la feuille volante

Des vies d'oiseaux

 

N°553 – Février 2012

 

DES VIES D'OISEAUX– Véronique Ovaldé- Editions de l'Olivier.

 

Cela commence comme une sorte de roman policier. Des intrus se sont introduits dans la villa cossue de Gustavo et Vida Izarra, en leur absence, sur la colline du quartier résidentiel de Villanueva (on l'appelle la colline Dollars), face à la mer. C'est, à tout le moins, ce qu'indique la maîtresse de maison au lieutenant de police Taïbo. Pourtant, même si elle insiste pour qu'une enquête soit ouverte, elle prend soin de lui préciser que rien n'a été dérobé et qu'il n'y a même pas eu d'effraction. Tout au plus s'est-on contenté, comme dans l'histoire de « Boucles d'or »... d'essayer tous les lits des nombreuses chambres ! Cela ne peut donc être le fait que des « jeunes », pense Mme Izarra, parce qu'elle ne voit pas des vieux agir ainsi. Cet officier de police mènera donc son enquête avec patience et même douceur...

 

Cela intrigue de policier puisque des faits similaires se sont produits dans cette petite ville du bord de mer de ce pays (plus ou moins imaginaire) d'Amérique du sud. Il a même été constaté que le bijoutier du quartier a subi nuitamment, une sorte de cambriolage, mais, rien lui a été volé. On s'est seulement contenté de « déplacer » les objets à l'intérieur du magasin, un peu comme pour brouiller les pistes. L'examen des bandes de la caméra de surveillance donne à penser que Paloma Izarra, la fille de Vida, aurait pu être mêlée à cette affaire...Mais Vida à indiqué au policier qu'elle n'avait pas d'enfant ! L'enquête s'annonce donc difficile et Taïbo va décortiquer la vie de Vida jusqu'à l'accompagner dans la ville de son enfance.

 

Au fur et à mesure du récit, le lecteur apprend à connaître les différents membres de cette famille. Vida est apparemment une épouse rangée, établie dans une société bien pensante, dévouée à son mari et vivant dans une sorte de bulle familiale. Pourtant, elle n' hésitera pas à le tromper, pour rompre avec le quotidien ou par attirance de l'inconnu. Elle qui vient pourtant d'un milieu défavorisé ira même jusqu'à quitter son mari, c'est à dire la sécurité d'une vie oisive et sans surprise, peut-être à la suite de cette enquête qui est pour elle l'occasion de revisiter son passé. Gustavo, le mari, est l'archétype de celui qui a réussi socialement et qui attache de l'importance à tout ce qui matérialise cette réussite. Il est plus attentif à sa carrière, à son chiffre d'affaires qu'à sa famille. Paloma, la fille (parce que, malgré ce qu'a dit Vida à la police, elle a une fille) mène la vie d'une enfant de riche, s'y ennuie et rêve de celui qui l'en fera sortir. Elle le trouve un peu par hasard, en la personne d'Alfonso, jardinier de son état, bellâtre flambeur et magouilleur qui l'enlève, ou plus exactement c'est elle qui le suit avec cette volonté affichée d'échapper à son milieu. Comme le couple manque d'argent, Alphonso a l'idée de s'installer dans les différentes villas, dont, évidemment, celle de ses parents en l'absence de ces derniers. Ils les habitent successivement, se contentant simplement de profiter des différentes facilités ainsi offertes et ...d'en visiter la cave ! Ils mènent ainsi une vie de squatters ou « d'infatigables coucous » comme le dit l'auteur. Ce qui interpelle le plus Vida ce n'est pas que sa fille soit partie de la cellule familiale où elle étouffait, mais bien davantage qu'elle prenne du plaisir à se glisser ainsi dans la peau des autres. Pourtant, elle part à sa recherche, mue sans doute par une manière de culpabilité puisqu'elle prend conscience que c'est à cause d'elle que sa fille est partie.

C'est que l'errance semble convenir à Paloma, à condition toutefois que cette oisiveté se conjugue avec une certaine opulence et surtout que les résidences qui s'offrent ainsi à eux n'aient rien de définitif. Alfonso, quant à lui, travaille ou fait semblant. Pour elle comme pour lui, cette vie tranche tellement avec celle d'avant qu'ils ont quittée chacun à leur manière qu'on se demande quand et comment cette escapade finira. Autour d'eux et sans qu'ils en sachent rien, des couples se font et se défont, l'existence de chacun croise celle de l'autre en toute liberté, la vie reprend ses droits . Elle se décline comme celle des oiseaux, légères et insouciante.

 

Lors d'un première approche de l'œuvre de Véronique Ovaldé, j'avais exprimé une impression mitigée (La Feuille Volante n° 394 à propos de « ce que je sais de Véra Candida »). Je vais sans doute m'inscrire en faux par rapport à tous les avis laudatifs qui ont accueilli la sortie de ce roman. J'en ai achevé la lecture davantage pour en connaître l'épilogue que par réelle passion pour ce texte. Je note néanmoins un style agréable à lire et des phrases fort bien écrites et poétiques. La composition en forme de puzzle est inattendue, mais ... je suis resté sur ma faim

 

 

 

© Hervé GAUTIER - Février 2012.

http://hervegautier.e-monsite.com 

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