la feuille volante

PETRONILLE

 

N°937– Juillet 2015

 

PETRONILLE - Amélie NOTHOMB – Albin Michel.

 

Ça commence par un aphorisme sur l'ivresse [« L'ivresse ne s'improvise pas. Elle relève de l'art qui exige don et souci. Boire au hasard ne mène nulle part ».] Pourquoi pas et après tout, je me suis dit que c'était plutôt un bon début puisque cet état favorise dit-on la créativité et stimule l'inspiration chez certains auteurs. D'ailleurs Amélie Nothomb y va de ses confidences sur le sujet qu'elle semble bien connaître : elle aime le champagne et nous livre sa méthode, non pas forcément pour l'apprécier mais pour s'étourdir avec, un long jeûne de 36 heures étant, selon elle, nécessaire pour s'en griser et connaître une véritable transe, un état quasi-chamanique. Après tout ! Puisqu'elle en est aux confidences, elle nous narre la rencontre qu'elle a faite au cours d'une dédicace avec Pétronille Fanton, une jeune lectrice un peu fantasque avec qui elle correspondait. Cela devait sans doute se passer au début de sa carrière d'écrivain car il m'apparaît que plus un auteur gagne en notoriété, plus il délaisse ses lecteurs à qui pourtant il doit la vente de ses livres. Or il se trouve que cette jeune fille, que sa correspondance lui faisait imaginer comme une vieille femme, se révèle non seulement être d'une couche sociale différente de la sienne mais aussi être un jeune écrivain qui va de révéler par la suite comme talentueux. Une sorte de complicité, voire une amitié va naître entre ces deux jeunes femmes que pourtant bien des choses opposent. Elles semblent cependant avoir pour point commun un goût assez immodéré pour le champagne. Cela tombe plutôt bien puisque Amélie ne peut consommer ce divin breuvage qu'en bonne compagnie ; Pétronille va devenir sa « convigne » qui partage sa boisson préférée, comme le compagnon partage le pain. Ainsi va naître ce roman éponyme qu'on pourrait nommer « les pérégrinations alcooliques de deux jeunes femmes » Elles ne se quittent plus et vont même arpenter ensemble bien des lieux connus, mais toujours une flûte à la main, ce qui nous vaut un catalogue de marques prestigieuses, la publicité étant sans doute gratuite. Ces deux « pochtronnes » s'entendent si bien que lorsque les critiques ne sont pas à la hauteur du talent qu'elles pensaient avoir mis dans leurs livres respectifs, c'est tout naturellement et de conserve dans le champagne qu'elles noient leur déconvenue. Cette addiction pour le breuvage cher à Dom Pérignon entraîne sous sa plume bien des remarques. J'y préfère celles qu'elle décline sur le monde des lettres, des auteurs et surtout des éditeurs, pas toujours capables de reconnaître « sur pièce » un vrai talent. Celui de Pétronille dont elle se fait la marraine (c'est plutôt bien de sa part de se servir de sa notoriété) n'étant pas accepté comme tel.

Il semblerait que, selon l'aveu de l'auteure elle-même, le personnage de Pétronille lui aurait été inspiré par Stéphanie Hochet, romancière, essayiste et journaliste. Elle reprend en effet nombre des titres de cette auteure en les modifiant quelque peu[« La distribution des ombres » de Stéphanie Hochet devient chez Amélie « La distribution des lumières »]. Là aussi c'est plutôt bien de sa part de faire la promotion d'une consœur qui pourrait bien devenir éventuellement une concurrente. Quant à l'épilogue, je le trouve décevant.

 

Je ne suis que très peu entré dans cette narration, dans cette mise en scène coutumière de la vie de l'auteure et comme d'habitude depuis que je lis Amélie Nothomb, je ne lui trouve qu'une qualité de style agréable et donc facile à lire. Pour le reste son côté égocentrique, il est vrai commun à bien des auteurs, m'agace un peu. Encore une fois elle ne peux que parler d'elle, de ses livres… Je lis quand même ses romans puisqu'elle est un auteur connu, reconnu et prolixe (c'est son 23° roman) dont je ne peux parler qu'en les connaissant. Après tout la lecture et la littérature font partie de mes passions et j'aurais tort de m'en priver même si, au cas particulier, le plaisir n'est pas vraiment au rendez-vous. Je fais cependant toujours la même remarque, je n'ai peut-être encore une fois rien compris et suis passé à côté d'un chef-d’œuvre surtout si je me réfère aux avis laudatifs de la presse spécialisée et de ses nombreux lecteurs. Tant pis pour moi, mais je continuerai quand même à explorer son œuvre ne serait-ce que pour voir si, par hasard, je ne changerais pas d'avis !

 

Hervé GAUTIER – Juillet 2015 - http://hervegautier.e-monsite.com

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