans Arcueil et Cachan, villes dominées par le fameux pont qui en fait est composé de deux aqueducs, imposant monument, omniprésent dans le roman, dont l'existence trompe un peu l'ennui du narrateur, France tardant à rentrer.

 

Il y a donc ce voyage dans les rues, de café-restaurant en boutiques mais notre narrateur se livre à un autre plus subtil et peut-être inattendu, dans sa propre tête, avec cette idée de cadeau pour l’improbable anniversaire de France dont on se demande si c'est la vraie raison de sa démarche vers elle. Il réfléchit, ergote avec lui-même, ratiocine à propos de tout et de rien, se triture les méninges, exprime avec une débauche de mots les plis et les replis d'une pensée baroque, bâtit des hypothèses avec une sorte de plaisir que j'ai personnellement du mal à saisir. Autour de lui, c'est à dire dans l'appartement de France, le téléphone sonne, les questions restent sans réponse, à l'extérieur un accident est évité qui n'a peut-être jamais existé que dans sa tête... Le narrateur évoque en effet, avec un grand souci de détails une succession d'événements anodins, de rencontres qui n'ajoutent rien à la compréhension du texte mais qui, au contraire peut-être égarent un peu plus le lecteur à moins qu'ils ne servent qu'à insister sur l'absence de France. Même une rapide passade entre lui et Catherine, sa voisine, n'atteint pas cet objectif et complique encore plus ce récit.

 

C'est en fait un roman dans lequel, comme souvent, il ne se passe rien si ce n'est dans la tête du narrateur, avec en prime l'attente, la solitude, l’obsédante abandon d'une compagne dont l'homme qui en est la victime a beaucoup de mal à se remettre. Le fantasme qu'il ressent pour d'autres femmes comme Catherine n'est là que pour souligner, en contre-champ, l'absence obsédante de France mais aussi la fuite de Laure. Lui-même n'est rien, un simple salarié sans importance, sans beaucoup d'amis et probablement sans vie sociale, pas grand chose dans ce monde où il est un peu perdu au point que le lecteur ne serait pas étonné qu’au détour d'une page, il le trouvât sombrant dans la folie ou simplement ayant attenté à sa vie. Pourtant, il se mêle un peu de tout et surtout de ce qui ne le regarde pas, pour se prouver sans doute qu'il existe, surtout après l'abandon de Laure. C'est que, dans ce roman comme dans bien d'autres que j'ai lus d'Oster, il y a quelque chose de déprimant, de surréaliste, une ambiance qui ressemble à un malaise même, ce qui, à force, devient communicatif et même un peu lassant.

 

©Hervé GAUTIER – Août 2014 - http://hervegautier.e-monsite.com

 
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