LE TABLEAU DU MAITRE FLAMAND – Arturo PEREZ-REVERTE.
- Par hervegautier
- Le 19/01/2010
- Dans Arturo PEREZ-REVERTE
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N°390– Janvier 2010.
LE TABLEAU DU MAITRE FLAMAND – Arturo PEREZ-REVERTE.
Julia est restauratrice de tableaux à Madrid. Elle s'occupe d'une œuvre de Van Huys, peintre flamand du XV° siècle qui représente deux nobles qui jouent aux échecs et, en arrière-plan, une femme en deuil qui lit et semble les observer. Il pourrait s'agir d'une scène banale mais le travail de restauration, accompagné d'une recherche radiographique approfondie, révèle sous la peinture une inscription en latin « qui a pris le cavalier? » qui l'intrigue quelque peu. Une étude plus poussée révèle que le peintre a exécuté ce tableau trois années après la mort quelque peu étrange d'un des joueurs et l'inscription cachée pourrait tout aussi bien se traduire par « qui a tué le chevalier? », c'est à dire l'un des deux aristocrates représentés sur le tableau. C'est qu'il met en scène deux personnages historiques avec, en arrière-plan une femme qui aurait bien pu jouer un rôle déterminant dans le disparition de celui qui a été tué. Cette composition énigmatique est bien dans la style de l'époque et est d'ailleurs partagée par d'autres artistes.
Voici posée une énigme, voulue sans doute par le peintre et qui va se compliquer par la vente prochaine du valeureux tableau, l'attribution de commissions juteuses, de tractations tordues en marge de la légalité et l'intervention de personnages mystérieux et parfois sans aucun scrupule. Une véritable partie d'échec là aussi! Deux protagonistes de cette histoire seront même assassinés dans des circonstances troublantes, ce qui ajoutera au mystère qui entoure cette œuvre et ne manquera pas de réunir le passé au présent qui lui aussi comporte des interrogations qui ne sont pas sans rappeler l'œuvre de Van Huys!
L'ambiance un peu noire est entretenue tout au long de ce roman par l'analyse des situations, les couleurs du tableau mais surtout par l'échiquier lui-même, représenté sur la toile avec certaines pièces du jeu dont le déplacement pourrait bien révéler une partie du mystère! La symbolique des pièces, les arcanes du jeu, la stratégie et la technique des échecs, l'éventualité d'un autre joueur qui viendrait déplacer les pions, l'existence d'une main anonyme qui distribuerait messages et indices, brouillant ainsi les pistes, l'intervention de la police, la présence de miroirs, l'opposition des carrés noirs et blancs laissant supposer un certain manichéisme, les supputations logiques et parfois déconcertantes faites autours de cette partie laissée en suspens depuis cinq siècles et qui semble vouloir livrer son secret à qui voudra bien s'y intéresser! C'est que ce tableau, sous des apparences ordinaires, invite le spectateur à prendre d'hypothétiques chemins qui semblent l'égarer à l'envi, d'autant plus que cette œuvre finit par être volée et donc par disparaître.
Le jeu d'échecs peut-être un passe-temps, une simple parabole, un miroir qui cache la réalité...
Comme toujours Arturo Peres-Reverte renoue avec le type de roman à énigme où se mêlent suspense savamment distillé, délit et blanchiment d'argent, comme toujours une grande érudition, nombre de mises en abymes et sens de la formule toujours aussi affirmé.[« Je voulais parler de la vie, de ces soixante-quatre cases de noires nuits et de blanches journées dont parlais le poète... Ou peut-être le contraire: de nuits blanches et de jours obscurs. Tout dépend de quel côté du joueur nous voulons placer l'image... De quel côté, pour parler en parabole, nous plaçons le miroir. ». « La vie est une espèce de restaurant coûteux où l'on finit toujours par vous remettre l'addition, sans qu'il faille pour autant renier ce qu'on a savouré avec bonheur ou plaisir. »].
L'auteur tient en haleine son lecteur passionné jusqu'à la fin. C'est extraordinaire!
Je ne regrette pas d'avoir, par hasard, fait la connaissance de cet auteur.
©Hervé GAUTIER – Janvier 2010.http://hervegautier.e-monsite.com
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