la feuille volante

Le livre de sable

N° 1428 - Février 2020.

 

Le livre de sable - Jorge Luis Borges- Folio.

Traduit de l'espagnol par Françoise Rosset.

 

C’est une atmosphère bien étrange qui baigne les différentes nouvelles de ce recueil tel Borges qui rencontre un autre lui-même. Il y a d’ailleurs beaucoup d entrevues dans ces textes au nombre de treize [est-ce une allusion au mystère de ce nombre? L’auteur précise lui-même qu’il est le fruit du hasard ou de la fatalité], le narrateur est toujours un sud-américain d’un certain âge qui croise, d’ailleurs fortuitement et sans suite pour l’avenir, un interlocuteur (ou trice) plus jeune. Le conteur, qui ressemble à l’auteur tant les détails biographiques donnés le concernent (certains de ses personnages ont en effet des problèmes de vue), est toujours seul voire solitaire malgré quelques rencontres amoureuses mais qui ne durent pas. Les textes où le rêve tient un grande place sont souvent labyrinthiques, inquiétants, mystérieux, fantastiques avec des connotations d’horreur. Il est souvent fait allusion à d’autres écrivains de la même inspiration. Refusant d’écrire une préface à son propre livre Borges lui préfère un épilogue dans lequel il s’explique ou donne des clés de ces différentes fictions. Il souhaite que les rêves qu’elles ne manqueront pas de susciter continuent à nourrir l’imaginaire de ses lecteurs.

 

C’est sans doute la caractéristique d’un esprit quelque peu dérangé mais je dois bien avouer que je suis entré de plain-pied, sans le comprendre complètement peut-être, dans cet univers que je caractérise moi-même d’énigmatique et je souscris à la remarque de notre auteur faite au début de la nouvelle qui donne son titre au recueil. Il y écrit « C’est devenu une convention aujourd’hui d’affirmer de tout conte fantastique qu’il est véridique ». Cette remarque m’évoque à la fois celle de Boris Vian dans la préface de « l’écume des jours » : « L'histoire est entièrement vraie puisque je l'ai imaginée d'un bout à l'autre. » ou, à contrario , le tableau de Magritte «Ceci n’est pas une pipe ».

 

Ce recueil illustre bien le parti-pris d’écriture qui fut celui de Borges. Il est en effet connu pour être un nouvelliste privilégiant le fantastique et l’aspect infini des choses comme peut l’indiquer la référence au sable qui figure dans le titre donné à cet ouvrage.

 

Je retiens aussi cette citation de Borges signant également la 4° de couverture « Je n’écris pas pour une petite élite dont je n’ai cure ni pour une entité platonique adulée qu’on surnomme la Masse. Je ne crois pas à ces deux abstractions, chères aux démagogues. J’écris pour moi, pour mes amis et pour adoucir le cours du temps ».

 

©Hervé Gautier http:// hervegautier.e-monsite.comN° 1423 - Janvier 2020.

 

 
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