Ah! ça ira
- Par hervegautier
- Le 02/11/2017
- Dans Denis LACHAUD
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La Feuille Volante n° 1182
Ah ! Ça ira – Denis Lachaud - Babel
Le Président de la République française vient d'être enlevé et assassiné par un groupe révolutionnaire dont les pseudonymes, Saint-Just, Robespierre et Marat font référence à la fois aux aux idées généreuses de la Révolution mais aussi à une forme de terreur qui leur a fait perdre la sympathie du peuple. Un an plus tard, Antoine Léon, jeune père de famille, citoyen ordinaire, alias Saint-Just, du groupe Vendôme qui est responsable de cet assassinat , a été arrêté, jugé et emprisonné à perpétuité. Il y restera vingt ans et à sa sortie, Rosa, sa fille, devenue professeur des écoles l'attend. Elle vit avec Rufus mais pour Antoine, une nouvelle vie commence.
Le titre de ce roman rappelle un chant révolutionnaire de 1789 quand la France s'enflammait et le vieux monde s'effondrait. Ce roman est certes une fiction mais m'a paru en phase avec l'actualité, même si ce roman se situe en 2037. Il évoque la fragilité de la démocratie, ses possibles manipulations par ceux qui sont au pouvoir et qui abusent largement du mandat qui leur a été donné de gouverner au nom du peuple et dans son intérêt, de la corruption qui règne au sein des gouvernants, du concept révolutionnaire qui prétend faire évoluer les choses vers davantage de liberté, de progrès social, alors qu'on ne fait que remplacer les gens qui se rendront coupables des mêmes méfaits que ceux qu'ils chassent, dans un contexte d'insécurité créé dans un but de favoriser l’émergence de leurs propres idées et surtout de leur propre destin. Il est toujours facile de proclamer la volonté de rendre le pouvoir au peuple alors qu'en réalité c'est son propre ego qu'on flatte et sa propre carrière politique qu'on privilégie. Autant dire que, derrière cette fiction pas très rassurante, qui évoque toutes les révolutions qui ont secoué la France, internet, les réseaux sociaux et les progrès de l'informatique en plus, il nous parle de ce que nous avons sous nos yeux tous les jours et de ce dont nous faisons nous-mêmes partie : l'espèce humaine.
J'ai eu un peu de peine à lire ce roman à cause des longueurs mais j'ai quand même apprécié ce livre qui met en scène la violence qui fait de plus en plus partie de nos sociétés et qui a d’ailleurs toujours existé au quotidien comme une sorte d'obligation, même s'il est un fait que c'est souvent la seule réponse aux abus perpétrés par ceux qui s'installent confortablement au pouvoir et ne veulent pas en démordre, refusent la réforme qui est le point de passage obligé de toute société et méprisent voire répriment les manifestations de la rue qui sont l'expression de la contestation. Aujourd'hui il y a d'autres réponses plus pacifiques et démocratiques, mais la violence n'est jamais très loin, est toujours très tentante. La parole donnée au peuple, et respectée par ceux qui sont en charge de gouverner, reste une voie qui devrait être une règle immuable, mais l'histoire nous enseigne qu'elle est bien souvent transgressée. Nous avons tous, un jour ou l'autre voulu faire changé les choses, voulu imprimer notre marque au monde dans lequel nous vivons. Nous y avons cru comme Antoine mais bien peu, heureusement, ont choisi la violence et la mort pour atteindre ce but, bien peu aussi y sont parvenus. Rosa aura à son tour son action, mais différente de celle de son père. Après vingt ans d'emprisonnement, Antoine revient dans le monde mais rien n'a vraiment changé, les inégalités sont toujours là, souvent plus grandes qu'avant,, avec l'exploitation des uns par les autres, entretenues par le monde politique lui-même, surtout s'il a été porté au pouvoir démocratiquement, et ce malgré toutes les promesses électorales généreusement faites. Un ancien président de la République a même cru bon de rappeler qu'elles n'engagent que ceux qui les croient, ce qui est une manière de se moquer ouvertement de la démocratie mais aussi de fomenter les révoltes populaires.
Un roman aux allures de science fiction mais néanmoins crédible, peut-être pas si utopique que cela.
© Hervé GAUTIER – Novembre 2017. [http://hervegautier.e-monsite.com]
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