la feuille volante

CADRES NOIRS

 

N°826 – Novembre 2014.

 

CADRES NOIRS Pierre Lemaitre- Calmann-lévy.

 

Dans la série « on vit une époque formidable » et « la situation ne peut que s'améliorer », voici Alain Delambre, 57 ans, cadre au chômage depuis 4 ans. Non seulement se retrouver sans emploi à un âge où on commence à compter ses points de retraite est délicat mais encore devoir accepter des petits boulots subalternes sous l'autorité bornée de « petits chefs » quand on a exercé des responsabilités, c'est carrément déprimant ! Il faut même cacher la réalité à sa famille et ce n'est pas le plus facile. Alors quand arrive une convocation pour un entretient d'embauche on se pince, on cherche l'erreur, on se met à croire au miracle … et on reprend espoir ! Sauf que, nous le savons, les miracles ça ne marche qu'à Lourdes et que la société dans laquelle nous vivons n'a rien d'angélique, c'est un panier de crabes où chacun défend égoïstement ses intérêts, entre démagogie, mensonges, humiliations et manipulations, les paroles y sont comme les promesses électorales, elles n'engagent que ceux qui les croient. Pour le reste il faut bien s'adapter et quand une proposition se présente, il ne faut pas trop hésiter, il faut y croire très fort, ou faire semblant, parce que là le travail est vital et s'il le refuse d'autres sont là pour l'accepter sans états d'âme !

 

Ce qui sert d'examen d'embauche pour Delambre a quelque chose de surréaliste. Le voilà engagé comme assistant RH dans une grande entreprise, chargé de tester des cadres supérieurs dans une situation d'urgence, en réalité une sorte de jeu de rôle, quelque chose comme un « test de Milgram », mais qui va mal tourner. Les apparences sont trompeuses, les choses peuvent s'inverser et déraper et les tests réservent parfois des surprises ! Quant au rôle que joue Delambre dans cette affaire, celui d'un cadre-senior au chômage victime de la crise, cela laisse perplexe et on peut penser qu'il s'y est quand même mal pris.

 

Il y a beaucoup de machiavélisme dans cette histoire, de jeu de pouvoir, de désespoir, de mystification aussi dans ce « monde impitoyable »du travail. Mais dans un roman de Lemaitre, c'est comme avec la pub, « c'est pas fini » et le lecteur n'est pas à l'abri de ses surprises. L'épilogue est étonnant, pas tant que cela cependant, et la morale qu'il nous chuchote illustre un grand classique de la condition humaine.

 

J'ai retrouvé avec plaisir le style enlevé de Lemaitre, avec ce sens de la formule que j'avais déjà aimé dans les romans précédents. J'ai quand même noté des longueurs dans un livre qui pourtant est agréable à lire. Il tient en haleine son lecteur jusqu'à la fin.

 

©Hervé GAUTIER – Novembre 2014 - http://hervegautier.e-monsite.com

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