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la feuille volante

AUTOPORTRAIT (à l'étranger)

 

N°918– Juin 2015

 

AUTOPORTRAIT (à l'étranger)- Jean-Philippe Toussaint – Les éditions de Minuit.

 

Pour un écrivain volontiers égocentriste, l'autoportrait (à l'étranger ou pas) paraît être une chose facile et ce d'autant plus que dans tout ce que Toussaint écrit il y a toujours une (grande) part de lui-même et ce nonobstant le fait qu'il prend la précaution de se cacher derrière le masque d'un personnage.

 

Cette série de portraits qui sont autant de nouvelles où il tient une place centrale, se passe donc à l'étranger, c'est à dire qu'ils se croque lui-même à l'occasion de voyages qu'il fait hors des frontières de la Belgique, aux frais des institutions pour participer à un colloque d'écrivains ou pour son propre agrément. Ainsi entraîne-t-il son lecteur de Tokyo à Hanoï, partage la vedette avec Tahar Ben Jelloun ou Olivier Rolin et même Jane Birkin à qui des écrivains vietnamiens venus écouter l'auteur réclament une chanson et dont on se demande ce qu'elle peut bien faire dans un tel aréopage. Les voyages ouvrent l'esprit, réservent parfois des surprises comme à Sfax où il est accueilli par un universitaire attentif, mais par une assemblée de 10 personnes seulement ! Il ne cache rien à son lecteur, évoque des érections spontanées à l'approche de Sousse, même si cette situation est pour le moins étonnante alors qu'une visite en principe chaude dans une boite de strip-tease japonaise lui cause une réelle répulsion. Étonnante aussi, cette victoire dans un championnat de de pétanque au cap Corse présentée comme « le plus beau jour de sa vie » !(Je veux bien que cela prenne des allures de finale de Coupe Davis, mais quand même). Il ne cache rien de ses douleurs lombaires ni de sa perte de repères spatio-temporels, ses manques de mémoire et autres petits problèmes liés à sa charge de père de famille ou de l'envie qu'a Madeleine, sa femme, de repeindre tout ce qui passe à sa portée.

 

Chacun des moments de sa vie, même les plus anodins, est prétexte à cet autoportrait égocentrique, qu'il rencontre une admiratrice nippone ou qu'il se révèle d'une grande cruauté en achetant de la charcuterie dans la boutique d'une malheureuse commerçante allemande. Rien à voir en tout cas avec l'ennui d'un guide touristique, ce qu'on pouvait légitimement redouter puisque que, notamment Carthage le laisse complètement indifférent.

 

J'aime bien Jean-Philippe Toussaint dont je continue à découvrir l’œuvre de livre en livre, mais en dehors de l’aspect anecdotique riche en fignolages comme à son habitude, cette petite musique nostalgique que j'aime à retrouver chez lui et cet humour si caractéristique qui qui puise une partie de sa réalité dans l'inflation des mots et le culte immodéré du détail, je crois avoir lu plus intéressant sous sa plume et je me suis un peu ennuyé à l'énoncé de ces petites anecdotes, certes bien écrites (les phrases sont comme d'habitude d'une longueur quasi proustienne) mais qui se caractérisent cependant par un aspect insignifiant incontestable.

 

©Hervé GAUTIER – Juin 2015 - http://hervegautier.e-monsite.com

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