la feuille volante

Gérard de Nerval

 

N° 1461- Avril 2020.

Gérard de Nerval.

 

Parmi les poètes romantiques, Gérard de Nerval (1808-1855) tient une place à part. En effet, il a donné à voir de multiples facettes de luu-même durant son existence, dont certaines ont été dominantes. Il a contribué à créer autour de lui une légende dont il a été victime. Il aurait pu figurer sur la liste des « Poètes maudits » de Verlaine publié en 1884 et 1888, mais celle-ci, limitative, ne le mentionne pas. On peut cependant lui donner cette caractéristique, née de l’expression d’Alfred de Vigny, qui présente le poète maudit comme une figure tragique, versant à l’occasion dans la démence, donnant de lui l‘image d’un être asocial, contempteur des valeurs de la société et qui se comporte d’une manière scandaleuse voire autodestructrice et qui meurt généralement sans que son génie soit reconnu.

De son vrai nom Gérard Labrunie, il est le fils d’un médecin militaire de la Grande Armée, il perd sa mère de bonne heure alors qu’elle n’a que 25 ans . Il portera toujours son deuil comme un idéal perdu et cela expliquera, dans sa vie et dans son œuvre, son comportement à l’égard des femmes et sa vision de l’amour mystique. Il est confié à son grand oncle chez qui il trouve des livres d’occultisme qui occupent sa jeunesse insouciante. Ayant quitté l’armée, son père s’installe à Paris avec son fils, étudiant en médecine puis clerc de notaire, où ce dernier fréquent Gautier, Dumas et Hugo, publie ses poèmes tout en traduisant des poètes allemands, fréquente en dandy la bohème romantique, rencontre Jenny Colon, une jeune cantatrice dont il tombe amoureux et pour qui il écrit un opéra comique inspiré par son amour pour elle et même si leur liaison tourna court, il garda intacte son image idéalisée, entre mère perdue et femme idéale, ce qui altérera plus tard sa santé mentale. La figure de Jenny, mais aussi celle de Marie Pleyel, une pianiste belge qui l’inspira, sera incarnée sous sa plume en personnages féminins idéalisés (Sylvie, Aurélia) ou dénoncée comme la source des malheurs humains(Pandora). Sa rupture avec Jenny Collon qui se marie en 1838 avec un flûtiste correspond au renforcement de son mysticisme amoureux en même temps qu’au début de ses troubles mentaux qui ne cesseront de s’aggraver. Aux alentours de trente ans il effectue nombre de déplacements en Europe puis en Orient, publie dans diverses revues des récits de voyages et des traductions et des œuvres en prose. Sa vie sera néanmoins placée sous le signe de l’impécuniosité (On aurait retrouvé sur lui à sa mort une lettre demandant de l’argent pour survivre) Plus jeune, il avait traduit Faust ce qui avait éveillé son goût pour l’occultisme, son obsession pour le passé et pour le théâtre, mais cette dernière discipline connut pour lui des fortunes diverses. Vers la quarantaine, des périodes de délire pendant lesquelles il est interné alternent avec des phases plus calmes et il fait l’expérience de l’exploration obsédante du rêve, du délire mystique et du pouvoir cathartique de l’écriture, signant notamment un recueil de nouvelles « Les filles du feu » et de sonnets « Les Chimères » mais la pauvreté s’en mêlant on le retrouve pendu dans une sordide ruelle parisienne.

Son œuvre littéraire, poèmes et nouvelles, reflète son drame intérieur et son obsession de l’idéal féminin et bien que tardive, cette manifestation créatrice est cependant restée dans la mémoire collective, davantage peut-être que son œuvre en prose, théâtrale et romanesque. « Les chimères » vers quoi porte mon intérêt personnel, est un recueil de douze sonnets dont le nombre lui-même à une connotation biblique mais leur signification quelque peu obscure empreinte à l’ésotérisme, à l’alchimie autant qu’à l’autobiographie. Le poème emblématique de ce recueil est « El desdichdo » (le malheureux »). Il a fixé les images de ses rêves grâce à la poésie mais elle est marquée par l’image de la femme, à la fois idéalisée et obsédante.

©Hervé Gautier http:// hervegautier.e-monsite.com

 

 
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