la feuille volante

RETOUR PARMI LES HOMMES – Philippe Besson

 

N°612– Décembre 2012.

RETOUR PARMI LES HOMMES – Philippe Besson - Juillard

A la fin de « En l'absence des hommes » (La Feuille Volante n° 609) , Vincent de l’Étoile, meurtri par la mort d'Arthur était parti vers des contrées lointaines, une fuite pour adoucir ce deuil. Ainsi était-il parti, entre Afrique et Amérique, sur terre comme sur mer, avec pour seules boussoles le hasard et la liberté, loin de Paris et de ses 16 ans, de son éducation aristocratique, entre fantasmes et réalités, entre « bateau ivre » et aventures exotiques et même inattendues. En vain ! C'est une autre version de « l'homme aux semelles de vent » chère à Rimbaud, mais voyager, nous le savons, n'est pas guérit son âme. Cette période sabbatique de sept années est symbolique, elle répond sans doute aux sept jours pendant lesquels il avait vécu un amour parfait avec Arthur. A lui qu'il n'a toujours pas oublié, il parle par de-là la mort, évoquant cette semaine d'amour. Ce jeune homme qui aime les garçons mais ne laisse pas les femmes indifférentes a connu des aventures amoureuses fugaces mais sans lendemain. Il a choisi de rester fidèle à un mort !

De Marcel Proust, il n'a eu que des nouvelles partielles, il a su qu'il avait connu la gloire, la consécration littéraire puis ce fut la mort après une courte agonie...Il revient donc chez lui pour apprendre que sa mère lointaine et hautaine l'a fait recherché et que son père est mort de son absence. Ce n’est cependant pas le retour du fils prodigue mais un accueil froid, plein de reproches. Blanche, leur gouvernante et la mère-célibataire d'Arthur s'en est allée et on a perdu sa trace. Madame de l’Étoile a choisi de s'engoncer dans un monde immobile et sans doute d'y attendre la mort et Vincent découvre un Paris qui a changé, qui veut oublier la guerre et qui s’abrutit dans les plaisirs un peu comme si ce XX° siècle tout neuf avait débuté en 1918. Lui reste malgré tout un jeune aristocrate qui remarque « Je suis né trop tard ou pas dans le bon pays » ;

Vincent rencontre Raymond Radiguet, un jeune homme au talent précoce et plein d'avenir qui lui fait connaître Cocteau. Malgré son très jeune âge, il est déjà l'auteur de deux romans au parfum de scandale. Il le suit dans dans une sorte de folle équipée parisienne où le lecteur ne sait pas trop s'il s'y perd ou s'il s'y reconstruit. Dans ce tourbillon il rencontre des peintres, des écrivains...Il se remémore sa relation chaste et platonique avec Proust et en mène une autre avec Raymond qui aurait pu être torride mais ne l'est pas. Si l'auteur d' « A l'ombre des Jeunes filles en fleurs » se penchait sur le passé , Radiguet lui incarne l'avenir. Il est attiré par lui mais, malgré ses vingt ans Raymond meurt brutalement d'une fièvre typhoïde. Au cours de leur brève relation, il avait évoqué une noyade à laquelle il avait échappé de justesse notant avec prémonition «  C' aurait été une mort épatante. Tellement plus originale que le suicide ou la vieillesse ». Il ajoute même «  Et puis sait-on si on aura le temps de tout faire ? Mieux vaut commencer tôt » et Vincent rapproche cette remarque de sa propre existence «  Moi qui me suis contenté de fuir, d'errer sans but précis, moi qui n'ai rien commencé, rien terminé, moi qui ne suis qu'un ballon de carnaval arrimé à la main d'un enfant distrait.»

Ainsi, autour de Vincent, ce n'est que la mort qui rode et le temps qui passe. Lui survit à tout cela, entre questionnement et culpabilité. Il note quand même dans l'ultime phrase de ce roman « Les morts me rendent la vie ». A n'en pas douter Vincent a gagné en maturité et choisit de s'éloigner de la mort.

J'avoue que j'ai eu un peu de mal à entrer dans l'univers de ce roman, seule la fin a retenu mon intérêt. Malgré tout et comme toujours le style de Besson m'a plu.

©Hervé GAUTIER – Décembre 2012.http://hervegautier.e-monsite.com

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