MONDE SANS OISEAUX
- Par hervegautier
- Le 01/10/2014
- Dans Karin Serres
- 0 commentaire
N°809 – Septembre 2014.
MONDE SANS OISEAUX - Karin Serres – Stock.
Ai-je perdu le goût des fables ? Serais-je devenu imperméable à ce monde merveilleux que des écrivains comme Boris Vian avaient si bien su tisser autour de moi, il y a de cela bien des années, pour modifier mon approche de la littérature qui était à la fois scolaire et un peu trop classique ? L'auteur de « l'écume des jours » avait enchanté cette période de ma vie par cette poésie si caractéristique qui émanait de son œuvre. Je tiens à garder intact ce charme qui fonctionne peu ou prou encore aujourd’hui mais malgré ma propension à vouloir voir les choses autrement, je ne suis pas vraiment entré dans cet univers que je reconnais pourtant comme original et onirique.
Comme dans tous les contes, il faut dépasser les mots, aller chercher derrière les phrases le message, mais l'histoire de « Petite Boîte d'Os » ne m'a guère enthousiasmé. Elle est la fille d'un pasteur, habite près d'un lac, dans un pays un peu indistinct qu'on peut aisément imaginer nordique. Elle grandit, va à l'école, se fait des amis, voit son corps se modifier, se marie avec Joseph « Tados », plus vieux qu'elle et qui lui fait un enfant. Cet homme a une réputation non vérifiée de « cannibale » parce qu'il a survécu au déluge et qu'il est revenu au village sans l'homme qui l'accompagnait. Cette bourgade est un microcosme où les gens vivent en vase clos. On pourrait peut-être y voir l'incarnation d'un Eden puisque les choses y sont différentes d'ailleurs. On y tire sa subsistance de cochons transgéniques et fluorescents qui vivent dans l'eau du lac dont le fond sombre est tapissé de cercueils troués. Les morts servent ainsi de nourriture au porcs et aux poissons, une sorte de reconstitution de la chaîne alimentaire.« Petite Boîte d'Os » vit avec sa famille dans une maison bleue, dont la couleur, sans doute à cause de la chanson de Maxime Le Forestier, évoque le bonheur.
Pourtant la vie de cette jeune femme, malgré le contexte surréaliste de ce village, est assez ordinaire, faite de petits bonheurs (scène de la vie de famille) ou de grands malheurs(deuils, perte d'un proche). Les enfants grandissent, quittent leur famille, les gens vieillissent et meurent, certains même se suicident parce qu'il ne supportent pas ce monde, d'autres y connaissent la solitude et l'abandon et comme à l'extérieur c'est la même fuite du temps. Le texte est pourtant actuel, met en scène les changements dans la vie sociale qui obligent les femmes à aller travailler dans la ville voisine et donc à confier leurs enfants à d'autres pour ainsi gagner un peu d'argent et survivre. Il prend un ton écologique quand il est question de la montée des eaux de ce lac à cause du changement climatique. Quand il évoque les temps reculés où l'air était peuplé d'oiseaux maintenant disparus, on ne peut pas ne pas songer à cette constante action destructrice de l'homme qui, au nom de la rentabilité et de l'enrichissement d'une génération, détruit inexorablement ses richesses en laissant le soin à la suivante de réparer ses erreurs ! Des ethnologues viennent de l'extérieur étudier ce mode de vie et des touristes curieux prennent des photos mais les choses dépérissent et les gens avec elles ! Le village se vide et avec le temps, les bouleaux qui entouraient le bourg s’attaquent aux maisons, une sorte de fin du monde !
J'ai pourtant trouvé à ce texte étrange une sorte de poésie colorée mais je l'ai lu davantage par curiosité que par réel intérêt.
©Hervé GAUTIER – Septembre 2014 - http://hervegautier.e-monsite.com
Ajouter un commentaire