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la feuille volante

Marco Vichi

  • l'anno dei misteri

    N° 1566 - Août 2021

     

    L’anno dei misteri (l’année des mystères)- Marco Vichi - Ugo Guanda Editore.

     

    Cette année c’est 1969 et dans un peu plus d’un an le commissaire Franco Bordeli, de Florence, prendra sa retraite. Pour le moment nous sommes le 6 janvier de cette même année et les Italiens, en plus de la fête de l’épiphanie (« La Befana) s’intéressent à la finale d’une émission populaire consacrée à la chanson (« Canzonissima »). C’est important parce que cela peut changer le destin du vainqueur. Le commissaire, comme tous les Italiens ce soir là, est donc assis confortablement devant sa télé, avec son chien Blisk, en espérant bien profiter de cette soirée, quand un appel téléphonique l’informe qu’une jeune femme Dileta a été violée et tuée juste au moment de la diffusion du thème ouvrant l’émission (« Zum zum zum).. C’est d’autant plus important pour lui que, depuis peu, un assassin sévit dans la ville qui s‘est déjà attaqué à six prostituées. Ce tueur en série obéit à un rituel, il tue tous les neuf mois, le 13 du mois ces femmes qui se ressemblent toutes, de taille moyenne, blondes. La prochaine fois ce sera le 13 février !Éclaircir cette affaire serait pour lui partir en beauté mais il va se trouver devant deux défis, ce de Dileta et celui du 13 Février ! Pourtant il pense de plus en plus à la retraite qui sera consacrée à la lecture, au silence dans les bois, au farniente, lui qui, de plus en plus se sent vieux.

    Il commence donc à investiguer et ce qu’il apprend sur Dileta ne plaide guère en sa faveur. Elle se révèle une véritable allumeuse, ce qui contraste avec l’image qu’en donnent ses grands-parents qui l’ont élevée comme leur propre fille.

     

    On retrouve notre commissaire est toujours accompagné, entre autre, de son fidèle adjoint Piras, un Sarde fils d’un compagnon d’arme de Bordelli pendant la guerre, période qui, comme son enfance, continue de le hanter, il roule toujours dans sa vieille coccinelle (il Maggionilo), sensible à la beauté des femmes, amateur de bonne chère et désireux d’épouser la jolie Eleonora, malgré la différence d’âge

    Ici, il est aidé par un ami, le colonel Bruno Acieri, un ancien officier des carabiniers qui est aussi le personnage emblématique des romans de l’écrivain Leonardo Gori qui est un des meilleurs amis de Bordelli. Le commissaire est un personnage attachant, à la fois tourmenté et sincère, cultivé (il fait de nombreuses digressions à propos de l’œuvre d’Alba de Capedes), honnête, qu’appréciait d’ailleurs beaucoup le regretté Andrea Camileri ainsi que l’indique la dédicace.

     

    Il y a beaucoup de longueurs qui peuvent sembler inutiles à l’intrigue principale, notamment les histoires que racontent chacun de ses collègues soirs d’un repas amical. Il faut y ajouter cette aventure de son ami d’enfance qui simule un suicide pour échapper à un complot franc-maçon qui vise à rétablir l’armée au pouvoir.

    J’ai eu un peu de mal à suivre cette histoire à cause des nombreuses digressions qui certes ménagent le suspens mais s’écartent un peu de l’intrigue.

  • la forza del destino

    N° 1543 – Mai 2021

    La forza del destino (La force du destin) – Marco Vichi -TEA (Milan)

     

    Nous sommes au printemps 1967 et la ville de Florence se remet doucement des grandes inondations de l’hiver précédent. Franco Bordelli en revanche a du mal à refaire surface après sa dernière enquête qu’il a mal vécue et surtout après le meurtre de Giacomo, un jeune garçon sans défense et le viol de Eleonora, cette jeune vendeuse avec qui il avait noué une relation passionnée. Elle a disparu sans laisser de traces et le commissaire, désabusé, a quitté la police et la ville à l’étonnement général pour se retirer dans une maison dans la campagne toscane, silencieuse et isolée. Certes il s’invente une nouvelle vie de jardinier, de cuisinier, de promeneur, mais cela l’invite à un retour sur lui-même, à une réflexion sur le monde qui l’entoure mais cela ressemble aussi à une petite mort d’autant que le jeune retraité qu’il est désormais pense toujours à Eleonora. Il reste pour son collègue Piras une référence ( il l’appelle toujours « commissaire ») et une source de conseils pour ses enquêtes. Avec lui il peut parler du père de ce dernier et évoquer ses souvenirs de guerre qui restent pour Franco une sorte d’obsession, peut-être simplement parce qu’ils lui rappellent sa jeunesse et ses illusions ? Il a décidé de changer de vie mais celle-ci ne lui ressemble pas vraiment et il reste un policier animé d’un idéal de justice et quand sa voisine, la comtesse Gori Roversi lui demande de lever ses interrogations sur le suicide douteux de son fils unique Orlando, survenu quelques années auparavant, il n’hésite pas et son âme d’enquêteur reprend le dessus, désireux de ne pas laisser un crime impuni. C’est un peu le destin qui frappe à nouveau à sa porte. Il va avoir cinquante sept ans mais, même si son travail lui manque et malgré les marques d’attachement de ses amis qui ne sont pas seulement policiers, il sent sur ses épaules la force de destin et sans doute aussi un peu la mort qui le guette. Son enquête sur le meurtre et le viol laissée en suspens l’obsède et, même s’il n’est plus policier, il fera tout pour que ces crimes ne restent pas impunis. La chance l’y aidera et il verra la force de destin auquel nul ne peut échapper. Il est, en effet, révolté par l’espèce humaine capable du meilleur mais bien souvent du pire. Ce titre fait référence à Verdi et Bordelli s’inscrit dans cette recherche, dans cette interrogation qui est celle de tout homme vivant sur cette terre.

    Il a beau se sentir vieux et voir dans sa vie une page se tourner, il reste quad même attentif aux plaisirs de la table, aux volutes bleues des cigarettes, à la saveur de la grappa et bien sûr à la beauté des femmes dont il tombe facilement amoureux et il prend toujours plaisir à être en leur compagnie. Auparavant il ne croyait pas au destin mais cette enquête va l’amener à s’interroger sur un passé avec lequel il avait jusqu’à présent du mal à vivre, avec ces crimes impunis et cette réflexion va être pour lui une motivation. Il mesure le chemin parcouru, réfléchit sur ses choix antérieurs et voit dans tout son parcours une sorte de fatalité qui l’a mené là où il est malgré ses rêves de jeunesse… un peu comme tout le monde en réalité ! C’est un homme mélancolique et surtout solitaire qui égrène ses souvenirs et songe à la mort qu’il a longtemps côtoyée dans son métier. Il envisage de plus en plus la sienne, à cause des années qui s’accumulent mais aussi comme un signe du destin.

    Malgré quelques longueurs, c’est un roman qui invite à la réflexion sur le sens de la vie, plus qu’un traditionnel « giallo » (roman policier), comme disent nos amis italiens, mais qui nous tient quand même en haleine jusqu’à la fin.

    Après « Morte a Firenze »(Mort à Florence) dont ce roman est en quelque sorte la suite, on retrouve un Bordelli mélancolique et aigri par la vie, solitaire, qui se pose des questions sur son destin mais dont les états d’âme trouvent malgré tout , à la fin, un épilogue heureux. C’est un roman sombre, facile à lire, mais j’ai quand même noté avec plaisir des passages poétiques bienvenus et des références culinaires appréciées.

    Roman lu dans le texte italien et parfois à haute voix pour mieux apprécier la musicalité de cette langue , mais toujours non traduit en français, à tout le moins à ma connaissance.

     

     

  • L'inquilino

    La Feuille Volante n°1023– Mars 2016

    L'INQUILINO – Marco Vichi – Ugo Guanda Editore.

     

    Je poursuis ma découverte de l’italien avec ce roman publié en 1999 et non encore traduit en français à ma connaissance.

    Carlo qui est traducteur et qui vit dans la périphérie de Florence, rencontre des difficultés financières. Pour y faire face il décide de louer une partie de son appartement à Fred, mais ce locataire (l'inquilino) va se révéler bien différent de lui et la cohabitation s'annonce difficile. En effet il fréquente des gens bizarres mais il est non seulement sans-gêne et envahissant, s'approprie volontiers cette maison où il n’est pourtant qu’un occupant très précaire, allant même jusqu'à lui casser ses bons coups quand il lui arrive, lui qui vit seul, d'inviter une copine chez lui. Cela n'arrange pas les relations déjà bien tendues entre les deux hommes. Non seulement Carlo n'a pas de chance avec les femmes, s'y prend très mal avec elles, (il n'est pas un « donnaiolo » comme disent nos amis Italiens) mais il fait ce qu'il peut pour donner le change puisqu’il se sait observé par les commères du coin et ne voudrait surtout pas qu'on le prenne pour un homosexuel à cause de cette maudite location. Bref Carlo et Fred sont l'exact contraire l'un de l'autre.

    L'ennui, c'est que dans son quartier, et même dans les immeubles voisins du sien, les meurtres se multiplient et bien entendu Carlo suspecte Fred, d’autant qu'il y a décidément beaucoup de coïncidences qui justifient son intuition. Mais c'est plutôt lui que la police souhaite interroger ! A partir de ce moment, j'ai eu l’impression que ce roman est un « policier », mais finalement non.

    Au départ, j'ai un peu galéré pour lire ce roman, j'ai déploré pas mal de longueurs au point que je ne savais pas exactement où l'auteur voulait en venir. Il y avait eu un premier meurtre, puis un deuxième, une histoire de bijoux que Fred veut vendre pour payer son loyer, mais il n'y avait pas vraiment d’enquête policière, seulement des soupçons de la police en direction de Carlo et de ce dernier pour Fred, son locataire devenu bien encombrant. Heureusement la police s'intéresse aussi à Fred à cause sans doute de son casier judiciaire déjà assez chargé... Finalement tout s'explique à la fin mais on ne peut pas dire que le suspense soit vraiment entretenu. C'est aussi un roman sur la solitude, celle de Carlo en particulier, un texte où des gens se croisent sans se comprendre, un univers malheureusement bien humain !

    L'auteur, né en 1957 est sans doute assez peu connu en France. Apparemment ses livres, pourtant nombreux ne sont pas traduits pour le moment et c'est peut-être dommage. Ce roman qui était le premier de Vichi, constitue pour moi une première approche de cet auteur. Je pense que dans l'avenir je serai amené à explorer son univers créatif non seulement pour lui-même mais aussi pour la beauté de la langue italienne.


     


     

    © Hervé GAUTIER – Mars 2016. [http://hervegautier.e-monsite.com ]

     

     

  • Morte a firenze

    La Feuille Volante n°1026– Mars 2016

    MORTE A FIRENZE (Mort à Florence) – Marco Vichi – TEA.

    Nous sommes à Florence en 1966 et il ne cesse de pleuvoir ! Un petit un garçon a disparu et seule une femme l'a aperçu de sa fenêtre. Elle est formelle, il ne peut s'agir que de Giacomo Pellissari , le fils de l'avocat et bien entendu le commissaire Franco Bordelli est chargé de l'enquête. En effet, son corps a été retrouvé par un chasseur dans les montagnes boisées environnantes, et l'enfant a été assassiné et violé. Tel est le départ de cette enquête menée par le commissaire Bordelli et c'est donc un « giallo »  comme disent nos amis italiens, un roman policier. Avec pas mal de bluff, un peu de chance quand même, une simple facture de téléphone ramassée près du cadavre, un unique indice qui pourrait bien être lié à cette affaire, mais il n'est sûr de rien, va conduire ses investigations. Ce sera son seul fil d’Ariane, d'ailleurs il n'a rien d'autre. Sa bonne étoile, mais aussi ses relations vont l'aider dans ses recherches et ses souvenirs du passé vont favoriser ses investigations. Il va explorer les « trattorie » qu'il connaît bien et les bas-fonds de la communauté homosexuelle, peut-être liée à cette affaire, faire suivre un probable suspect et aboutir jusqu'à une maison où aurait bien pu être commis ce crime. Au cours de cette enquête la nostalgie du fascisme reviendra et sera peut-être la clé de l'énigme mais le lecteur n'est pas au bout de ses surprises ! Malheureusement la pluie n'arrête pas de tomber et submerge la ville et dans la nuit du 4 novembre, jour de commémoration nationale en Italie, l'Arno sort de son lit et inonde la cité. Les descriptions du déluge et de ses ravages sont particulièrement réalistes. Pourtant, cet épisode climatique fait un peu oublier l'enquête du commissaire d’autant qu'en participant aux travaux de déblaiement celui-ci rencontre une jolie femme dont bien entendu il tombe amoureux. C'est qu'il n'est plus très jeune et cette femme lui redonne de l'espoir, ou ravive ses fantasmes !

     

    Il me plaît bien ce commissaire Bordelli, sa manière très personnelle de mener son enquête, son goût pour « Il Maggiolino »(une coccinelles VW), son passé d'ancien combattant qui revient en obsédants analepses, son attirance pour les chats, sa timidité un peu gauche et sa perpétuelle habitude de tomber amoureux des belles femmes, souvent plus jeunes que lui qu'il croise, lointaines, distantes, inaccessibles mais qu'il voudrait bien mettre dans son lit même pour une passade, lui, ce vieillissant célibataire. Il a bien dû, dans ses jeunes années être un « donnaiolo » comme disent nos amis italiens, mais maintenant cela appartient au passé, même si, cette fois, il aura sa chance, retrouvera un temps sa jeunesse, ce qui l’aidera sans doute à solutionner cette affaire qui gravite entre vice, sexe et drogue. Il n'avait pas voulu croire aux paroles de la cartomancienne mais cette liaison amoureuse qu'il espérait durable va se retourner contre lui sans qu'il y puisse rien, le laissant dans le même état que la ville, bouleversé ! A l'occasion de ce roman, le lecteur apprend connaître un Bordelli professionnel, consciencieux mais malchanceux, dépassé par les événements et les forces qui se lient contre lui, désespéré au point de tout lâcher, terrassé à la fois par l'âge, la désespérance, le destin, la certitude d'être un étranger dans ce monde où il n'a pas sa place. Il ressemble un peu à Carlo, le personnage de « l'Inquilino » [la Feuille Volante n°1023], un roman précédent. Il reste un insatisfait définitif, un peu idéaliste, une sorte d'hypocondriaque, avec son éternelle cigarette à la bouche, sa nostalgie du passé, son appétence pour la bonne nourriture et pour la « grappa », ce qui n'est peut-être qu'une manière de combattre sa mélancolie, sa solitude face à la retraite qui s'annonce, la vieillesse qui commence à le tracasser et peut-être aussi l'angoisse de la mort. Malgré la présence de Rosa il est bien seul, avec ses fantasmes féminins, ses servitudes policières du quotidien, cette enquête qui piétine, le souvenir de ses parents morts, le regard déçu qu'il promène sur la communauté humaine et toujours cette pluie, cette boue et le danger qu’ils représentent pour la ville et ses habitants.

     

    J'ai lu ce roman dans le texte et ce que je retiens aussi ce sont ses passages humoristiques, poétiques, cette balade dans Florence, cette merveilleuse ville dont le nom évoque à la fois la beauté de la fleur et celle des femmes mais qui, malheureusement, est, à cette époque ravagée, par les inondations. J'ai aimé aussi le côté désespérément humain de ce policier malheureux. Je poursuis mon exploration personnelle de l’œuvre de Marco Vichi et je continue à regretter que cet auteur ne soit pas encore traduit en français. Je pense pourtant qu’il en vaut la peine.

    © Hervé GAUTIER – Mars 2016. [http://hervegautier.e-monsite.com ]

     

     

  • Il nuovo venuto

    N° 1492- Août 2020.

     

    Il nuovo venuto - Marco Vichi – TEA Editeur.

     

    Près de chez Bordelli, à Florence, en 1965 , un homme , Totuccio Badalamenti, a été assassiné, une paire de ciseaux plantée dans la nuque. Le commissaire ne le connaissait pas mais le voyait souvent passer dans sa Porsche rouge . Il venait du sud et c’est sans doute pour cela qu’on l’appelait « le nouveau venu ». Officiellement il était agent immobilier mais en réalité c’était un affairiste, usurier profiteur et maître chanteur qui n’était guère apprécié dans le quartier. Un tel personnage ne peut qu’avoir des appuis et cela ne va pas faciliter son enquête. Effectivement il ne trouve rien à part quelques photos de jeunes femmes dont une, celle d’une certaine Marisa, dont il aimerait bien en savoir davantage. D’autres suivront qui ont pu faire l’objet de chantage et ses investigations lui révèlent une liste de débiteurs de la victime qui pourraient être autant de meurtriers potentiels. Ça lui promet pas mal de recherches et surtout de tâtonnements et pour le meurtre, il sait seulement que la victime a été exécutée... par un gaucher ! D’autre part l’autopsie de Badalamenti révèle la présence d’une bague gravée d’un nom inconnu et avalée avant sa mort . Ça part vraiment dans tous les sens et notre commissaire est perdu, d’autant qu’il est partagé entre son devoir qui est d’élucider ce meurtre et de faire régner l’ordre public et le peu de sympathie que lui inspire la victime. Cela révèle son côté fragile et ses états d’âme.

    De son côté Piras, son fidèle adjoint, est en convalescence en Sardaigne, et, au motif qu’un policier est toujours en service, s’intéresse à ce qui est officiellement le suicide de son cousin Benigno, mais un détail le trouble dont évidemment il parle par téléphone avec le commissaire et qui le fait douter de l’authenticité du suicide. Alors que Bordelli est confronté à un grand nombre de coupables potentiels, Piras n’a rien. Ce roman relate donc deux enquêtes parallèles, compliquées et pleines de rebondissements. Ce sont peut-être deux bons policiers mais malgré la qualité de leurs investigations et leur imagination, ils sont tout aussi démunis l’un que l’autre. Ils savent néanmoins pouvoir compter l’un sur l’autre.

    Quand Bordelli voit un mort, cela lui rappelle la guerre qu’il a faite contre les nazis et les fascistes et à laquelle il a survécu ; il l’évoque avec pas mal d’analepses et peut-être un peu trop. Il se souvient de ses compagnons d’armes, morts eux aussi et cela ne contribue pas à lui remonter le moral. C’est pourtant des souvenirs de guerre qui vont permettre à Piras, trop jeune cependant pour l’avoir faite, d’éclaircir, avec la complicité de Bordelli, l’affaire qui l’occupe. Le commissaire observe le monde autour de lui avec l’actualité du moment, quelques jours avant les festivités de Noël et du nouvel an que l’auteur nous détaille au rythme du calendrier. Ces fêtes seront honorées comme il se doit par des recettes de cuisine écrites et réalisées pour Bordelli par son ami Ennio Bottarini dit Botta, par ailleurs familier des prisons, ce qui témoigne de la volonté de notre commissaire de toujours faire bonne chère.

    Je le trouve vraiment sympathique ce commissaire, humain, émouvant et compatissant aussi, surtout quand il choisit de passer du temps à l’hôpital auprès d’un brigadier qui va mourir. C’est peut-être aussi pour lui, et à l’invite de ce collègue, une occasion de réfléchir sur le sens de son métier de policier, de la vie et de la mort. Il est toujours un peu en marge comme s’il était partagé entre ses amitiés authentiques pour les truands dont il tolère les petits écarts, sa complicité avec Rosa, l’ancienne prostituée dont peu ou prou il partage la vie, son addiction à l’alcool et au tabac, et son métier de policier. Il jette toujours sur le monde le même regard désabusé et mélancolique.

     

    Comme d’habitude, j’ai lu ce roman en italien, pour le plaisir de la langue et aussi parce que, à ma connaissance il n’y a pas de traduction. J’ai goûté le suspense mais j’ai noté quand même quelques longueurs.

     

    ©Hervé Gautier mhttp:// hervegautier.e-monsite.com

     

  • Une sale affaire

    N° 1491- Août 2020.

     

    Une sale affaire (una brutta faccenda) – Marco Vichi- TEA Éditeur.

     

    D’abord il y a Florence, cette merveilleuse ville de Toscane au nom de femme et ensuite le côté vintage des années 60… Mais c’est pourtant le théâtre de meurtres de petites filles étranglées, horriblement marquées par les crocs de doberman et Bordelli va devoir mener ces enquêtes qui commencent vraiment très mal, sans aucune piste et ça piétine, d’autant que son ami Casimiro, un de ses indics, vient de disparaître sans raison et qu’il le croit mort. Il va investiguer également de ce côté-là et ça lui pèse réellement sur le moral. Il a beau convoquer le banc et l’arrière-banc des truands de sa connaissance dont il choisit d’ignorer les petits trafics, rien n’y fait, apparemment du moins puisque s’il a ses méthodes il a aussi son rythme et les connaissances qu’il a tissées dans le passé et qui pourraient bien lui servir...

    Il est toujours aussi obsédé par ses souvenirs de guerre contre les nazis et des atrocités dont il a été le témoin et parmi les gens que ses investigations lui font croiser, il croit reconnaître un visage et surtout une caractéristique corporelle qu’il ne peut oublier… Alors il cherche, laborieusement avec la volonté d’arrêter le meurtrier avant qu’il ne recommence. Il a d’ailleurs intérêt à avoir des résultats au plus vite parce que sa hiérarchie s’impatiente.

    Heureusement il a des compensations dans sa vie solitaire d’enquêteur, son fidèle adjoint, le Sarde Piras dont il a jadis connu le père au moment de la guerre, les nuages bleus de la fumée de cigarettes, les vapeurs de cognac, la cuisine italienne et surtout l’agréable compagnie et complicité de Rosa, l’ancienne prostituée amoureuse des chats, Diotivede, le légiste et Botta, son cuisinier préféré.

    Il me plaît bien ce commissaire, toujours un peu en marge des procédures, il fréquente autant les prostituées que les petites frappes, ne dédaigne pas les bonnes choses de la vie et est toujours sensible à la beauté des femmes. Il va d’ailleurs vivre avec l’une d’elles dont il est tombé amoureux au premier regard une intense mais brève histoire d’amour qui lui montre que pour lui aussi le temps a passé, peut-être un peu trop vite. Je ne connais pas son avenir professionnel, mais il me semble qu’il n’est pas un arriviste comme on en croise beaucoup et qu’il n’aura pas de promotion spectaculaire, mais qu’importe après tout !

     

    Roman découvert en italien pour le plaisir de la langue et aussi pour son étude. Le style de Marco Vichi est en effet plus abordable pour moi que celui de nombre d’autres auteurs lus dans le texte. Il ménage le suspense jusqu’à la fin.

     

    ©Hervé Gautier mhttp:// hervegautier.e-monsite.com

     

  • Le commissaire Bordelli

    N° 1422 - Janvier 2020.

     

    Le commissaire Bordelli - Marco Vichi - Éditions Philippe Rey.

    Traduit de l'italien par Nathalie Bauer.

     

    Nous sommes à Florence en 1963, cette belle ville qui porte un nom de femme. Le commissaire Bordelli, 53 ans, un policier encore tourmenté jusque dans ses rêves par ses combats contre les nazis pendant la deuxième guerre mondiale est appelé, dans cette ville plombée par la chaleur, à la suite du décès d'une vieille dame riche, apparemment victime d'une crise d'asthme. L'affaire paraît simple mais son œil de policier décèle des détails qui l'amène à ouvrir une enquête et ce d'autant que l'héritage est juteux. Il est entouré de Piras, un jeune sarde qui vient d'intégrer la police.

    Au début l'enquête piétine, s'égare et si j'ai trouvé pas mal de longueurs, je n'ai pas non plus été très convaincu par l'intrigue où le bluff a une grande place.

     

    La personnalité de Bordelli est intéressante. Il n'est pas insensible à la beauté des femmes, vit seul dans l'attente de la rencontre d'un hypothétique compagne qu'il ne voit pas venir. Il jette sur le monde qui l'entoure un regard à la fois désabusé et mélancolique, a de plus en plus de mal à distinguer le bien du mal, fréquente plus volontiers Rosa, une ancienne prostituée et Botta un petit délinquant que ses autres collègues et se console avec la cuisine roborative et l'alcool et le tabac. Cet homme me parait digne d'intérêt et j'aime son côté non conventionnel.

     

    ©Hervé Gautier http:// hervegautier.e-monsite.com.