L'uomo nero et la bicicletta blu
- Par hervegautier
- Le 05/05/2016
- Dans Eraldo Baldini
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La Feuille Volante n°1039– Mai 2016
L'OUMO NERO E LA BICICLETTA BLU – Eraldo Baldini – Einaudi.
Nous sommes en Août 2010 dans la plaine du Pô et il fait chaud. Gigi, le narrateur se souvient de cet été de 1963 quand il avait dix ans. A cette époque, le pays était pauvre et le temps semblait s’être arrêté dans ce petit village de Romagne, Bagnago. Pour lui c'est encore l'enfance, l'insouciance, heureuse, l'école mais surtout les jeux dans la campagne, les parties de pêche avec les copains, les menus larcins... Mais c'était aussi cette bicyclette bleue avec des garnitures chromées dont le garçon rêve parce qu'il l'a vue en vitrine mais dont il sait aussi que ses parents ne peuvent la lui offrir. Aussi inventera-t-il des petits boulots et surtout pas mal d'astuces pour réunir les vingt mille lires nécessaires pour cet achat ; une occasion aussi pour le lecteur de découvrir traditions et coutumes de ce microcosme rural.
Ce roman se caractérise par le nombre de ses personnages, il Morto, un homme qui est considéré comme mort à la suite d'une inondation alors qu'il est bien vivant mais que sa femme persiste à ne pas le reconnaître, La Tugnina, une vieille femme jamais à cours de fables, surtout celles qui parlent de « l'homme noir » (L'uomo nero)qui mange tout le monde, transformant le « happy end » traditionnel de ses contes merveilleux en chute fatale ... et Gigi y croit. C'est un peu cet homme noir qui est le symbole de cette enfance qui s'en va, le passage au monde réel… Le Capitaine au mystérieux passé incarne pour le garçon cet « homme noir » et le halo d’interdits et de tabous qui l'entoure prend pour Gigi une dimension magique. Sa famille est aussi originale : Le père est éleveur de bétail, fier de son honnêteté mais sans un sou en poche et qui surtout est amoureux fou de Maryline Monroe, le grand-père est invalide de guerre, toujours le fusil à la main, la mère fait des miracles pour nourrir cette famille pauvre et Enrico, le frère est un garçon fourbe, odieux et opportuniste...
Puis, un beau jour arrive de la ville Allegra, une enfant de la classe bourgeoise dont la beauté va révolutionner tout le village et à laquelle Gigi ne sera pas insensible. Pour lui elle est différente des autres filles du pays et ils partagent ensemble une amitié quasi fraternelle. Le Père de Gigi devient chômeur, son grand-père sent la vieillesse et la mort arriver, sa mère fait ce qu'elle peut pour maintenir l'unité de sa famille. Pour s'offrir sa bicyclette, Gigi est contraint de travailler et cela aussi précipite son passage dans l’âge adulte, adouci peut-être par le visage d'Allegra. Nous sommes en 1963 et le monde est bouleversé. Cela va affecter aussi ce petit coin de Romagne et ce garçon va ainsi d'un seul coup sortir du monde idyllique de l'enfance pour entrer dans un autre qui l’est beaucoup moins, fait de déceptions, de remords, de deuils. C'est sans doute et peu ou prou l'itinéraire de chacun d'entre nous. C'est un roman écrit simplement, à travers des anecdotes parfois savoureuses et avec un humour qui, à la fin fait place à une réelle émotion et une authentique nostalgie. J'ai lu ce roman dans le texte et parfois à voix haute pour la beauté et la musicalité de la langue italienne.
Eraldo Baldini, est un écrivain italien, à ma connaissance non encore traduit en français.
© Hervé GAUTIER – Mai 2016. [http://hervegautier.e-monsite.com ]
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