la feuille volante

Gaston Couté "De la terre aux pavés"

N° 1512 – Novembre 2020

Gaston Couté “De la terre aux pavés” Simonomis – Éditions- Les dossiers d’Aquitaine.

Pierre Mac Orlan qui était également attentif au talent des autres a dit de Gaston Couté (1880-1911)“ Un poète paysan dont le renom grandira tout d’un coup, un jour quelconque dans l’avenir”. Simonomis, pseudonyme palindromique de Jacques Simon, qui fut un poète tourmenté, un humaniste et un révolté a contribué parmi d’autres , qui eux ont accroché des notes à ses vers, à faire sortir le poète beauceron de l’anonymat.

Gaston aurait pu être meunier comme son père, être une sorte de notable et chanter la terre la nature et les gens qui l’entouraient. Il a préféré la vie de bohème et la liberté du poète maudit en “montant” à Paris à l’âge de 18 ans avec quelques textes en poche et pas mal d’ illusions, pour y tenter sa chance, après une tentative vite avortée d’une carrière de bureaucrate, Un vrai “gas qu’a mal tourné”. Notre auteur nous montre un Couté, à travers son bref parcours (il est mort à à peine 31 ans d’une hémoptysie foudroyante)!) et quelques poèmes, poète inspiré de la beauté de la terre (Cantique paîen – Grand’mère Gateau), de la liberté et de l’amour, attentif à sa Beauce et aux modestes paysans qui l’habitent (Va danser) et qui travaillent dur pour vivre (Le foin qui presse), parle de leur dure condition de vie, fustige avec ses mots patoisants ou non(il parlait parfaitement le français )les coqs de village gonflés d’orgueil (Alcide Piedallu- Mossieu Imbu) qui se veulent différents et surtout plus importants.

Arrivé à Paris, et plus exactement à Montrmartre, il change de registre pour celui du chansonnier libertaire, ce qui lui procure un certain succès, grâce notamment à sa rencontre avec Théodiore Botrel et Jehan Rictus; Il prône la révolte contre les institutions bourgeoises, contre l’armée ‘(il a heureusement pour lui été réformé), contre la guerre, contre l’Église qui étouffent les pauvres bougres qui tentent de survivre dans un univers socialement hostile alors que pour d’autres c’est la “belle époque”. Il est un “merle du peuple”, un porte-parole de la peine des hommes, un vrai témoin de son temps. Bizarrement, lui que sa jeunesse a mis à l’abri du besoin, prend le parti des plus pauvres et des laissés pour compte. Il endosse leur condition, leurs espoirs déçus entretenus par la religion et les prêtres (“Le Christ en bois”)fustige l’armée, la justice, la guerre (“Complainte des ramasseux d’morts”). C’est que, même s’il revient de temps en temps chez ses parents, il mène une vie parisienne pauvre et marginale, faite de privations et d’excès. Sa collaboration pendant quelques mois et jusqu’à sa mort avec “La guerre sociale”, un journal antimilitariste à fort tirage, fait de lui un suspect à la police, Ici il ne s’agit plus de poésie bucolique mais de chansons d’actualité dans un registre anarchiste et de soutien aux grévistes destinées à un public populaire.

L’œuvre de Gaston Couté environ 250 Poèmes, n’est cependant pas tout à fait oubliée, elle a été rééditée, chantée, promue et le souvenir de son auteur entretenu.

Simonomis (1940-2005) s’est largement consacré à l’écriture des autres pendant les dix années de parution de sa revue “Le cri d’os”(fondée en 1993) mais aussi notamment par ses études sur Tristan Corbière et Eugène Bizeau. Il fut un poète révolté, pas vraiment “politiquement correct”, hors de la norme, dénonçant avec humour et dérision la bêtise humaine. Il fut également le chantre de l’amour, mais aussi de la douleur, de la révolte, de l’émotion, du réel, des plaies du quotidien. Autodidacte à la grande culture, écrivain injustement oublié et pas vraiment consacré de son vivant, il a réellement marché sur les traces de Couté et de Corbière tout en étant lui-même, un témoin de la détresse humaine, un magicien du verbe.

Je signale qu’un numéro spécial de cette revue est paru en 2015 en hommage à son fondateur pour les dix ans de sa disparition, à l’initiative de Christophe Dauphin. De même, il serait souhaitable qu’une étude rende compte de la vie et de l’œuvre de Simonomis.

 
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