la feuille volante

LES JOLIS GARCONS

N°862– Février 2015

LES JOLIS GARCONS- Delphine de Vigan – JC Lattès..

Emma est une jeune femme fantasque, manifestement en manque d'amour, excitée, d'aucuns diraient même nymphomane. La trentaine un peu désabusée, elle narre à la première personne, presque sur le ton de la confidence, son histoire intime avec trois hommes qui ont marqué sa vie. Ils sont aussi différents entre eux qu'ils sont différents d'elle mais aucun ne souhaitent demeurer avec elle. Ils se contentent du rôle d'amant, la laissant à sa solitude, à sa lucidité, à sa souffrance intime, à son désespoir. Tout n'est chez elle qu'illusion, l'illusion de l'amour.

C'est un recueil de trois nouvelles qui retracent ces trois expériences. Quand elle parle de Mark Stevenson qu'elle dépeint comme un avocat célèbre, marié mais finalement peu attentif à sa présence, puisque lorsqu'elle l'évoque c'est plutôt le mot absence qui revient sous sa plume Mais c'est aussi et peut-être surtout le manque d'amour qui affecte leur relation. Cet homme est assez énigmatique dans sa relation avec Emma et avec les femmes en général. La narratrice parle même d'inexistence, de leurre, sans qu'on sache si cela est né de l'attitude de Mark ou de la trop grande attente d'Emma. Le lecteur comprend qu’au moment de cette narration, elle est devant un psychiatre dans le contexte un peu dramatique d'une séance de paroles qui ne sera peut-être pas salvatrice et même peut-être douloureuse. Le suspens est savamment entretenu et l’épilogue surprend un peu quand même, malgré les indices semés au cours de cette évocation. J'avoue avoir été sensible à cet épisode.

La deuxième nouvelle met en scène Ethan Castor, un homme qui aime le corps des femmes, ce pour quoi on ne saurait lui faire de reproche puisque, à mon avis, si Dieu existe, la beauté des femmes est bien ce qu'il a réussi le mieux dans la Création. Il est aussi écrivain et sa relation avec Emma n'a duré que trois jours, une passade de plus avec un autre homme marié ! Ici le ton est plus léger, primesautier même.

Pour le troisième récit, Emma jette son dévolu sur un animateur de télé-réalité, Milan Mikaev, et vit avec lui quatre mois tourbillonnants. Mais si dans les deux premiers textes elle semblait être un peu passive, là elle prend les choses en mains... jusqu'à les refuser. De ces deux derniers récits, j'ai eu l'impression d'être le spectateur de la superficialité du milieu littéraire et audiovisuel parisien, mais il est vrai que je ne suis qu'un provincial peu habitué à cette vie.

Je ne sais pas pourquoi, mais le livre refermé, le titre ne me parle plus, le terme « joli » ne peut à mon sens qu'être réservé aux femmes (c'est là il est vrai l'avis d'un homme) mais alors que j'avais bien aimé « Jours sans faim » et « Rien ne s'oppose à la nuit »[« la feuille volante n°860-585], je serai ici un peu plus nuancé. Je peux retenir de ce livre l'immense vacuité de la vie, l'impossibilité de l'amour avec l'Autre qui n'existe sûrement que dans l'imaginaire ou la force du hasard mais, à part peut-être la première nouvelle de ce recueil, et malgré un style fluide, j'ai vraiment eu l'impression de m'ennuyer à cette lecture.

©Hervé GAUTIER – Février 2015 - http://hervegautier.e-monsite.com

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