LA PATIENCE DU FRANC-TIREUR
- Par hervegautier
- Le 04/08/2015
- Dans Arturo PEREZ-REVERTE
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N°948– Août 2015
LA PATIENCE DU FRANC-TIREUR – Arturo Perez-Reverte – Le Seuil.
Le titre donne à penser bien autre chose que ce dont il va être question surtout de la part de Reverte qui, avant d'être un auteur à succès a été correspondant de guerre. Avec ce polar, l'auteur nous fait pénétrer dans le monde des tagueurs et plus exactement de l'un d'eux nommé Sniper, star mondial du graff, à cause de sa signature qui ressemble à un cercle de visée. C'est un personnage mystérieux, invisible mais dont les œuvres, parce qu'elles sont peintes dans des endroits inattendus, véhiculent un discours anti consumériste et provocateur par l’intermédiaire d'internet. Lui-même œuvre souvent à la limite de la légalité. Cela fait de lui l'ennemi des municipalités et de leurs agents de nettoyage et bien entendu l'idole des tagueurs. De plus il lance des défis aux autres qui parfois prennent des risques insensés et y laissent leur vie. Il n'en fallait pas davantage pour qu'un éditeur s'intéresse à son cas et charge, Alejandra Varela, une spécialiste des graffiti, de le retrouver pour lui proposer une édition de luxe et une exposition au Moma. Cela ne se fera pas facilement, bien entendu puisqu'un contrat a été mis sur la tête de Sniper. Le fils d'un millionnaire a en effet perdu la vie en relevant un de ses défis et son père entend avoir sa peau… Mais Sniper est insaisissable !Tel est l'intrigue de de roman
L'auteur mène son intrigue comme il fait toujours, avec brio, en invitant son lecteur au dépaysement, le faisant voyager dans toute l'Europe et surtout en Italie, en n'oubliant pas la personnalité de l’enquêtrice, Alejandra, surnommée Lex, qui est aussi la narratrice, lesbienne, bagarreuse, historienne de l'art urbain dont elle a fait le sujet de sa thèse. L'auteur renoue à cette occasion dans l'évocation de femmes d'exception comme c'est souvent le cas dans ses différents romans
Je n'y connais pas grand-chose à l'art du tag mais je veux bien admettre qu'il constitue une expression artistique propre à notre temps, après tout, s'il ne choisit pas n'importe quel support, il met ce courant à la vue de tous puisqu'il s'agit d'un art de la rue que chacun peut juger. On n'est pas obligé d'aller dans un musée et l'art n'est plus dès lors réservé à une élite qui peut se l'offrir. Cela dit, on peut s’interroger sur la fonction de l'art. Si la peinture est celui de la représentation du réel, au cours de l'histoire, peindre a le plus souvent été la manifestation d'une certaine réaction contre ce qui était considéré comme classique. Ceux qui choisissaient d'enfreindre ce courant, c'est à dire de faire évoluer les choses dans un sens plus moderne, qui cherchaient à imposer leur vues, à laisser une trace personnelle et nouvelle, étaient invariablement rejetés par une société conservatrice. Ce n'est que bien plus tard, souvent après leur mort, qu'éventuellement ils étaient admis parmi les artistes reconnus qu'on caractérisait d'un nom, d'une école, d'un style. Ces mouvements s'inscrivaient en réaction contre ce qui était admis mais connaissaient des destins parfois étonnants. Ce mode d'expression qu'est le graff caractérise notre temps qui est celui de le contestation permanente voire de la rébellion. De là à le considérer comme l'expression de cette révolte, il n'y a qu'un pas que je veux personnellement bien franchir. Le fait que le support choisi soit les murs des villes, le plus souvent gris, serait plutôt bien, à condition bien sûr que cela ne soit pas sauvage.
J'en ai bien entendu appris beaucoup, autant sur le milieu des tagueurs que sur leur technique. Quant à l'intrigue de ce roman à la fois violent et plein de suspens, je l'ai trouvée assez quelconque. Je n'ai pas vraiment retrouvé le souffle du « Maître d'escrime » par exemple.
Hervé GAUTIER – Août 2015 - http://hervegautier.e-monsite.com
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