la feuille volante

LA CAMPAGNE DE FRANCE

N°770 – Juillet 2014.

LA CAMPAGNE DE FRANCEJean-Claude Lalumière – Le dilettante.

« Cultibus », c’est agence de voyages basée à Biarritz qu'ont créée Alexandre et Otto, deux jeunes professeurs de littéraire et d'histoire que le métier d'enseignant a rebuté et qui proposent, à titre de reconversion, des trajets culturels en car à travers l'Europe. On fait mieux pour motiver le client et attirer la clientèle mais au moins fait-on ainsi dans l’original puisque la but n'est ni le Mont-Saint Michel, ni Euro-Disney ni le Futuroscope ! D'ailleurs les comptes en font foi, ça sent le dépôt de bilan ! Il va falloir faire quelque chose pour sauver cette pourtant jeune entreprise et cette chose vient sous la forme d'un périple partant de chez eux pour rallier le nord de la France, une sorte de « Ch'ti tour », sur le thème de l'amitié franco-allemande mais version littéraire, ce qui, là non plus ne risquait pas de déplacer les foules. Miracle, une association de retraités de St Jean de Luz se présente mais ce voyage avait quelque chose d'expérimental puisque nos deux voyagistes ne tardent pas à s’apercevoir que leur clientèle s'intéresse davantage à la nourriture et au show-biz qu'à la culture. Malgré leur formation littéraire, nos deux compères peinent à passionner leur auditoire et leur programme originel est vite oublié et varie au gré de ses desiderata, des grèves sauvages avec barrages routiers et des pannes inopinées. Ils avaient prévu d'invoquer les œuvres complètes d'Alain Decaux et le manuel scolaire de Lagarde et Michard en plusieurs tomes mais les voici orientés vers les côtes de Vendée dévastées par la tempête Xynthia, une usine de friandises à Cholet puis contraints à un bivouac en pleine nature plus digne de boys-scouts que de gens du troisième âge !

En fait ce groupe hétéroclite de douze retraités, composé notamment d'un colonel en retraite, fervent gaulliste, d'un ancien combattant qui bouffe du boche, d'un professeur de français atteinte de la maladie d’Alzheimer et d'un ex-conducteur de car scolaire grincheux, est parfaitement ingérable et nos deux agents de voyage font ce qu'ils peuvent pour satisfaire cette clientèle parfois vindicative parfois étonnamment conciliante alors que leur entreprise ,au bord du gouffre financier, les contraint en permanence à négocier le prix des hôtels et des restaurants, d'inventer des activités, tout cela sous l’œil inquisiteur de leur comptable... Pendant toutes ces pérégrinations parfois hasardeuses Alexandre qui a un penchant pour Otto fait ce qu'il peut pour se rapprocher de lui malgré une indifférence affichée de l'intéressé, mais la hasard des rencontres va changer la donne.

Son premier roman,« Le front russe »(La Feuille Volante n° 508) m'avait bien plu. Ici, l'auteur ne se départit pas de son humour habituel mais celui-ci m'a beaucoup moins convaincu. Certes le texte se lit facilement et même vite mais j'ai noté quelques longueurs, des incongruités même, un épilogue un peu artificiel avec une « happy-end » digne d'un roman à l'eau de rose pour ces deux loosers reconvertis temporairement en agents de voyages qui ne tarderont sûrement pas à rejoindre l’Éducation Nationale qu'ils avaient soigneusement choisi d'éviter. A entendre ceux qui en font partie, c'est, malgré les grandeurs et les servitudes de la Fonction Publique, le plus beau métier, on y jouit au moins de la sécurité d’emploi et des vacances !

©Hervé GAUTIER – Juillet 2014 - http://hervegautier.e-monsite.com

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