LES INNOCENTS
- Par hervegautier
- Le 27/01/2015
- Dans Georges SIMENON
- 0 commentaire
N°388– Janvier 2010.
LES INNOCENTS – Simenon (1971).
C'est une histoire simple que nous offre ici Simenon.
Georges Celerin a un bon métier, il est orfèvre à Paris et sa notoriété est grande. Il est associé avec un de ses amis, Jean Paul Brassier, marié avec Eveline, frivole et superficielle... L'affaire marche bien et avec les ouvriers de l'atelier l'ambiance est conviviale.
Georges a rencontré par hasard Annette, une assistante sociale assez réservée et pas vraiment belle et l'a épousée. Ensemble ils ont eu deux enfants, Jean-Jacques et Marlène, forcément différents. Georges est béatement et égoïstement heureux, les enfants grandissent sans que leurs parents s'en aperçoivent, le temps passe et les affaires sont florissantes. Malgré une certaine aisance financière, Annette qui vit son métier comme un sacerdoce, a tenu à garder son emploi, mais leur vie conjugale semble terne et un peu en marge. En fait chacun à son centre d'intérêt et s'en accommode. Après tout, cela peut paraître banal!
La vie aurait pu continuer à s'écouler, simple et tranquille, sans souci important, avec des projets en commun, le départ des enfants, mais là aussi, c'est le sens de la vie! Pourtant, par hasard, la mort frappe Annette, écrasée par un camion dans une rue de Paris. Tout bascule d'un coup pour ceux qui restent. Georges reste seul avec Nathalie, la domestique de toujours qui fait maintenant partie de la famille. Il est tenté de se laisser aller, pense au suicide, à l'alcool, mais pourtant l'avenir se dessine autrement et d'une manière favorable pour lui et son associé... Il faut bien que la vie reprenne et ses enfants ont encore besoin de lui!
Il se met à penser qu'il a vécu vingt ans à côté de sa femme sans peut-être avoir pu la rendre heureuse. Son emploi d'assistante sociale n'était peut-être qu'une échappatoire? Cette prise de conscience soudaine lui donne à penser que tous les deux, malgré leur bonne volonté et à cause de leur métier, sont peut-être passés à côté de leurs propres enfants qu'ils n'ont pas pris le temps de voir grandir! Maintenant ils vont quitter la maison et le vide laissé par Annette va s'accentuer encore par leur départ à eux...
Le hasard veut que Georges s'intéresse aux circonstances du décès de son épouse. Elle a été accidentée dans un quartier qui n'était pas le sien, dans un secteur où, d'ordinaire, elle n'exerçait pas ses fonctions et les témoins pensent qu'elle a délibérément cherché la mort, qu'elle sortait d'une maison inconnue... Il en conçoit des doutes et, vérifications faites, il obtient la preuve que que son épouse le trompe avec son associé, et ce depuis dix huit ans. Ce n'est pas une simple passade, mais une liaison durable faite de mensonges, d'hypocrisies et il doit bien admettre qu'il n'a rien vu, rien deviné de la trahison d'Annette, occupé à sa seule réussite, son seul bonheur, même si celui-ci était peut-être un peu convenu! Même Nathalie, dont la situation n'a pas échappé à son regard de femme, n'a rien osé dire. Comment l'aurait-elle pu?
Découvrir que son épouse l'a trompé pendant si longtemps, s'est moquée de lui, de sa famille, de ses enfants avec un de ses amis est inacceptable, d'autant que celui-ci, sans enfant dans son ménage, peut parfaitement être le père de Jean-Jacques et de Marlène. Cette révélation posthume, si elle peut faire naître dans l'esprit de Georges une culpabilité éventuelle, n'en établit pas moins une certitude « Annette est morte deux fois !».
Face à cela, Georges se coupe du monde, laisse les choses aller à vau-l'eau pour finalement se séparer de cette associé volage qui lui part de son côté.
Au-delà de l'histoire racontée, c'est un rappel que nous sommes mortels, que la Camarde peut frapper au hasard quand nous nous y attendons le moins, que « rien n'est jamais acquis à l'homme », que le bonheur est fragile, que la confiance est un leurre, qu'on est toujours seul...
©Hervé GAUTIER – Janvier 2010.http://hervegautier.e-monsite.com
Ajouter un commentaire