Les étoiles s'éteignent à l'aube
- Par hervegautier
- Le 11/02/2017
- Dans Richard Wagamese
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La Feuille Volante n° 1110
Les étoiles s'éteignent à l'aube – Richard Wagamese - ZOE
Traduit de l’anglais par Christine Raget.
Nous sommes à l'ouest du Canada, dans une nature sauvage. Franklin Starlight tout juste âgé de seize ans part avec sa jument à la rencontre de son père, Eldon, quelque part dans un endroit sordide, des retrouvailles au crépuscule de sa vie. Franklin a été élevé par un vieil homme qui lui a tout appris de cette vie sauvage, de cette vie patiente de chasseur, un étranger à qui Eldon l'a confié alors qu'il était enfant. Il n'a que rarement rencontré son père et n'a jamais connu sa mère. Rongé par l'alcool son père va bientôt mourir et veut que son fils l'enterre dans la montagne, comme un guerrier qu'il n'est cependant pas, c'est à dire d'une façon honorable ce qui, dans la tradition indienne lui permettra de connaître la paix dans l'au-delà. Après bien des hésitations, Franklin qui ne sait rien de sa famille interroge son père qui lui révèle des secrets. Eldon profite de des derniers moments pour dire à son fils ce qu'il lui cachait depuis longtemps. Franklin presse de vieil homme de questions, notamment sur sa mère, ne le ménageant pas, discutant ses décisions d'alors, le jugeant gravement un peu comme s'il voulait régler des comptes avec lui. En fait ce dernier voyage en compagnie d'un père qu'il ne connaît pratiquement pas a des accents de parcours initiatique pour le garçon. Il a une attitude contrastée avec le vieil homme, veillant à ce qu'il ne manque de rien mais aussi cherchant à en savoir un peu plus sur cet homme qui lui aussi veut se confier, lui dire ce qu'à été sa vie, son parcours vers l'alcool, ses regrets, ses remords , ses trahisons, ses douleurs intimes, ses obsessions. Cela prend des accents de confession ultime, une quête de pardon.
Les dialogues sont économes en mots, les descriptions empreintes de réalisme, de simplicité et de poésie ; Elles imprègnent le lecteur parce que la nature est le véritable personnage de ce roman. Elle est tour à tour foisonnante, luxuriante, nourricière mais aussi hostile et dangereuse et Franklin a appris du vieil homme à en vivre et aussi à y survivre. ;Au-delà de l'histoire, distillée avec de nombreux analepses, l'intrigue est bien construite et tient le lecteur en haleine jusqu'à la fin sans que l'ennui ne s'insinue dans sa lecture. C'est un roman poignant et émouvant, riche en évocations qui révèlent ce que fut la vie d'Eldon, une succession d'échecs mais aussi de trahisons, comme s'il était marqué par un destin funeste dont il ne pouvait pas se défaire, avec au bout, la déchéance de l'alcool, la solitude, la peur de ne pas pouvoir effectuer ce dernier devoir. Un des thèmes soulevé par ce récit est aussi le métissage, les deux hommes appartiennent à la tribu indienne ojibwé mais ce que je retiens c'est la quête du pardon et les hésitations d'Eldon pour en arriver là, l'amour pour une femme et l'impossible bonheur avec elle, le silence et le secret entretenus pendant toutes ces années autour de la naissance de Franklin. Il y a autour de ce roman une sorte de mystère à l'image des peintures rupestres que le jeune homme croise en emmenant son père pour son dernier voyage, mystère de l'origine du garçon, de son abandon par son père, de la volonté de ce dernier de s'autodétruire face à sa mauvaise étoile, puis de retrouver in extremis son enfant et lui confier le soin de sa sépulture..
© Hervé GAUTIER – Février 2017. [http://hervegautier.e-monsite.com ]
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