Créer un site internet
la feuille volante

LE FANTOME DE LA RUE ROYALE – Jean-François PAROT

 

N°537 – Août 2011.

LE FANTOME DE LA RUE ROYALE – Jean-François PAROT – JC Lattès.

Les enquêtes de Nicolas Le Floch, commissaire au Châtelet.

 

Paris, le 30 mai 1770, c'est le mariage du dauphin et Louis XV veut que la fête se termine par un feu d'artifice sur la place qui porte son nom. Malheureusement les explosions provoquent un incendie et la panique s'empare de la foule venue en masse assister à ce spectacle. On relèvera des centaines de morts et de blessés. Nicolas Le Floch, marquis de Ranreuil, commissaire de police au Châtelet obtient de Sartine, grand amateur de perruques et actuel Lieutenant général de la police, le droit d'enquêter sur cette affaire où des erreurs ont été commises en matière de maintient de l'ordre, d'autant plus que cette responsabilité incombait à la compagnie des gardes de Paris. Durant son enquête, notre commissaire découvre le cadavre d'une jeune femme d'une vingtaine d'années tenant fermement dans sa main une perle noire. De plus, l'examen post mortem révèle qu'elle n'a pas été écrasée comme les autres victimes mais étranglée ! A l'évidence on a mêlé sa dépouille à celles des autres cadavres pour masquer ce qui est en réalité un assassinat. Tel est le point de départ de cette passionnante enquête policière menée dans ce Paris du siècle des Lumières où le lecteur aime à se perdre et à se retrouver. Il y rencontre les gardes de la ville aux nouveaux uniformes chamarrés qui montrent plus que de l'opposition à la police officielle, Sartine contre qui des libelles circulent dans la cité, tout un peuple de « mouches » et de domestiques, le fidèle adjoint Pierre Bourdeau, Sanson, le bourreau qui fait aussi office de légiste et Guillaume Semacgus, chirurgien de marine qui assistent le commissaire... Le lecteur y croise le quotidien des gens du peuple, des cabarets et des maisons de plaisirs mais aussi les intrigues de Cour...

 

Les investigations du marquis vont le mener rue Royale, chez Charles Galaine, un maître pelletier chez qui vivait cette jeune femme, sa nièce, Élodie. Il loge chez lui, sur ordre du roi qui l'apprécie et à qui il fera personnellement ses rapports. Cette résidence forcée va l'amener à découvrir tout un décor où l'hypocrisie le dispute aux réalités les plus sordides. Témoins ce Naganda, personnage ambigu, indien Micmac au visage tatoué, fils de chef d'une tribu alliée à la France en terre d'Amérique, ancien élève des jésuites qui use d'un langage châtié et cite Saint-Jean en latin et Racine en français. Lui aussi loge chez Galaine, mais dans une soupente. Son personnages et ce qui lui arrive sont de nature à jeter sur lui les doutes les plus fondés. Il deviendra plus tard un espion du roi dans les territoires d'Amérique tenus par les Anglais, mais pour l'heure il fait partie des suspects. Notre commissaire va découvrir bien pire, une servante qui cache sa future maternité et qui, de lévitations en révélations [en état de transe elle parle allemand et latin avec la voix des morts et révèle à Le Floch des détails sur sa vie qui ne sont connus que de lui seul] donnera toutes les marques d'une possession du démon, au point que l'archevêque de Paris soi-même va dépêcher un exorciste auprès d'elle. Semacgus qui ne croit ni aux fantômes ni au diable, rappelle le marquis à plus de rationalité et préfère à tout cela la manifestation de l'hystérie. Une telle procédure qui évoque le Moyen-Age n'a pas sa place au siècle de Voltaire et des encyclopédiste, mais pour Le Floch qui a reçu une éducation de qualité chez les bons pères, il en va aussi de l'ordre public dont il est le garant. Quant à Élodie, elle n'était pas exactement la jeune fille rangée qu'il avait imaginé, des personnages sont escamotés, d'autres disparaissent pour réapparaitre, un attentat est perpétré par les gardes de la ville contre un ancien procureur mais visait en réalité notre commissaire, un monstre au visage blanc est évoqué, un reçu est découvert dans la maison de Galaine et qui date du jour du drame, un testament caché et retrouvé par hasard par une enfant qui en sait probablement plus qu'elle ne veut en dire. Comme si tout cela ne suffisait pas il y a un infanticide, une faillite annoncée, des dettes de jeu et des vêtements mis en gage, des chantages, des amours contrariées, un procès un peu long où notre commissaire prend des accents de procureur... Mais la vérité finit par éclater ...

 

Jean-François Parot dessine peu à peu pour le lecteur la personnalité et l'histoire parfois intime de son héros mais aussi se livre avec bonheur à des descriptions évocatrices [ Je retiens particulièrement l'épisode de l'exorcisme et aussi le portait de l'archevêque de Paris dont les états d'âmes transparaissent sous les mots]. J'aime bien le texte de ce récit, l'érudition de son auteur, les notes qui suivent les chapitres...

 

Je continue avec bonheur et passion à découvrir l'œuvre de cet auteur qui sert si bien notre belle langue française, replonge son lecteur dans le contexte de ce siècle des Lumières, le dépayse agréablement et distille un suspense de bon aloi jusqu'à la fin. C'est à chaque fois un bon moment de lecture.

 

 

 

 

©Hervé GAUTIER – Août 2011.http://hervegautier.e-monsite.com

 

  • Aucune note. Soyez le premier à attribuer une note !

Ajouter un commentaire

 
×