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la feuille volante

ACCESSIBLE A CERTAINE MELANCOLIE– Patrick Besson

 

N°617– Janvier 2013.

ACCESSIBLE A CERTAINE MELANCOLIE– Patrick Besson- Albin Michel

 

Milan Canovas est un séducteur qui a dépassé la quarantaine. Son nom est d'ailleurs, à quelques lettres près, celui de Giacomo Casanova. Comme notre Vénitien, il va de femme en femme, les séduit, couche avec elles puis les abandonne au gré de son humeur ou de ses autres conquêtes. Après tout, un authentique Don Juan ne fait pas autre chose, ne vit pas autrement. Il est correspondant de guerre ce qui ajoute sans doute à son aura pour ses compagnes d'une nuit ou de quelques jours. Certes, il est marié et père de famille mais cela ne l'empêche pas de pratiquer le nomadisme amoureux que facilite grandement son métier itinérant.

 

Présentement, il est marié à Brigitte avec qui il a un enfant et qui est enceinte, de lui doit-on préciser, et qu'il passe son temps à quitter tout en gardant toujours son adresse et son numéro de téléphone, au cas où... Mais dans le même temps il y a Rose, une étudiante au nez refait par Anne, une chirurgienne dont il devient aussi l'amant bien qu'elle soit elle-aussi mariée et mère de famille et qui choisit de tout abandonner pour le suivre malgré ses autres maîtresses ! Il multiplie les passades et où qu'il aille, une femme l'attend pour coucher avec lui, qu'il soit en France ou à l'étranger ! Il hait les repas de famille et la famille elle-même et ses enfants n'ont que peu d'importance pour lui. J'ai eu l'impression que ce qu'il aime dans cette vie se résume à la jouissance qu'il ressent avec une femme, mais à condition d'en changer rapidement, et à condition aussi que le moment soit piquant, érotique, exceptionnel ! On pourrait être tenté de dire « Tout ça pour ça » mais, après tout , cela peut parfaitement représenter un art de vivre qui en vaut un autre !

 

Face à cette envie de jouir, on a l'impression que tout le reste est une somme d'épiphénomènes, tout le reste comme le cancer de Brigitte ou l'agression sur sa personne et avec arme à feu d'une de ses anciennes maîtresses. A Norbert, Le philosophe-ami, il avoue « Je crois que je n'ai plus de sentiment, plus aucune humanité...Il me semble que j'ai simplement besoin d'elle(de sa maîtresse), un besoin atroce, comme celui de la vache pour le brin d'herbe ».

Ce roman est donc l’histoire quelque peu échevelée de tous ses amours, ce qui pourrait sembler anodine ou intéressante, mais que le style du texte ne m'a pas beaucoup encouragé à poursuivre ma lecture. Le livre a bien failli me tomber des mains plusieurs fois, mais j'ai poursuivi, ne serait-ce que pour avoir la clé de ce roman dont le titre est quelque peu énigmatique. Ce n'est pas simple de trouver un intitulé à un récit et je me suis interrogé sur la signification d'icelui. C'est sans doute ce qui m'a motivé ?

 

Pourtant, j'ai ressenti autre chose, une sorte de musique mélancolique née d'une vie certes aux antipodes de la routine mais quand même, baignée par un ennui. Cela vient-il de la fuite du temps soulignée par le calendrier des événements passés que l'auteur égrène avec une certaine nostalgie. Peut-être ? J'ai eu l'impression que cette vie était à ce point difficile qu’il attendait de la femme, c'est à dire de toutes celles qui croisaient sa vie, qu'elle soit une sorte de révélateur qui le transformerait, qui serait capable de faire de lui ce qu'il est en réalité. C'est un peu comme s'il déplorait le spectacle de lui-même, celui d'un être imparfait et en devenir. « Il attendait de rencontrer une femme qui lui donnerait forme humaine, c'est à dire divine... Il fallait que quelqu'un le sorte de cette prison... Chaque femme pouvait être ce sauveur...Il n'aimait pas les femmes, ils croyait en elles. Il était sûr que l'une d'entre elles le sauverait .Il voulait la trouver avant de mourir. » Cela vient-il qu'entre les lignes il y a la réalité de la mort qui nous attend tous et que les humains qui nous entourent ne suffisent pas à nous faire oublier. Peut-être ? Pourtant, la camarde peut parfaitement être regardée comme un sauveur et son coup de faux un acte de libération. J'avoue que ce message me séduit assez et que Milan peut parfaitement vouloir jouir sans entrave avant cette échéance. Peut-être ressent-il une sorte de mal de vivre, né de impossibilité de se fixer et qu’il l'exorcise par la conquête des femmes qui résume pour lui à un simple acte sexuel, comme un dérivatif pourtant voué à l'échec et qui porte en lui le suivant ? Peut-être ?

 

Il reste que j'ai beaucoup moins accroché à ce roman. Les précédents (Belle-sœur, Saint-Sépulcre ! La feuille volante n° 615 et 616) m'avaient davantage plu.

 

 

 

 
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