la feuille volante

Un mari

N° 1547– mai 2021.

 

Un mari – Italo Svevo – Éditions de l’imprimerie Nationale.

Traduit de l’italien par Ginette Herry.

 

Il s’agit d’une pièce de théâtre qui met en scène Frédérico Arcetri, avocat d’affaires, marié à Bice. Dans son bureau il y a le portrait d’une femme, Clara, sa première épouse qu’il a assassinée parce qu’elle l’a trompé, mais l’avocat a été acquitté pour cet uxoricide (on ne disait pas encore féminicide). C’était en effet l’époque où les tribunaux pardonnaient les crimes passionnels. Brice connaît cette histoire et respecte son mari autant pour sa valeur professionnelle que pour son attitude dans cet affaire d’adultère. Elle le considère comme un héro pour ce qu’il est et pour ce qu’il a fait en même temps qu’elle accepte ce portait comme la marque que l’amour que porte encore Frédérico à l’épouse qu’il a tuée. Les choses auraient pu demeurer ainsi longtemps mais c’est sans compter sans son ex-belle mère, Arianna Pareti, qui révèle à Francisco que Paolo Mansi, un ami du couple est aussi l’amant de Brice. Les choses se corsent quand on demande à Francisco, en dehors de sa sphère de compétence, de défendre un homme coupable d’avoir occis son épouse, elle aussi convaincue d’adultère. C’est donc pour lui une situation cornélienne qui est la sienne entre les soupçons qu’il nourrit au sujet de son actuelle épouse et la défense qu’il doit assurer dans une affaire qui ressemble étrangement à celle qu’il a connue lors de son premier mariage. De plus il entretient avec son ex-belle-mère des sentiments quasi-maternels alors que cette dernière le hait et cet épisode de sa vie le remet face à lui-même, à ses contradictions, à ses peurs et à son destin.

 

 

La pièce, une comédie en trois actes, a été un long travail d’écriture (de 1895 à 1903) n’a paru que trois ans après sa mort, en 1931, dans un revue milanaise. Elle a été montée pour la première fois en Italie en 1982 à Vérone et en France en 1991. En réalité je ne suis pas bien sûr qu’il s’agit d’une comédie, même si l’épilogue y ressemble un peu et que la trahison de Brice n’est pas vraiment avérée. Certes, cette situation évoque d’emblée une pièce de boulevard qui a fait les beaux jours de Feydeau ou de Labiche mais en réalité j’y verrais plutôt un drame vécu par Francisco qui se débat dans une réalité personnelle difficile avec les doutes qu’il nourrit à l’endroit de son épouse et la défense qu’il doit assurer et qui lui rappelle un peu trop son passé intime. Viennent s’ajouter le pardon impossible et l’envie de nuire comme une vengeance.

 

Je ne connaissais pas Italo Svevo (1861-1928 – ce qui signifie « Italien souabe »), de son vrai nom Ettore Schmitz auteur né à Trieste. Il est l’héritier d’une double culture italienne et rhénane mais aussi de confession juive par sa naissance et catholique par son mariage. Il a souvent fait éditer ses œuvres (pièces de théâtre, nouvelles) à son propre compte où, restées dans ses tiroirs, n’ont été publiées qu’à titre posthume eu égard à ses vaines recherches d’un éditeur. Autant dire qu’Il n’a jamais vraiment connu le succès de son vivant. Il a été l’ami, Freud et de Joyce, de Valéry Larbaud  et de Benjamin Crémieux qui ont contribué à le faire connaître en France.

 

 

 

 

 
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