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la feuille volante

Le coeur du problème

La Feuille Volante n° 1317

 

Le cœur du problème - Christian Oster- Éditions de l'Olivier

 

Simon, un conférencier, rentre chez lui, probablement à une heure inhabituelle, trouve un homme mort, inconnu de lui, dans son salon et sa compagne, Diane, en train de prendre un bain. Il ne faut pas être grand clerc pour imaginer le scénario, un cocuage bien banal, mais ce qu'il l'est beaucoup moins c'est que la femme en dit le moins possible, prétend que cette mort n'est qu'un accident, une chute depuis la mezzanine dont la balustrade s'est rompue, s'en va et disparaît complètement, en lui laissant le soin de solutionner cette affaire. Ce qui l'est encore moins, c'est que Simon, au lieu d'appeler la police, ce qu'il aurait logiquement dû faire, va tout faire pour cacher ce qui est réalité un meurtre et on balance entre un trop grand amour pour sa compagne qu'il aime et à qui il pardonne cette incartade et une déstabilisation telle qu'il est amené à faire ce qu'en temps ordinaire il n'aurait pas fait. Se sent-il coupable de n'avoir pas été à la hauteur des aspirations amoureuses de Diane ou s'en veut-il de s'être trompé dans son choix ? En fait nous ne savons rien de leurs relations intimes. Comme à chaque fois dans pareil cas, faire disparaître le corps était indispensable et la solution qu'il trouve paraît un peu inattendue. Un tel scénario policier menaçait d'être intéressant et tranchait quelque peu sur l'ambiance ordinaire des romans de cet auteur

 

En l'absence de Diane, qui à l'évidence l'a quitté définitivement, Simon se sent abandonné et bien des choses lui passent par la tête, ce qui donne à l'auteur l'occasion de renouer avec son thème favori : la solitude. Dans le cadre d'un adultère, celui qui est laissé pour compte a parfois un sentiment d'injustice, de trahison, d'abandon d'autant que Simon n'a pas beaucoup d'amis à qui se confier et qu'on est, de toute façon guère fier d'une telle situation personnelle. Il n'en parle donc à personne sauf peut-être à un ex-gendarme, Henri, qui malgré sa récente retraite est ému par son histoire. Mais un gendarme, même à la retraite, reste en enquêteur suspicieux et quand intervient l'épouse de l'ex-amant de Diane, cette dernière étant réfugiée en Angleterre, les choses se compliquent. Non seulement elle sort du jeu définitivement de part son éloignement mais Simon devient son complice pour avoir fait disparaître le corps. Dès lors, on à l'impression de l’étau se resserre autour de lui et que c'est lui qui tâtera des Assises. Le hasard, mais est-ce vraiment lui, met Simon dans une situation délicate qui, paradoxalement, tout en le maintenant sur ses gardes, donne l'impression qu'il est au bord d'un gouffre et a la ferme intention de mettre fin à cette situation de plus en plus intenable par une action qui le mette en porte à faux. On a même l'impression qu'Henri, qui a sans doute tout compris, tourne autour de Simon, joue avec lui, le balade à son gré et lui portera bientôt l'estocade. En réalité on oublie rapidement cette histoire de mort au gré des événements, on est embarqué dans plusieurs autres épisodes qui n'ont rien à voir, outre que Simon confesse un peu hasard, un crime qu'il n'a pas commis, comme pour sortir de cet imbroglio, mais tout cela est sans aucune suite. On constate la solitude prégnante de tous les protagonistes, mariés ou non, le naufrage du mariage et les idylles possibles entre Simon et les différentes femmes qu'il croise s'avèrent autant d'impasses, par timidité de sa part, par peur d'être éconduit ou simplement par crainte du mensonge ou de la trahison de la partenaire.

 

Je déplore toujours la même chose chez cet auteur, non qu'il écrive mal, loin s'en faut, mais la longueur de ses phrases, et ses descriptions dont la méticulosité est poussée à l'excès ont tendance à me déconcentrer. J'accorde cependant de l'attention à ses romans seulement peut-être parce qu'ils se lisent facilement. J'ai quand même une interrogation sur cet auteur qui parle si abondamment de la solitude et des femmes, et dédit pratiquement tous ses romans à Véronique B qui reste une inconnue pour le lecteur. Pourtant l'analyse psychologique que Oster fait des différents personnages et des situations entretient le suspense même si, à la fin, j'ai été carrément déçu. Les chapitres sont courts au début puis vers la fin s'étoffent un peu plus mais ce qui pouvait passer au départ pour un roman policier n'en est, en fait, pas un. C'est, ai-je cru le lire, une longue digression sur l'isolement cher à Oster, la solitude des êtres à cause sans doute du désamour dans lequel ils vivent, de la fragilité des choses de cette vie. Ne serait-ce pas cela le cœur du problème ?

©Hervé GAUTIER – Janvier 2019.http://hervegautier.e-monsite.com

 

 

 

 
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