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la feuille volante

Le mariage de Loti

N°1704 – Janvier 2023

 

Le mariage de Loti – Pierre Loti - Calman-Lévy.

 

Il s’agit d’un roman paru en 1882 et qui relate un épisode de la vie de deux midshipmen anglais, Plumkett et Harry Grant. Lors d’une escale à Tahiti, ce dernier s’éprend d’une jeune et belle vahiné, Rarahu qui lui donne le surnom de Loti du nom d’une fleur locale et qu’il épouse à la mode polynésienne. A son départ, sur l’ordre de ses supérieurs, l’officier promet de revenir mais poursuit sa carrière et sa vie de marin.

 

En réalité c’est une sorte de journal tenu par Loti-Grant, une œuvre assurément autobiographique où le jeune lieutenant de vaisseaux Julien Viaud accoste à Tahiti où il entretient une relation passionnée avec une vahiné. Dans un courrier adressé à sa sœur, Harry Grant fait allusion à son frère qui a vécu ici et qui est mort. Julien Viaud avait lui aussi un frère aîné, Gustave, chirurgien de marine, mort en mer. Il y a bien d’autres références à la vie de celui qui deviendra Pierre Loti. L’épisode de Tahiti donnera ce roman qui, comme beaucoup d’autres, est inspiré de la passion qu’il nourrissait pour les femmes et leur beauté.

 

C’est évidemment un merveilleux roman plein de belles descriptions, écrit dans une langue élégante, poétique comme Pierre Loti l’a toujours fait mais c’est également un document ethnographique, sociologique, géographique, économique, linguistique d’importance qui explore également les coutumes, les légendes et l’histoire de ce pays comme le voyageur qu’il était ne manquait jamais de noter les caractéristiques des pays qu’il traversait ou visitait ;  il s’immergeait dans la culture locale. Pour autant il sent bien que cet univers paradisiaque est menacé de disparition par une certaine forme de colonisation et de civilisation qui seront destructrices pour cette contrée.

 

C’est aussi un roman d’amour qui lie Harry à Rarahu, cet amour, d’ailleurs évoqué en termes quasi platoniques, est authentique mais temporaire pour le marin qui quittera un jour cette île et cette « petite femme ». On a même l’impression que cette escale dure un temps infini alors que celle-ci est forcément courte et que Grant-Loti ne fait rien d’autre que de vivre à terre avec Rarahu alors qu’il doit aussi assurer son service d’officier à bord. La vie dans ces contrées nous est présentée comme quelque chose d’ idyllique et tout y parait facile. On sent l’écrivain Pierre Loti emporté par l’histoire qu’il nous raconte et par sa fascination pour cette île qu’il décrit admirablement. Peut-on lui en faire grief ? Comme souvent dans ses romans les personnages sont à la fin quelque peu désenchantés.

 

La trace du passage de Loti à Papeete n’est pas effacée, en témoigne notamment un buste, un lieu « le bain Loti », une avenue à son nom. Il ne fut d’ailleurs pas le seul officier de marine à être séduit par les paysages de Polynésie, ce fut le cas de Victor Ségalen, médecin militaire, sans parler du peintre Gaugin.

 

On peut reprocher beaucoup de choses à Loti, ses prises de positions, ses attitudes parfois étranges, ses écrits qu’on peut toujours interpréter avec nos yeux d’aujourd’hui, même s’il s’agit effectivement d’un écrivain de la fin du XIX° siècle, il reste un grand auteur français , malheureusement un peu oublié, qui a rendu hommage par son talent à notre belle langue française.

 

 

 

 
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