La Rochelle 1939-1945
- Par hervegautier
- Le 14/06/2015
- Dans Histoire
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N°922– Juin 2015
La Rochelle 1939-1945 - Musée des Beaux-Arts de La Rochelle – Geste Éditions.
Sous la direction d'Annick Notter, conservatrice en chef et Nicole Proux, historienne.
A l'occasion du soixante-dixième anniversaire de la Libération de la ville, le musée des Beaux-arts de La Rochelle publie cet ouvrage richement illustré et documenté qui accompagne une exposition organisée dans ses locaux du 7 mai au 9 novembre 2015. Il s'agit d'un ouvrage collectif qui retrace ces six années de guerre et d'occupation.
Après l'armistice du 22 juin 1940, La Rochelle qui est une ville commerçante et industrielle active se retrouve en « zone occupée » puis en « zone interdite », est déclarée « ville ouverte ». Les Rochelais vécurent ces six années de tourmente dans la réserve, l'attentisme et la survie malgré les privations, l'afflux des réfugiés, les évacuations et les pénuries de tous ordres. Ceci n’exclut ni les actes de collaboration et de délation ni ceux de résistance et de sabotage. L'ouvrage rend hommage à celles et ceux qui se sont engagés dans ces actions d'opposition à l'occupant, qui ont donné leur vie pour que la ville soit à nouveau libre. Le maire Léonce Vieljeux (1865-1944) en fut la figure emblématique. Nombre de voies urbaines et portuaires rochelaises portent leur nom ce qui contribue à perpétuer leur mémoire.
La répression allemande et vichyssoise n'a épargné, ici comme ailleurs ni les juifs, ni les communistes ni les francs-maçons. La Garde Civique et plus tard la Milice, soutenues par des organisations pétainistes, furent de zélés collaborateurs des autorités allemandes. Les communistes qui entrèrent en résistance notamment après la rupture du pacte germano-soviétique (1941), furent particulièrement pourchassés par l’occupant. Les FTP, qui ont payé un lourd tribu, se montrèrent particulièrement agressifs mais le PCF, eu égard à son organisation interne, et malgré les coups portés par l'occupant, a été particulièrement efficace dans cette lutte. Dans la ville, la Résistance s’organisa dans la clandestinité, parfois sous couvert d’associations sportives mais pas seulement, vers l'action, le renseignement, le sabotage ou la propagande anti-nazie ce qui déclencha une vague d'arrestations et de répression de la part des Allemands. Ici comme ailleurs, dénonciations, déportations, tortures, exécutions sommaires furent l'ordinaire de la barbarie nazie... Comme partout, le maquis a connu un regain de recrutement à partir du début de l'année 1942 et de l'instauration du STO par le régime de Vichy, même si, à partir de cette période, les réseaux de résistance rochelais ont été décimés.
La pêche rochelaise a été lourdement handicapée non seulement par les mesures restrictives imposées à la profession(restrictions de carburant, prélèvements sur les prises) mais aussi par les mines et la destruction de bateaux par la marine allemande et la réquisition de chalutiers transformés en garde-côtes ou en navires de guerre auxiliaires. L'importance stratégique de La Pallice, port en eaux profondes et élément important du Mur de l'Atlantique, incite les Allemands à y implanter des infrastructures militaires(base sous-marine, construction de batteries côtières, mines...) qui seront la cible des bombardements alliés, épargnant cependant miraculeusement la vieille ville. En effet, même si la France n'était plus officiellement en guerre la position géographique de La Rochelle la désignait naturellement comme un objectif militaire.
La Rochelle doit être attractive puisque, avec celui de l'Aunis, elle subit là le septième siège de son histoire mais ce sont des Allemands qui sont retranchés dans la ville rebaptisée « poche »(septembre 1944-mai 1945). Cette ville doit bien être « bénie des dieux » comme a pu le dire plus tard un édile, puisque, malgré sa situation maritime et économique, elle a été épargnée alors que d'autres, dans la même configuration, ont été rasées et ce d'autant plus que sa position de « poche » allemande à la fin d'un conflit dont il n'était pas possible de douter de l'issue, l'exposait à des barouds d'honneur, des règlements de compte et autres débordements qui eussent pu l'endommager durablement. Les troupes allemandes cantonnées à La Rochelle étaient importantes tandis que les résistants (FFI), pourtant peu armés et mal équipés étaient cependant déterminés et combattifs. D'ailleurs, à la fin de la guerre, les Allemands avaient programmé la destruction de la ville mais en aucune façon une reddition et le général de Gaulle lui-même prévoyait qu'une action armée accompagnât la libération de la ville. Il a fallu toute l'humanité et toute la diplomatie du capitaine de Vaisseau Hubert Meyer, du vice-Amiral Ernst Shirlitz et du concours de la Suède pour négocier une trêve, assurer le ravitaillement des Rochelais demeurés dans la ville pour éviter les bombardements alliés comme à Royan, et surtout que cet épisode ne se transforme pas en un bain de sang avec d'inévitables destructions. Par ailleurs, à cette période les Rochelais ont fait preuve de solidarité et de compréhension : la ville était sous administration vichyssoise et allemande mais encerclée par les FFI sur un territoire divisé en zones d'influence, à un moment où la victoire des alliés était en marche. Ce siège, réglementé par une convention pourtant controversée et quasiment secrète, dura six mois relativement paisibles alors que le reste de l'Europe était un vaste champ de bataille. Même si les Allemands étaient craints, ils n'en étaient pas moins considérés, eux aussi, comme des prisonniers. Cette situation un peu surréaliste a donné lieu à des manifestations cocasses où la paix a cependant été privilégiée et sauvegardée. Ainsi, il n'était pas rare que, dans un même lieu, des Miliciens, des Allemands et des Résistants en armes cohabitent sans qu'un seul coup de feu ne soit tiré, le but de chacun étant de gagner du temps. Le 8 mai 1945 la ville fut libérée par des troupes françaises (zouaves et spahis) épaulées par les FFI, sous les yeux d'un occupant, apparemment soulagé, les soldats allemands désarmés étant considérés comme prisonniers de guerre dans des conditions honorables. Ce fut la dernière ville à être libérées(8 mai 1945) sur le territoire.
J'ai découvert ce livre passionnant grâce à Babelio et à Geste Éditions que je remercie chaleureusement. Il m'a permis, à titre personnel, de compléter ma connaissance de l'histoire de cette cité qui m'est chère à plus d'un titre. En effet, quelque soit l'endroit où j'habite temporairement, je me revendique définitivement comme Rochelais.
La ville de La Rochelle a encore une fois mérité son surnom de « belle et rebelle ». Elle a connu au cours de son histoire bien des bouleversements. Cet ouvrage a pour but de ne pas oublier cette période pourtant pas si lointaine et surtout ceux qui se sont sacrifiés et envers qui les générations suivantes ont une dette imprescriptible. Il met en exergue l’héroïsme des Rochelais autant que leur vie quotidienne et les heures sombres qu'ils ont vécu à travers des textes, des photographies et documents d'époque.
©Hervé GAUTIER – Juin 2015 - http://hervegautier.e-monsite.com
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