Articles de ervian
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Les graines du figuier sauvage
- Par ervian
- Le 23/09/2024
- Dans Mohammad Rasoulof
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N°1933– Septembre 2024.
Les graines du figuier sauvage – Un film de Mohammad Rasoulof.
Prix spécial du jury Cannes 2024.
Téhéran, de nos jours.
Iman, marié et père de deux filles, Rezvan et Sana, étudiantes, vient d’être nommé juge. Il est originaire d’un petit village perdu dans les montagnes et a intégré les instances du régime grâce à sa foi religieuse mais aussi sans doute grâce au zèle qu’il met à le servir. Il a élevé ses enfants dans l’observance de la loi coranique qui prône notamment l’effacement de la femme et la prière. Il est partagé entre le respect des préceptes de la foi et la lutte contre les manifestations de plus en plus nombreuses contre le port du voile qui risquent de faire basculer le pouvoir dont il est un rouage. Ses nouvelles fonctions lui assurent une certaine aisance mais l’expose. Les manifestations incessantes de la rue le perturbent et les condamnations à mort qu’il doit signer le bouleversent.
Son ascension sociale est soutenue par son épouse Najmeh mais ses deux filles, pourtant élevées dans les règles de l’islam, se retrouvent au milieu du mouvement contestataire qu’elles soutiennent. La perte inexpliquée de son arme de service signifie pour lui la déchéance et la prison et, avant d’en faire la déclaration officielle, la paranoïa s’installe et il accuse sans preuve les membres de sa propre famille de lui mentir.
Ce film est entrecoupé de nombreuses séquences diffusées sur les réseaux sociaux attestant la contestation des femmes et notamment la mort de Jina Mahsa Amini, assassinée dans un commissariat de police pour port incorrect du voile. Ces déviances d'une théocratie qui s'apparente à une dictature religieuse nous sont connues aujourd'hui mais dans quelques dizaines d'années, quand ce régime aura disparu (si cela est possible), l'oubli qui fait tellement partie de la condition humaine aura fait son œuvre et de tels témoignages attesteront de cette réalité historique.
Puis le film se concentre sur l’ambiance familiale devenue délétère depuis la perte de l’arme d’Iman et si Rezvan, l’aînée, milite pour un changement radical de la loi et d’une plus grande liberté pour les femmes, Sana, la cadette, souhaite davantage porter les cheveux bleus et du vernis à ongles. Cela va bien au-delà de l’opposition traditionnelle parents-enfants à l’adolescence. Le père, aimant et attentif qu’ était Iman, devient pour les siens, à la fois au nom de la religion, de la défense du régime des ayatollahs, et peut-être aussi pour lui qui est parti de rien, de sa carrière, un bourreau domestique. A l'occasion d'un retour dans son village, de la dégradation de l'ambiance et d'accusations portées contre lui, son épouse traditionnellement soumise, prend la défense de ses filles et c'est un peu comme si ces événements politiques tragiques du pays étaient transposés dans cette famille, le père devenant l'oppresseur face à ses femmes qui se révoltent. Le spectateur occidental prend très vite fait et cause pour elles et l’épilogue, malgré quelques longueurs, est parfaitement prévisible.
Ce film, tourné en partie dans la clandestinité, rend compte de la société iranienne actuelle et nous fait prendre conscience de la chance que nous avons de vivre dans un pays libre, démocratique et laïc et de la vigilance qui doit être la nôtre face à la menace d’un basculement toujours possible.
En tout cas un film bouleversant.
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Était -ce lui?
- Par ervian
- Le 21/09/2024
- Dans Stefan Zweig
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N°1931 – Septembre 2024.
Était-ce lui ? Stefan Zweig -Gallimard.
Traduit de l’allemand par Laure Bernardi et Isabelle Kalinowski.
Stefan Zweig (1881-1942) s’est très tôt fait connaître par ses poèmes et surtout par ses nouvelles. Ce petit volume en comporte deux. « Un homme qu’on oublie pas » et « Était-ce lui ? » qui lui donne son titre.
La première, écrite à la première personne, met en scène Anton, un homme
exceptionnel, quasi clochard, mais que tout le monde connaît et estime, détaché des biens de ce monde et qui passe son temps à aider ses semblables sans rien leur demander en échange. D’autre part le témoignage qu’en fait le narrateur, intellectuel connu, qui admet que l’exemple de ce marginal a été pour lui une leçon de liberté et d’indépendance, est d’une grande importance. Ce texte est-il l’évocation d’une rencontre effective de l’auteur avec un tel homme (il sous-titre ce titre par la mention « histoire vécue ») ou est-ce le modèle humain auquel il aspire ? Zweig est un idéaliste et ce type d’individu, certes singulier dans ce monde gouverné par l’argent, peut parfaitement incarner sa vision de l’homme.
La seconde tient un peu du polar et donne la parole à Betsy qui passe sa retraite avec son mari près d’une petite ville anglaise. Vient s’installer près de chez eux un jeune couple sans enfant dont elle évoque le quotidien avec force détails, insistant sur l’analyse psychologique des personnages et notamment sur le mari. Il adopte un chien dont il devient quasiment l’esclave, mais les choses changent avec la naissance inespérée d’un enfant. L’atmosphère du récit devient pesante et le lecteur partage également l’angoisse et la question que se pose à elle-même la narratrice et qui donne son titre à cette nouvelle (Était-ce lui?). Le suspens est entretenu jusqu’à la fin et le texte, évidemment fort bien écrit (traduit), ajoute au plaisir du lecteur.
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Les yeux de Mona
- Par ervian
- Le 17/09/2024
- Dans Thomas Schlesser
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N°1929 – Septembre 2024.
Les yeux de Mona – Thomas Schlesser – Albin Michel
Mona, neuf ans, va perdre définitivement la vue. Elle va donc devoir consulter différents spécialistes et notamment chez un psychologue. C’est son grand-père Henry, son « Dadé », un être taiseux depuis la mort de sa femme mais aussi un érudit un peu fantasque qui se propose de l’accompagner chaque mercredi. En réalité il a aussi l’intention de lui faire découvrir les œuvres d’art des grands musées parisiens, Le Louvre, Beaubourg, Orsay…, c’est à dire de lui donner l’occasion de voir ce qu’il y a de plus beau au monde avant qu’elle ne perde l’usage de ses yeux. Ce seront donc 52 rendez-vous que son « Dadé » lui propose avec Léonard de Vinci, Raphaël, Cézannne, Picasso...en se concentrant sur une seule œuvre d’un artiste. Il termine cette initiation par Pierre Soulages et ses noirs. C’est à la fois une bonne conclusion de ces rendez-vous puisque c’est elle qui commente un de ses tableaux mais aussi une triste respective pour elle puisque le noir sera aussi, bientôt, son univers
Non seulement le vieil homme lui fait découvrir ces œuvres mais aussi il l’initie à la vie avec les doutes et les révoltes qu’elle inspire, à l’histoire et en particulier celle de l’art et des artistes, à la connaissance des choses et des gens, suscite sa curiosité, ses réflexions, ses remarques souvent pertinentes, provoque chez elle l’intérêt pour la création artistique et l’éveil de son esprit critique...
C’est un peu comme si l’initiation que le vieil homme mène au profit de sa petite-fille qui sa devenir aveugle, le faisait lui aussi revenir à la vie non seulement en partageant avec elle ses connaissances mais aussi en réalisant ainsi une sorte d’initiation, comme s’il y avait entre eux une démarche complémentaire, Mona va perdre la vue,et son grand-père veut que sa mémoire emmagasine de belles choses et Henry lui va perdre a vie mais avant cela il veut que cette enfant profite de son érudition avant de disparaître .
J’ai trouvé la relation grand-père-petite-fille à la fois émouvante et authentique et les informations données par le vieil homme fort intéressantes et précises.
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La madre
- Par ervian
- Le 15/09/2024
- Dans Grazia Deledda
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N°1930 – Septembre 2024.
La Madre – Grazia Deledda – Stock.
Traduit de l’italien par Madeleine Santschi.
Court roman paru en 1919, en feuilleton, puis édité en 1920. Cette œuvre traduit le trouble de Maria Maddalena, la mère de Paulo, devenu le curé d’un pauvre village sarde et qui a suivi son fils dans son ministère. Il est entré dans les ordres davantage pour échapper à la misère que par foi religieuse. Accueilli comme le Messie à son arrivée, il ne tarde pas à tomber amoureux d’Agnese, une femme riche et seule qu’il va retrouver la nuit. Cette relation risque de devenir publique à cause d’elle, agacée par les hésitations de Paulo. Tout le roman repose sur les réflexions, les remords de cette mère qui a suscité chez son fils cette vocation pour la prêtrise, face au péché irrémédiable du jeune ecclésiastique. Paulo n’est pas exempt de troubles psychologiques, lui qui a consacré sa vie à la purification des âmes de ses semblables et doit tenir ce rôle vis à vis de ses paroissiens, mais ne parvient pas à se libérer de cet amour caché mais authentique qui doit évidement, rester secret. Les pensées douloureuses de ces deux protagonistes s’entremêlent au cours de ces pages. C’est aussi la certitude que, pour un homme, l’amour de la femme doit passer par de détachement de la mère, à la fois gardienne respectée des traditions et frein au bonheur. Ce roman illustre le combat entre l’amour de Dieu et la tentation de la chair, entre la vie et la mort, la fatalité, l’expiation du péché, la culpabilité, l’interdit de l’amour mais aussi des questions récurrentes, le célibat des prêtres, la chasteté, l ‘hypocrisie, le mensonge …
Les événements évoqués se déroulent sur deux jours et les émotions se mêlent à l’action, aux évocations du passé, aux remords, à un impossible avenir.... Le doute, les hésitations viennent brouiller les décisions de ces deux personnages tourmentés, avec en contre-point la figure incontournable du diable, symbolisé par le vent, mais aussi de fantômes du passé et de miracles apparents qui troublent l’esprit des paysans.
Il y a une opposition entre ces deux femmes, Maria Maddalena, très présente qui incarne l’image non seulement de la mère, vertueuse, aimante mais torturée mais aussi celle de la servante dévouée, effacée, de la pieuse femme sarde à la foi archaïque et superstitieuse, et Agnese qui dans ce roman incarne l’ image de la tentation et du péché mais aussi de l’incitation à bouleverser un ordre social établi et immuable .
Il y a un autre personnage, Antioco, l’enfant de chœur, naïf et innocent qui admire le jeune curé et veut devenir prêtre comme lui mais ne sait rien de ses états d’âme et de sa conduite. Il interprète l’image que lui donne ce dernier comme des manifestations de la sainteté de Paulo et de la grandeur de son ministère. Avec Maria Maddalena et Agnese, il illustre les contradictions du prêtre.
Ce roman ne passa pas inaperçu à sa publication puisqu’il fut préfacé par D.H. Lawrence et traduit en anglais.
Grazia Deledda (1871-1936) est l’auteure d’une abondante création littéraire, plus de 50 volumes, romans et nouvelles dont beaucoup publiés en français, mais aussi théâtre poésie et traduction. Elle a été la première femme italienne à recevoir le Prix Nobel de littérature en 1926. En 2013 le réalisateur italien Angelo Maresca s’est inspiré de ce roman pour son film éponyme. Elle a publié ses premiers textes à l’âge de 17 ans ce qui, pour une jeune fille de cette époque qui devait restée discrète, était exceptionnel. Elle s’est affirmée comme une écrivain sarde, amoureuse de son île et de son peuple, un univers rigide et archaïque dont elle s’est fait le témoin dans toute son œuvre sans oublier d’évoquer la condition des femmes. Elle a également choisi de traiter notamment de l’inceste dans son roman Elias Portolu, considéré comme son chef d’œuvre ce qui, pour une femme de cette époque témoigne d’un certain courage. Ici s’entremêlent les thèmes de l’amour et de la mort, mais aussi pour l’homme celui du choix de la soutane et du refus de l’amour face au scandale. Là aussi il y a renoncement et choix de la religion comme seule réponse face à la solitude de la femme.
Son style est influencé par le vérisme, Mouvement artistique italien de la fin du XIX° siècle, à peu près analogue au naturalisme français incarné par Émile Zola. Grazia Deledda, bien que vilipendée à son époque est en effet une auteure majeure, témoin de son temps, au style simple, sans érotisme , aussi pertinent dans les analyses des sentiments des personnages qu’il est agréable à lire dans les descriptions de paysages.
© Hervé GAUTIER – La Feuille Volante - http://hervegautier.e-monsite.com]
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C'e ancora domani
- Par ervian
- Le 09/09/2024
- Dans Cinéma italien
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N°1850 – Mars 2024.
Il reste encore demain (C’é ancora domani)– Un film de Paola Cortellesi. (2023)
Nous sommes à Rome dans un quartier pauvre, en 1946 . L’Italie post-fasciste se relève difficilement de la guerre. Delia (Paola Cortellesi), une mère italienne souhaite donner à ses trois enfants un avenir meilleur que le sien et en particulier à sa fille aînée, Marcella (Romana Maggiora)
Delia se débat face dans un quotidien sans joie avec un mari autoritaire et violent, Ivano (Valerio Mastrandrea), le type même du mâle qui considère sa femme comme sa chose, en abuse, la gifle sans raison tous les matins. Delia ne trouve du réconfort qu’auprès de son amie Marisa (Emanuela Fanelli) que pour quelques moments de légèreté et grâce à de petits boulots ingrats qu’elle multiplie pour compléter le maigre salaire de son mari. Les humiliations quotidiennes qu’elle subit révoltent Marcella qui ne manque pas de le lui faire savoir. Cela passe à ses yeux pour de la lâcheté, pire peut-être pour de la soumission à un ordre établi qui fait de l’épouse un être servile et consentant, chargé du foyer, des enfants et des envies de son mari dont elle est la propriété. L’argent que gagne Ivano, il le dépense au bistrot ou au bordel, mais le tableau ne s’arrête pas là, la famille héberge également son beau-père, un vieillard lubrique et autoritaire qui inspire la conduite de son fils, et deux garçons gâtés. Délia voit dans les fiançailles de Marcella avec Giulio, d’une classe sociale plus élevée, une perspective différente pour elle mais l’attitude du jeune homme, malgré les serments et les promesses, lui donne à penser que rien ne changera. Elle y substitue une solution plus efficace à ses yeux.
Heureusement l’arrivée inespérée d’une lettre va tout changer pour Delia, et pas seulement pour elle.
Paola Cortellesi, comédienne appréciée chez nos amis italiens qui tient ici le rôle principal, passe pour la première fois derrière la caméra pour réaliser ce film en noir et blanc qui remet le spectateur dans l’ambiance de l’époque. Il reprend les codes du néo-réalisme italien des années d’après-guerre incarnés par Vittorio de Sica (Le voleur de bicyclettes) Ettore Scola (Une journée particulière) ou Luchino Visconti (Les amants diaboliques). C’est certes une critique de la situation des femmes dans cette Italie traditionnelle de l’après-guerre qui pose aussi d’autres questions éternelles. Comment un homme jadis amoureux et prévenant avec sa fiancé devient-il violent avec elle une fois marié et ce malgré le trait d’humour qui transforme, à la grande surprise de Délia, en danse improvisée ce qui aurait pu être une série ordinaire de coups. Son courage et son abnégation recueillent la sympathie du spectateur quand elle s’oppose à l’avenir de sa fille qu’elle juge délétère, avec la complicité d’un militaire américain noir, c’est à dire lui aussi habitué à la violence ségrégationniste. Cette empathie va jusqu’à comprendre et admettre qu’elle quitte ce foyer, répondant à une demande d’un amour de jeunesse pour une autre vie malgré les enfants, l’interdit de l’Église, la mort de son beau-père...
C’est un film, pas vraiment dans l’air du temps qui étonne le spectateur et l’égare dans les arcanes des possibles mais qui se révèle être bien autre chose, autrement porteur d’espoirs qu’un banal adultère et qui a fait en Italie un nombre impressionnant d’entrées dans un cinéma italien en crise. Il a même été projeté dans les écoles pour prévenir les féminicides importants dans la péninsule et notamment l’affaire du meurtre de Guilia Cecchettin, 22 ans, poignardée en novembre dernier par son compagnon. Il a même enthousiasmé jusqu’à la Cheffe du gouvernement italien d’obédience post-fasciste, Georgia Meloni, qui l’a qualifié de « courageux et stimulant ».
Je termine cette chronique en faisant une mention spéciale à la bande-son particulièrement originale.
Alors, retour de la nostalgie ou évocation du combat des femmes pour leur nécessaire émancipation dans une Italie minée par la tradition, le bernusconisme et l’influence de l’Église ? Ce film qui non seulement bouscule toutes les tendances actuelles du cinéma ne passera sûrement pas inaperçu en France où le droit des femmes vient d’être encore une fois renforcé et officialisé.
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La nouvelle femme
- Par ervian
- Le 09/09/2024
- Dans Cinéma italien
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N°1857– Avril 2024.
La nouvelle femme - Un film franco-italien de Lea Todorov. (2023)
L’éducation est un moyen essentiel dans l’émancipation de l’homme et de sa réalisation personnelle. Cette affirmation prend toute son importance quand il s’agit de personnes handicapées qui ont comme les autres le droit à la vie. Face à ce problème, le régimes totalitaires ont apporté une solution d’élimination quand les démocraties cherchent à y apporter une réponse plus adaptée. Ce fut un long combat, il est vrai souvent caractérisé par des initiatives individuelles quand la collectivité choisissait souvent d’ignorer voire de cacher ceux qui en étaient atteints.
Nous sommes à Rome en 1900 et Lili d’Alengy, une prostituée qui a fui Paris, cache sa fille idiote qui entrave sa carrière. Elle y rencontre Maria Montessori (1870-1952), une femme médecin qui travaille dans un institut pour enfants déficients et qui a développé une méthode d’éducation pour les aider à se réadapter. Il naît entre ces deux femmes que tout oppose une relation faite d’empathie, de compréhension et de volonté d’aide face à une détresse solitaire, celle de Lilli qui souhaite dissimuler la présence de sa fille et celle de Maria qui veut faire reconnaître son action. Maria elle aussi cache un fils, certes normal, mais né hors mariage, ce qui a l’époque est pour une femme célibataire un motif d’exclusion de cette société bourgeoise, bien pensante et hypocrite. De plus, pour une femme, être médecin est tout simplement inconcevable dans un monde réservé aux hommes et son action personnelle en faveur des enfants est éclipsée au profit de son collègue, le père de son fils, Guisepe Montesano, codirecteur de l’institut. Lilli fait profiter à Maria de sa connaissance du monde masculin et de la façon de se comporter face à lui pour lui résister et Maria aide efficacement sa fille à progresser. Maria qui auparavant ne vivait que pour la science et pour son travail se révèle être cette « nouvelle femme » qui va s’affirmer. Ce sont les deux personnalités féminines de ce film. Cette opposition entre ces deux femmes, l’une réelle, Maria Montessori (Jasmine Trinca) et l’autre fictive incarnée par Leila Bekti est bienvenue. Elle met en prescriptive la personnalisé de la première, autoritaire, ambitieuse et surtout désireuse de s’imposer dans un monde qui la rejette et la seconde qui reste une demi-mondaine mais une femme libre et indépendante qui va aider Maria à conquérir son autonomie financière , fonder son propre centre et imposer la méthode qui va porter son nom et révolutionner l’école de son temps. Elle est encore utilisée aujourd’hui.
Un autre aspect important est la relation entre Maria et son compagnon, le père de son fils qui co-dirige l’institut, Guisepe Montesano (Rafaele Esposito) qui souhaiterait qu’ils se marient, notamment pour légitimer leur fils, mais Maria refuse puisqu’elle perdrait du même coup son indépendance, la femme mariée était à l’époque sous la tutelle exclusive de son époux. La reconnaissance de son fils par son père, qui par ailleurs de marie avec une autre femme, fait perdre à Maria ses droits sur son fils dont elle doit se séparer pendant 12 ans. C’est le douloureux prix qu’elle doit payer pour être reconnue.
Ce film est important parce qu’il met en scène des enfants réellement déficients mais dont la direction s’est adaptée à leur handicap. En outre il s’inspire directement du journal intime de Maria.
Ce long métrage s’inscrit parfaitement dans la difficile conquête des droits de l‘enfant inadapté mais aussi la prise en compte du long combat des femmes pour la reconnaissance de leur statut au sein de la société. Le cinéma italien s’en fait actuellement l’écho, mais dans un tout autre registre, notamment avec le film de Paola Cortellesi « C’e ancora domani » (il reste encore demain) et celui de Maria Savina (« Prima donna »)
C’est le premier film de Lea Todorov, connue par ailleurs dans le domaine de réalisation de documentaires et c’est une réussite.
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Gloria
- Par ervian
- Le 09/09/2024
- Dans Cinéma italien
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N°1894 – Juin 2024.
Gloria – Un film de Margherita Vicario.
Pie VII vient d’être élu pape et va venir visiter le vieil orphelinat de jeunes filles de Sant’Ignazio à proximité de Venise. Elles y reçoivent une éducation musicale approfondie mais leur seul espoir d’émancipation est le mariage, évidemment arrangé. L’établissement est dirigé par un prêtre âgé, maître de chapelle, surnommé « Maestro », à qui le gouverneur demande une composition originale pour honorer la visite pontificale. Faute d’inspiration, l’ecclésiastique peine à honorer cette commande qui devra être exécutée par le petit orchestre à cordes des pensionnaires.
Teresa, humble servante anonyme et solitaire, est vouée dans cette institution aux tâches matérielles les plus humbles et personne ne connaît son histoire sordide. Rendue orpheline par la guerre, elle est placée chez le gouverneur qui la viole et se charge de l’éducation de son enfant dont elle est séparée. On lui intime l’ordre de ne parler à personne, ce qui lui vaut le surnom de « La muette ». Par hasard, dans une dépendance, elle découvre un piano et révèle un talent étonnant pour la musique qu’elle joue à l’oreille , traduisant en mélodies les sons du quotidien. Malgré son état de domestique, elle s’intègre à la formation musicale des jeunes pensionnaires et étudie avec elles la musque baroque qui semble avoir leur préférence. Ce qui devait être un concert de musique religieuse destinée à s’attirer les bonnes grâces du pape prend rapidement des chemins de traverse.
J’ai personnellement apprécié la musique , les décors et les costumes. Ce drame est remarquablement servi par Gallea Bellugi (Teresa) , Carlotta Gamba ( Lucia).
Ce film italio-suisse sorti en juin 2024 en France, s’inscrit dans le même esprit du cinéma italien actuel, quoique dans des registres différents et qui célèbre l’émancipation des femmes trop souvent oubliées, face à l’intolérance de la société incarnée ici par la toute puissance de l’Église catholique. Ainsi « Il reste encore demain » (2023) de Paola Cortellesi et « La nouvelle femme » (2023) de Lea Todorov.
© Hervé GAUTIER
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Gloria
- Par ervian
- Le 09/09/2024
- Dans Cinéma italien
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N°1894 – Juin 2024.
Gloria – Un film de Margherita Vicario.
Pie VII vient d’être élu pape et va venir visiter le vieil orphelinat de jeunes filles de Sant’Ignazio à proximité de Venise. Elles y reçoivent une éducation musicale approfondie mais leur seul espoir d’émancipation est le mariage, évidemment arrangé. L’établissement est dirigé par un prêtre âgé, maître de chapelle, surnommé « Maestro », à qui le gouverneur demande une composition originale pour honorer la visite pontificale. Faute d’inspiration, l’ecclésiastique peine à honorer cette commande qui devra être exécutée par le petit orchestre à cordes des pensionnaires.
Teresa, humble servante anonyme et solitaire, est vouée dans cette institution aux tâches matérielles les plus humbles et personne ne connaît son histoire sordide. Rendue orpheline par la guerre, elle est placée chez le gouverneur qui la viole et se charge de l’éducation de son enfant dont elle est séparée. On lui intime l’ordre de ne parler à personne, ce qui lui vaut le surnom de « La muette ». Par hasard, dans une dépendance, elle découvre un piano et révèle un talent étonnant pour la musique qu’elle joue à l’oreille , traduisant en mélodies les sons du quotidien. Malgré son état de domestique, elle s’intègre à la formation musicale des jeunes pensionnaires et étudie avec elles la musque baroque qui semble avoir leur préférence. Ce qui devait être un concert de musique religieuse destinée à s’attirer les bonnes grâces du pape prend rapidement des chemins de traverse.
J’ai personnellement apprécié la musique , les décors et les costumes. Ce drame est remarquablement servi par Gallea Bellugi (Teresa) , Carlotta Gamba ( Lucia).
Ce film italio-suisse sorti en juin 2024 en France, s’inscrit dans le même esprit du cinéma italien actuel, quoique dans des registres différents et qui célèbre l’émancipation des femmes trop souvent oubliées, face à l’intolérance de la société incarnée ici par la toute puissance de l’Église catholique. Ainsi « Il reste encore demain » (2023) de Paola Cortellesi et « La nouvelle femme » (2023) de Lea Todorov.
© Hervé GAUTIER
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Le nom sur le mur
- Par ervian
- Le 09/09/2024
- Dans Hervé Le Tellier
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N°1928 – Septembre 2024.
Le nom sur le mur – Hervé Le Tellier – Gallimard.
A la recherche d’une maison en Provence, l’auteur, trouve une vieille bâtisse avec un nom inconnu gravé maladroitement sur le vieux crépis. C’est pour lui le début d’une quête qui le met en présence de quelques photos présentant un jeune homme d’une vingtaine d’années, André, mort en 1944 face aux Allemands et dont le nom figure sur le monument de la commune. Ces maigres reliques le montre enlaçant sagement une jeune fille, Simone, et attestent l’avenir qu’elles portent parce que ce qu’on demande avant tout à la vie c’est d’être heureux et qu’à cet âge tout est possible. Mais le destin qu’on ignore en a décidé autrement et la vie ne tient pas toutes les promesses auxquelles on fait semblant de croire. André tombera sous les balles ennemies, Simone se mariera plus tard avec un autre mais confiera à sa fille ces fragiles clichés parce que, si la vie continue, le papier glacé a conservé trace de ces moments heureux avec, pour ceux qui restent, un sentiment d’injustice et l’inévitable mais inutile sentiment de culpabilité.
L’auteur ne peut évoquer cette histoire intime sans la remettre dans son contexte historique de l’Occupation, de la guerre, de la Résistance et de la collaboration qui par ailleurs met en évidence le côté sombre de l’être humain ordinaire et en révèle les tristes facettes qu’on se dépêche d’oublier mais que des circonstances « exceptionnelles » suffisent à révéler. Il revient à son sujet à travers l’histoire d’André, destiné au STO eu égard à son âge et qui gagne le maquis. Son engagement patriotique lui sera fatal.
J’ai lu sans désemparer ce livre fort bien écrit non seulement parce qu’il est un témoignage d’autant plus émouvant qu’il est agrémenté de photographies, mais aussi parce qu’il fait revivre, l’espace de quelques dizaines de pages, la mémoire d’un de ceux, anonymes, qui sont morts pour que nous soyons libres. André figé dans la mort aura toujours vingt ans, ne connaîtra ni décrépitude de la vieillesse ni les nombreuses déceptions dont l’existence n’est pas avare. A titre personnel, j’apprécie qu’un écrivain profite de sa notoriété pour faire revivre la trace d’un de ces héros oubliés.
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Le bâtard de Nazareth
- Par ervian
- Le 07/09/2024
- Dans Metin Arditi
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N°1927 – Septembre 2024.
Le bâtard de Nazareth – Metin Arditi – Bernard Grasset.
Il y a l’Évangile qui notamment relate la conception divine de Jésus avec l’annonciation de l’ange Gabriel qui heurte à la fois le bon sens et la raison et ne peut être admis que par celui qui a la foi religieuse et la réalité beaucoup plus terre à terre d’une femme séduite hors mariage et qui met au monde en enfant naturel, un bâtard, un exclu, un mamzer, comme le sera sa propre mère. En revanche, que cet enfant soit plus intelligent, plus critique que les autres et mette en doute l’enseignement contraignant et culpabilisant du judaïsme, que cet homme tire de son dur métier de charpentier et de sa connaissance des plantes des gestes apaisants de guérisseur, qu’il ait été un professionnel sérieux et honnête, un homme respectueux des traditions mais aussi désireux de faire changer les choses, me paraît beaucoup plus crédible. Notre auteur insiste sur le paradoxe de Jésus qui à promis à son père, Joseph, de respecter la Loi juive et sa volonté de rapprocher les Juifs de leur religion, de la rendre moins doctrinale, moins ostracisée, plus humaine, plus respectueuse des femmes, sans pour autant créer une énième secte, ce qui serait, à ses yeux, une véritable trahison. Dès lors sa mission se révèle entre enseignement de tolérance, de pardon, d’amour du prochain et de guérisons et attire l’attention des foules et l’ire des rabbins. Pourtant sa connaissance de la loi et de l’histoire ébranle quelque peu ses juges après son arrestation.
Metin Arditi imagine la rencontre de Jésus et de Judas, un mamzer comme lui, attentif à son enseignement, subjugué autant par sa personne que par sa faconde et désireux de favoriser sa mission.
Ainsi l’auteur, écrivain francophone, redessine-t-il en de courts chapitres une vie de Jésus en bouleversant il est vrai un peu les choses, sans toutefois en changer l’épilogue, précisant aussi certains faits et interprétations. C’est en effet un roman, lu sans désemparer, parfaitement vraisemblable, agréablement écrit et en tout cas beaucoup plus passionnant que ce qu’on entend depuis longtemps entre l’eau bénite et l’encens. Il en profite, lui le séfarade, pour revisiter le judaïsme à travers l’enseignement de Jésus et de réhabiliter à sa manière le personnage de Judas, honni par le christianisme.
Ce fut pour moi un bon moment de lecture.
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Les gens d'à côté
- Par ervian
- Le 25/08/2024
- Dans Andre Téchiné
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N°1926 – Août 2024.
Les gens d’à côté – Un film d’André Téchiné (2024).
Lucie (Isabelle Huppert) est agent de police technique et scientifique, pas loin de la retraite. Elle sort d’un long séjour en psychiatrie suite au suicide de son compagnon, Slimane, également policier, qui vivait mal le malaise qui régnait dans sa profession. Sa hiérarchie ne souhaite pas qu’elle reprenne son poste mais elle insiste et obtient gain de cause. Elle habite donc seule dans un quartier pavillonnaire, dans le souvenir de cet homme qu’elle continue à aimer. Par hasard, un jeune couple emménage à côté de chez elle et elle se prend d’amitié pour eux, s’occupe de leur petite fille, Rose. Lui, Yan (Nahuel Perez Biscayart) est un artiste de talent un peu marginal et elle (Hafsia Herzi) est une professeure des écoles, débordée. Elle s’aperçoit que Yan est un activiste d’extrême- gauche, anti-flic et en délicatesse avec la justice. Elle s’attache quand même à eux et finit par aider Yan à échapper à une perquisition menée à son domicile et ainsi à entraver une instruction diligentée contre lui, trahissant ainsi son métier, ses fonctions de protection de la société, entravant le cours de la justice et la manifestation de la vérité.
Ce film m’a laissé perplexe. Certes, tout au long de sa carrière André Téchiné s’est toujours attaché aux problèmes de société et aux relations humaines mais ce film qui met en évidence l’humanisme et la tolérance qui bien souvent font défaut à nos sociétés, sonne faux. Que le hasard fasse partie de notre vie au point d’en modifier parfois le cours, cela je veux bien l’admettre. Quant à l’amitié, elle a bien souvent la solidité d’un château de cartes dans un courant d’air. Le talent d’Isabelle Huppert peine à soutenir ce scénario un peu trop manichéen, voire naïf. Peut-on, en effet, sacrifier son métier, sa raison de vivre, sa liberté au nom de l’amitié pour quelqu’un qui ne partage pas les mêmes valeurs que soi ? Les liens ainsi tissés autorisent-ils à violer la loi et à sacrifier ses propres engagements, sa propre vie ?
La voix off n’ajoute rien et je n’ai pas été convaincu non plus par par les relations posthumes que Lucie entretient avec le fantôme de Slimane. C’est donc un sentiment de déception qui domine.
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1527
- Par ervian
- Le 23/08/2024
- Dans Andrea Moneti
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1527 – Les lansquenets à Rome - Andrea Moneti – Stampa Alternativa.
C’est un roman historique qui se déroule à Rome en 1527.
L’armée de l’empereur Charles Quint de trente mille hommes saccage la Rome du pape Clément VII (Jules de Médicis). Parmi eux, ce sont donc douze mille mercenaires lansquenets luthériens, commandés par Charles de Bourbon qui, après la mort de ce dernier, envahissent la ville, y commentent des pillages et des destructions et le pape se réfugie au Château Sain-Ange où il est prisonnier. Les mercenaires qui ne sont plus payés et qui haïssent Clément VII pour des raisons religieuses, saccagent Rome.
Ce livre n’est pas seulement un roman, c’est aussi un livre d’histoire de cette époque ; de la guerre, de la ville cosmopolite romaine avec tous ses habitants, toutes ses cours, ses cardinaux innombrables, de la papauté, de l’Église corrompue, du scandale des indulgences, de l’hérésie de Martin Luther et de son succès. C’est, en fait un calendrier des années 1527-1528 avec des faits historiques nombreux et précis.
Il y a eu des vols, des destructions, des viols, des profanations ...partout la mort et la désolation. Puis ce fut la survenue de la peste et avec elle la famine et la chaleur de l’été. Bien sûr on ne manqua pas de proclamer que tout cela était a marque de la colère de Dieu et de Sa vengeance contres les hommes et on évoqua l’apocalypse de Saint Jean. Les palais du Vatican étaient déserts et la Chapelle Sixtine transformée en écurie.
Un capitaine des mercenaires, Heinrich, déplora toutes cette désolation et fut gravement blessé au cours d’un combat. Stefano, médecin à la cour du cardinal Della Valle, malgré tout ce qui les opposait, le sauva d’une mort certaine et sa fille, la belle Angelica, le soigna avec dévotion. Heinrich n’était pas un homme comme les autres, soudard et violent. Il était, certes un mercenaire qui vivait de la guerre mais il était surtout le fils d’un noble, petit propriétaire terrien, qui avait étudié à l’université, quelqu’un de valeur, sensible et un peu idéaliste. Il eurent ensemble des discussions sur Dieu, sur la guerre la vie, la mort, la religion, le pouvoir temporaire du pape, l’inquisition et naquit entre eux un amour authentique et partagé malgré leurs nombreuses différences. Durant les combats qui firent rage, Stefano disparut et Heinrich fit tout ce qu’il put pour le retrouver et le libérer de l’emprise des putes et leurs maquereaux, de la déception des combats, de l’analphabétisme des luthériens, malgré l’argent, la violence, les saccages, les trahisons, les blessures, la mort…
J’ai aimé ce livre historique, apparemment non traduit en français, cette histoire d’amour entre Angelica et Henrich, un mercenaire mais aussi un homme responsable qui prend conscience de la futilité de la guerre et abandonne ses soldats.
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Vous revoir
- Par ervian
- Le 11/08/2024
- Dans Marc LEVY
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N°1925 – Août 2024.
Vous revoir – Marc Levy – Robert Laffont.
Ce roman est la suite de « Et si c’était vrai », premier roman du même auteur, paru en 2000 et qui fut un immense succès. Dans ce livre c’est plutôt l’inverse, nous sommes à San Francisco quatre années plus tard. Elle, Lauren est toujours médecin et lui, Arthur, toujours architecte, sauf que cette fois, c‘est lui qui est dans le coma à la suite de complications neurologiques, conséquences d’un banal accident de la circulation mal soigné. Le hasard, qui fait bien plus souvent partie de notre vie que nous voulons bien l’admettre, fait que c’est Lauren qui examine Arthur sans toutefois le reconnaître, sans doute à cause des séquelles de son propre coma, il y a bien des années. C’est grâce à Paul, l’ami d’Arthur, que ce dernier se retrouve sous la responsabilité de Lauren après quelques péripéties administratives. Si on peut admettre que Lauren a une conscience professionnelle hors du commun, même au point de compromettre son internat et donc sa future carrière, je n’ai pas vraiment cru au transfert rocambolesque d’Arthur, dans le coma, d’un hôpital dans l’autre, pas non plus cette complicité qui naît avec les inspecteurs de police, pas non plus le fait qu’il ne s’est trouvé personne pour rappeler à Lauren qu’elle avait déjà croisé Arthur, Je sais que nous sommes dans une fiction qui admet même l’étrange dont notre auteur est friand, mais quand même. Les détails médicaux sont d’une grande précision, due sans doute aux praticiens consultés. Quant à l’amitié qui lit Paul et Arthur au point que ce dernier se métamorphose littéralement et encore plus l’amour qui renaît entre Arthur et Lauren, j’ai eu beaucoup de mal à y croire.
Cela fait quelques temps que j’explore l’univers créatif de Marc Levy. Ce cinquième roman n’en est qu’une étape supplémentaire. Je dois dire qu’il me laisse assez perplexe même si j’apprécie toujours autant son style fluide, surtout quand la poésie et parfois l’humour s’y invitent.
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Volpone
- Par ervian
- Le 09/08/2024
- Dans Stefan Zweig
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N°1924 – Août 2024.
Volpone – Stefan Zweig – Petite bibliothèque Payot.
Cette pièce de théâtre est une adaptation très libre faite par Stefan Zweig de la pièce éponyme du dramaturge anglais de la période élisabéthain Ben Jonson que l’auteur de « La confusion des sentiments » trouva si drôle qu’il décida de l’adapter. Ce travail lui pris une quinzaine de jours et fut un succès immédiat et mondial. En France l’adaptation en a été faite par Jules Romains C’est une pièce en trois actes et en prose de 1925.
Cette œuvre caractérisée par une certaine drôlerie contraste avec l’écriture volontiers sombre de notre auteur. Pourtant, sous les apparences d’une comédie, c’est en réalité une critique de l’avarice et de la cupidité dont l’espèce humaine est coutumière ce qui lui donne une étonnante actualité.
Les personnages portent des noms d’animaux ce qui définissent leur caractère, un peu dans l’esprit de la commedia dell’arte ainsi qu’il est noté en didascalie, un peu le contraire des fables de La Fontaine ou du roman de renard
Nous sommes à Venise au temps de la Renaissance et Volpone, un riche Levantin, commerçant et célibataire est en parfaite santé mais joue les mourants pour éprouver la foule des notables de son entourage qu’il est en réalité désireux d’escroquer. Il se fait offrir des cadeaux somptueux par eux, sous forme de richesse et même la vertu d’une épouse, en leur faisant miroiter qu’ils seront ses uniques héritiers. C’est à la fois la critique de l’avarice et de l’envie. Il est aidé en cela par son serviteur, Mosca, qui a bien profité des leçons de son maître et se révèle aussi madré que lui. Cette forme de mise en scène qui révèle des serviteurs bien souvent plus malin que leur maître, sera reprise par plusieurs auteurs de théâtre. De plus l’épilogue a quelque chose de morale même si, le choix un peu extraordinaire qu’a fait Zweig en écrivant cette pièce drôle révèle non seulement une critique de la société et de l’espèce humaine mais peut-être une critique de lui-même, aristocrate de l’esprit, héritier d’une riche famille, une façon de rire de lui. Il y a, certes l’importance de l’argent, de la manipulation et du mensonge mais le véritable héros est moins Volpone que Mosca, valet aussi pervers que son maître et qui finit même par le dépasser en le ruinant, mais qui rachète cependant toutes ses fautes.
Il m’apparaît cependant que malgré son aspect quelque peu comique qui entraîne son lecteur avec lui, cette comédie est « grinçante » dans la mesure où elle est un des reflets de la nature humaine. C’est d’ailleurs un des aspects caractéristique de l’écriture de Zweig que d’en être le témoin et le dénonciateur . Il est en effet difficile de ne pas voir dans le personnage de Volpone, désireux de s’approprier l’argent et la femme de ses concurrents, autre chose qu’une image pas très reluisante de l’homme. On peut cependant envisager la dernière scène comme une sorte de rachat.
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Belle enfant
- Par ervian
- Le 05/08/2024
- Dans Thierry Terrasson
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N°1923 – Août 2024.
Belle enfant – Un film de Thierry Terrasson (Jim) – 2024 .
Emily (Marine Bohin), une jeune femme un peu marginale et avide de liberté, apprend par l’une de ses sœurs, que sa mère, Rosalyne (Marisa Berenson) qui réside chez son oncle Remy(Albert Delpy) en Italie au bord de la mer, a fait une tentative de suicide. Elle fait donc le voyage depuis Paris pour la rencontrer. En réalité, cette tentative qui n’a jamais existé, n’était qu’un prétexte pour revoir , une dernière fois peut-être, ses trois filles, parties depuis longtemps pour échapper à cette famille dysfonctionnelle. Elle retrouve donc ses deux sœurs, Salomé (Caroline Bourg) et Cheyenne (Cybèle Villemagne) mais s’apercevant qu’elles sont de connivence, Emily se prépare à repartir pour la France. A Gène, elle rencontre un jeune Français, Gabin,(Baptiste Lecaplain), un amoureux éconduit à qui elle explique que sa mère, dépressive et mégalomane, n’en a jamais été vraiment une, et qui, entre drague et harcèlement, lui conseille de l’affronter pour exorciser les secrets de cette famille hors norme. Il participe d’ailleurs personnellement à ce processus dans un jeu de rôles efficace.
J’ai trouvé que Marine Bohin, dont c’est le premier long-métrage, campait son personnage avec justesse. entre colère et tendresse.
C’est un film classé dans la catégorie « comédie familiale ». Personnellement je l’ai plutôt abordé comme une œuvre dramatique émouvante et qui, à travers l’opposition traditionnelle mère-fille, remet en cause la figure maternelle classiquement considérée comme le pilier de la famille et qui apparaît ici sous un jour fondamentalement différent, ce qui n’a pas été sans influencer la vie d’adulte de ses trois filles. Je ne suis pas bien sûr cependant que cet épisode ait réussi à ressouder cette parentèle éparpillée, et ce malgré les efforts de cet oncle un peu perdu face à la réalité. Quoiqu’il en soit, c’est un film attachant dans la mesure où il accepte de regarder en face la réalité de la famille à laquelle on a bien trop souvent attaché une image d’Épinal idéale.
Thierry Terrasson (Jim) qui est surtout connu comme auteur de BD, signe ici son premier long-métrage qui est une réussite. Il est plein de belles images aux accents d’une chanson italienne de Pascal et Alexandre Ignelzi. Il joue, avec bonheur sur le registre de l’humour et de l’émotion.
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Autobiographie d'un étranger
- Par ervian
- Le 03/08/2024
- Dans Marc LEVY
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N°1922 – Août 2024.
Autobiographie d’un étranger– Marc Levy Robert – Atlande.
Depuis qu’il existe, le train est le lieu privilégié des conversations entre voyageurs, surtout lors des anciens parcours de nuit qui, plus que les autres, suscitaient les confidences. C’est là, dans le tangage des bogies et le huis clos d’un compartiment, que deux amis âgés se sont mis d’accord pour raconter la vie de l’autre dans deux livres différents et c’est donc le parcours cet inconnu que nous raconte le narrateur. Le paradoxe était que leurs deux existences n’avaient aucun intérêt, les intéressés étant de parfaits inconnus. La seule raison de cette expérience était peut-être de laisser une trace de leur passage sur terre pour leur parentèle. Une telle démarche peut paraître passionnante mais, quand on revient sur son passé et donc sur ses erreurs, on en sort rarement indemne !
Alterego, c’est le nom que choisit le narrateur pour évoquer cet ami, désormais retraité, à qui il prête une oreille attentive et dont il détaille l’enfance, les apprentissages, les rencontres parfois flétries par la mort, les amitiés, les amours, avec leurs silences, leurs mystères, leurs impasses… Cet homme qui reste anonyme, présente son parcours professionnel comme une réussite, un peu bousculée sur la fin, tout en mentionnant la rencontre de personnages importants du monde de la politique et de la culture, mais ce qui est notable c’est sa fascination pour la beauté des femmes et toutes celles qu’il a tenues dans ses bras ou qui ont fréquenté son lit avaient la distinction que confère un certain âge où la fraîcheur de la jeunesse. Le narrateur, en parfait scribe de ce qu’il entend, le présente comme un séducteur et, par-delà les mots, il m’apparaît comme un homme qui ne peut résister à l’attrait d’une jolie femme, mais aussi qui n’admet pas que l’une d’elles lui résiste. J’observe d’ailleurs que pour un homme ce sujet est bien souvent une occasion de se mettre en valeur pour son interlocuteur et de se vanter, lui donnant à penser que ses succès féminins sont nombreux. C’est une manière d’établir sa virilité et bien entendu son charme d’autant plus ravageur qu’il pratiquait ses aventures avec des femmes mariées, parfois concomitamment avec d’autres partenaires. Je l’imagine d’ailleurs bien, distillant cette liste sucrée avec des mots suffisamment évocateurs pour donner l’impression au narrateur d’être un authentique Don Juan qui a quand même gardé de chacune d’elles un souvenir assez précis pour ainsi, après toutes ces années, être capable d’en évoquer le souvenir passionné. A ses dires, il a vécu ses aventures passionnément mais elles se sont interrompues souvent avant que l’amour ne se transforme en conflit dévastateur et pourrisse ainsi le souvenir. Les femmes qui se sont succédé dans son lit, y ont laissé l’empreinte de leur corps et la fragrance de leur parfum, n’ont été pour lui qu’une simple étape et il est permis de penser que c’est lui qui y a mis fin, simplement pour passer à une autre. Ces liaisons se sont muées parfois en amitié durable, c’est à tout le moins ce qu’il prétend ; je veux bien accepter cette éventualité, sans vraiment y croire et ce malgré tout ce qu’on peut dire sur ce sujet. Les tentatives de vie commune ont semblé au contraire s’être heurtées à une impossibilité provoquée par lui pour éviter que soit menacé son équilibre personnel, un peu comme si son destin d’amant perpétuel s’opposait à une vie maritale rangée si éloignée du nomadisme amoureux qu’il avait longtemps pratiqué. C’était une sorte de paradoxe un peu comme si, l’âge venant, il souhaitait tourner la page du « donnaiollo »(délicieuses expression italienne pouvant signifier « homme à femmes » en français) qu’il avait toujours été, mais qu’inconsciemment il refusait cette option tout en en portant la cicatrice. La vie de couple implique, pour durer, franchise, confiance et fidélité réciproques ce qui n’a rien à voir avec une passade, toute passionnée soit-elle, de sorte qu’il est resté célibataire sans enfant, surtout désireux d’une certaine juvénilité chez ses partenaires séduites selon lui par sa maturité. On est loin d’une passion romantique.
Une telle posture ne peut, à terme, qu’impliquer une solitude devenant de plus en plus pesante avec les années. L’épilogue m’a, sur ce point, paru révélateur.
Le narrateur est ainsi le témoin du parcours de cet étranger, le simple tabellion de ce qu’il entend, sans objecter quoi que ce soit, sans émettre le moindre jugement ni même le moindre doute. Parfois cependant il risque un petit commentaire personnel sur une personnalité rencontrée ou sur un auteur dont Alterego et lui partageaient de l’intérêt. Je me suis demandé si, comme on le dit, la parole est libératrice et si cet ami, à la fin de son récit s’est senti libéré ? A tout le moins a-t-il pu prendre conscience des cahots de ce parcours. Je ne suis qu’un simple lecteur mais j’ai ressenti une impression prégnante d’avoir affaire à un homme suffisant, imbu de lui-même.
Pour cette fois Marc Levy quitte son domaine de prédilection qu’est le merveilleux encore que je ne suis pas sûr que ces quelques pas dans le domaine de la séduction ne puissent pas tout simplement être du domaine du fantasme. Ces confidences échangées avec le narrateur ont un goût de bilan au résultat mitigé même s’il choisit unilatéralement de ne se souvenir que des plus agréables.
Le prétexte de ce roman était la vie de l’autre racontée par le narrateur. Le livre refermé, il est permis de se demander ce que donnerait la rédaction de cet ami. Pour moi, je crois que Je serais assez curieux de ce travail. Cela donnerait, une autobiographie d’un autre étranger à découvrir sous la plume de Marc Levy. Je suis en effet, depuis quelques temps, son univers créatif, sans toujours en partager le cheminement. En revanche ce que j’apprécie chez lui depuis le début c’est la fluidité de son style, la pratique de notre belle langue française, sa précision autant que ses nuances et ses subtilités. Il n’est pas un de ces écrivains qui emploient à dessein des formules absconses mais au contraire s’exprime simplement pour être compris. C’est élémentaire sans doute mais, à mes yeux, cela m’a toujours paru essentiel pour un auteur. Le lire est toujours pour moi un plaisir.
Ce récit quelque peu dithyrambique où Alterego veut surtout passer pour irrésistible, est plein ce détails sucrés et sensuels où la jouissance des instants intimes partagés est particulièrement bien évoquée par le style toujours aussi fluide et attachant de Marc Levy
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Où es-tu?
- Par ervian
- Le 01/08/2024
- Dans Marc LEVY
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N°1921 – Août 2024.
Où es-tu ?– Marc Levy Robert Laffont.
C’est un drôle de couple que forment Susan et Philip. Dans la folie de l’adolescence, ils s’étaient promis de s’aimer pour la vie, mais, comme souvent, celle-ci les a séparés puisque quelques années plus tard Susan a choisi l’humanitaire en Amérique centrale et Philip une carrière plus traditionnelle de dessinateur à Manhattan. Loin en permanence l’un de l’autre, ils ne sont unis que par les lettres qu’ils s’envoient régulièrement, une médaille dorée en forme de porte-bonheur censée protéger Susan du danger et des rendez-vous furtifs à l’aéroport de Newark. C’est sans compter sur le hasard : Pour Susan ce sont des passades sans avenir et la poursuite de son idéal et pour Philip, en plus de la réussite professionnelle, c’est une vie plus traditionnelle, mais un événement va bouleverser sa vie.
Marc Levy reprend son obsessionnelle habitude de la fable non pas tant parce que Susan, tuée par un ouragan, anticipe la date de son décès, ce qui déjà assez improbable, mais c’est plutôt la situation qui m’interpelle. Nous sommes en présence du respect de la parole donnée par-delà la mort et Philip accepte de remettre sa propre vie en question pour cela puisqu’il adopte Lisa, la fille de Susan, née d’un père inconnu uruguayen, en l’intégrant à sa propre famille. Il se comporte avec elle comme un père, malgré l’attitude négative de l’enfant au début. Il l’impose au reste de sa famille en signifiant ainsi à son épouse, Mary, qu’il n’a jamais oublié Susan et continuera d’aimer un fantôme à travers les traits de sa fille, ce qui ajoute de l’ambiguïté à cette situation. Je n’ai jamais cru au grand amour qui en principe règne dans les couples et les fait durer puisque le divorce vient de plus en plus les interrompre, quant à ceux qui perdurent, il ne faut pas se faire beaucoup d’illusions sur les raisons de leur longévité. Je ne crois donc pas à l’amour qui lie Susan et Philip. Leur histoire est surréaliste et n’a rien à voir avec le sexe qui est généralement attaché à une telle relation. Il n’y a jamais eu entre eux la moindre étreinte et j’ai du mal à croire à cet attachement réciproque alors que chacun des deux vit sa vie et ne fait un pas vers l’autre. En revanche celui qui lie Philip à Mary me semble plus traditionnel et Lisa vient, par sa seule présence et un peu malgré elle, le consolider. Mary fait ce qu’elle peut pour aimer Lisa comme une mère, jusqu’à l’aider à exorciser son obsession des ouragans.
Je sais que nous sommes dans une fiction et que le roman autorise la rêverie et les situations les plus extravagantes mais quand même, la fin ne m’a pas convaincu, notamment l’attitude de Susan par rapport à sa fille, quelles que soient les raisons qu’elle ait pu invoquer pour la justifier. Je concède cependant que le texte, adroitement mené et fort bien écrit avec cette habituelle écriture fluide et agréable à lire, s’attache son lecteur jusqu’à la fin.
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Sept jours pour une éternité
- Par ervian
- Le 28/07/2024
- Dans Marc LEVY
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N°1920 – Juillet 2024.
Sept Jours pour une éternité – Marc Levy Robert Laffont.
Dans ce roman, Dieu et Lucifer, deux ennemis héréditaires, se sont lancé un défi. Qui des deux gagnera dans la société des hommes ? Puisqu’ils ne peuvent se battre l’un contre l’autre directement, ils se choisissent un champion, l’incarnation du Bien sera la jolie Zofia chargée de la sécurité sur les docks de San Francisco et surtout bienveillante, le Mal sera représenté par Lucas, beau lui aussi, travaillant sans aucun scrupule dans une grande entreprise, mais pas vraiment fréquentable, tant il ressemble à son maître
Évidemment Zofia et Luca se rencontrent et tombent amoureux l’un de l’autre, mais savent aussi qu’ils n’ont que sept jours pour rester ensemble à moins qu’un compromis soit possible entre eux, c’est à dire que Zofia accepte de faire le mal ou Lucas adopte le bien. Cela paraît être un challenge perdu d’avance, surtout s’agissant de l’espèce humaine. Effectivement on ne change pas quand on est aussi radicalement différent et vivre ensemble est difficile quand on ne se ressemble pas. Ce roman m’a paru un peu trop manichéen, un peu trop naïf aussi, la distribution des rôles entre un homme et une femme me parait assez arbitraire et pour tout dire surréaliste, comme si les choses étaient aussi simples et que la méchanceté, et pire encore, était seulement un apanage masculin. Je veux bien faire semblant de croire que l‘amour triomphe de tout mais l’observation, même superficielle, de la société humaine en général et des couples en particulier, ne m’incite guère à adhérer à cette idée reçue. La fin me paraît un peu trop idyllique et je n’ai jamais vraiment cru que tout soit pour le mieux dans le meilleur des mondes.
Ce roman m’a paru assez lent, superficiel, avec des longueurs mais surtout pas vraiment convainquant. Je retiens cependant dans cette fable philosophique et qui se veut biblique la qualité de l’écriture, comme toujours agréable à lire
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Toutes ces choses qu'on ne s'est pas dites
- Par ervian
- Le 26/07/2024
- Dans Marc LEVY
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N°1919 – Juillet 2024.
Toutes ces choses qu’on ne s’est pas dites – Marc Levy Robert Laffont.
Julia, une infographiste new-yorkaise, va se marier. Elle vient d’être informée par un coup de téléphone que Anthony Walsh n’assistera pas à la cérémonie. Cela ne l’étonne guère , il a toujours un père distant voire absent, mais là c’est un peu différent, il vient de mourir. Enterrer son père puis se marier dans la foulée c’est évidemment un peu compliqué. Ce qui l’est encore plus c’est le cadeau qu’il lui fait, sans doute pour rattraper tout ce temps perdu pendant lequel ils ne se sont pas parlé, un androïde à son image, plus vrai que nature, avec sa propre mémoire, ses sentiments et ses regrets. Mais limité à six jours seulement et pour rattraper toutes ces années perdues ça risque d’être un peu juste. Toute cette redécouverte de son père ne va pas sans péripéties, sans souvenirs décalés, sans remarques acerbes et tentatives de justifications, sans regrets et sans remords, avec l’inévitable premier amour qu’on n’oublie jamais au point de chercher à le retrouver vingt ans après, pour une dernière rencontre, même si elle doit hypothéquer son propre mariage. Cette folie met en lumière la fuite inexorable du temps, les changements dans nos vies, les mensonges qu’on peut entretenir…
Marc Levy renoue ici avec la science-fiction qu’il semble affectionner, même si nous pouvons imaginer cela maintenant sous le nouveau vocable d’intelligence artificielle. La chose paraît en effet impossible, surtout en 2008, date de la parution du livre, même si nous sommes en pleine fiction, ce roman me semble illustrer une chose bien humaine et qui nous touche tous . Nous passons notre temps à croiser des gens maintenant disparus, dans notre famille ou ailleurs, et inévitablement nous regrettons, parce qu’ils ne sont plus là et qu’il est trop tard, tout ce que nous leur avons dit ou ce que nous n’avons pas eu le temps de leur dire. Ce retour de Julia sur son passé, la découverte de son père ne se font pas sans nostalgie, avec cette constante référence à la mort et ressemble à un exorcisme, l’illustration que notre passage sur terre n’est pas aussi simple que nous l’avions imaginé, que les destin doit bien exister qui fait de nous ce qu’il veut. Je sais que nous sommes dans une fiction mais le « happy end » me paraît un peu surfait, simplement parce ça n’existe pas ainsi dans la vraie vie, malheureusement !
J’apprécie toujours le style fluide et agréable de Marc Levy. Même si cette histoire est surréaliste, il tient en haleine son lecteur jusqu’à la fin et je ne me suis pas ennuyé malgré ces plus de 400 pages. Ce fut comme toujours un bon moment de lecture
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Le voleur d'ombres
- Par ervian
- Le 23/07/2024
- Dans Marc LEVY
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N°1918 – Juillet 2024.
Le voleur d’ombres – Marc Levy Robert Laffont.
Décidément Marc Levy aime bien les monde parallèles. Le narrateur, un petit garçon de 6° découvre qu’il peut s’ approprier les ombres de ceux qu’il rencontre et ainsi tout connaître de leur vie. Son ombre elle-même à la quelle il parle lui révèle des choses qu’il ignorait sur lui-même, sur son passé. C’est un pouvoir bien encombrant et un secret difficile à garder. Cette particularité en fait un être à part qui l’incite à être bon avec les autres.
Cette histoire un peu trop idyllique au départ m’a paru une jolie fable mais quand le narrateur a grandi, ce pouvoir est complètement oublié et ça s’est transformé en un récit de sa vie, de ses amitiés, de ses amours, de son métier de médecin, avec toute la nostalgie que cette évocation suppose, avec, évidemment des petits moments à la fois merveilleux et inattendus comme ceux qu’on ne rencontre que dans les romans, histoire de me rappeler mon impression du début, avec aussi des événements qui font la vie, tout simplement.
C’est bien écrit, ça a retenu mon attention jusqu’à la fin, même si elle était un peu attendue quand même.
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La prochaine fois
- Par ervian
- Le 19/07/2024
- Dans Marc LEVY
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N°1917 – Juillet 2024.
La prochaine fois – Marc Levy Robert Laffont.
Jonathan a consacré une grande partie de sa vie d’expert à l’œuvre de Vladimir Radskin, un peintre russe du XIX° siècle . Il est à la recherche de son ultime tableau que personne n’a jamais vu. Il doit se rendre de Boston à Londres où sera organisée une vente, pour expertiser les tableaux de Radskin dont le dernier, à la demande de son ami Peter, commissaire-priseur qui l’accompagne et qui est l’ organisateur de la vente chez Christie’s.
Jonathan va se marier avec Anna, une ravissante artiste peintre mais dans sa poursuite de l’ultime tableau de son peintre préféré, il croise Clara, directrice de galerie londonienne au charme de qui il n’est pas insensible. Leurs deux histoires d’amour croisées menaçaient d’être d’un ennuyeux ordinaire mais l’originalité de cette fiction est venue du saut dans le passé, même si je ne suis pas bien sûr d’avoir cru vraiment à cette histoire de réincarnation.Les péripéties à propos de l’authentification du tableau du peintre russe tiennent du roman policier.
C’est agréablement écrite et procure une lecture facile, mais j’ai été un peu déçu par ce 4° roman de Marc Levy
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Une sacrée bonne femme
- Par ervian
- Le 17/07/2024
- Dans Florence Asie
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N°1916 – Juillet 2024.
Une sacrée bonne femme – Florence Asie- Gallimard.
Je continue d’explorer l’univers créatif de Florence Asie, de son vrai nom Henriette Lafarge-Saget (1910,-2012) Ce roman, rédigé à la première personne, ressemble à l’auteure dont on sait par ailleurs peu de choses sinon qu’elle écrivit des romans, dont celui-ci, le dernier, paru en 1975, publiés chez Gallimard, grâce à l’appui de Simone de Beauvoir Elle se dit « bâtarde du monde » et cette bâtardise semble être une obsession et nombre de précisions présentes dans « fascination », un autre de ses romans, se retrouvent dans celui-ci. La sacrée bonne femme ,c’est sans doute elle., mais il est difficile de faire la part de l’autobiographie et de la fiction.
Elle raconte une jeunesse mouvementée, auprès d’une mère tyrannique, ses amours avec un homme marié qui s’est tué au volant de sa voiture. Dès lors, la mort fut longtemps son obsession, jusqu’au suicide…manqué. Puis vient une longue aventure avec un gitan ; Celui-ci disparu, elle se retrouve héritière d’une maison close assez particulière, peuplée de pensionnaires masculins, destinés aux femmes ! Le livre refermé, j’ai le sentiment d’une grande solitude. Le style est brut, haché, sans aucune recherche. Je me suis même un peu ennuyé
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Fascination
- Par ervian
- Le 17/07/2024
- Dans Florence Asie
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N°1915 – Juillet 2024.
Fascination – Florence Asie- Gallimard.
L’exploration de mes archives personnelles m’a remis en mémoire le nom de Florence Asie (1910-2012), de son vrai nom Henriette Lafarge-Saget née à Mauzé sur le Mignon (79). Elle justifie non sans humour son pseudonyme, Florence parce que c’est joli et Asie à cause de sa « binette » asiatique. Elle était employée des postes puis « demoiselle du téléphone ». Étrange destin littéraire de cette jeune femme, installée à Rouen après son mariage qui écrivit à Simone de Beauvoir pour lui dire son admiration, laquelle lui proposa de lire ses manuscrits dont cinq sur les sept qu’elle publia le furent, grâce à son appui, chez Gallimard. Elle dédicacera à celle « qui lui a fait la courte échelle » ce roman, paru en 1966 Elle était également l’auteure de poèmes. Ce roman évoque la vie de Marion dans un petit village des Deux-Sèvres, une « enfant de l’amour », une gamine de 13 ans qui est fascinée par le monde des adultes, veut croquer les plaisirs de l’existence, surtout dans leur version érotique, qui vit dans un monde dont elle tisse le décor, s’invente une vie entre la réalité et la fiction, entre fréquentation de l’église, du couvent, des maisons du village, des belles demeures et de la nature, tout cela pour meubler son ennui et son imagination est débordante. Entre naïveté et perversion, cette petite fille, un peu trop mûre pour son âge sans doute, a hâte de connaître la vie des adultes avec leur univers, leurs amours, leurs mystères leurs perversions aussi et , bouscule la réalité, la transformant parfois en drames, entre mystifications et jalousie, notamment dans le but de grandir vite et d’attirer l’attention sur elle et peut-être d’être tout simplement aimée et aussi d’être autre chose aux yeux du monde qu’une petite fille à la filiation contestée, ce qui, à l’époque était tabou. Je note que cette bâtardise revient sous la plume de l’auteur comme un leitmotiv , comme une sorte d’obsession. Son histoire parait à la fois idyllique et tragique pleine d’appétit pour l’amour , de craintes pour l’avenir, de folies , de chagrins, de quête du bonheur, d’hésitations, de culpabilisations et de fascination pour la mort.. Florence Asie ne laissa pas indifférent. On célébra « son style nerveux, entraînant, piqueté d’images inattendues », on ne manqua pas de la critiquer, de dénoncer son peu de culture. Je ne sais si ce roman fut un succès de librairie mais ce que je retiens c’est le parcours de cette femme et le geste de Simone de Beauvoir. En tout cas, en qualité d’ancienne postière on peut au moins dire d’elle qu’elle était une femme de lettres !
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Bella figura
- Par ervian
- Le 15/07/2024
- Dans Yasmina Reza
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N°1914 – Juillet 2024.
Bella figura– Yasmina Reza – Flammarion.
Andréa , mère célibataire et Boris, marié par ailleurs sont amants. Ils s’engueulent sur le parking d’un restaurant comme s’ils étaient mariés ensemble, à cause des bourdes de Boris, mais il est perturbé par une prochaine liquidation de son entreprise et apprend qu’elle a passé la nuit avec un de ses collègues. Un départ précipité provoque un accident mineur d’une dame âgée, Yvonne et ils se retrouvent cinq, avec Eric et Françoise, à parler et à trinquer à cause de l’anniversaire de la vieille dame, la mère d’Eric. On passe facilement d’un sujet à un autre, avec une foule de détails anodins et intéressants agrémentés de nombreux flottements dans les dialogues de sorte qu’on ne sait plus vraiment où on en est. Il n’y a pas que cette soirée et ses protagonistes qui sont déréglés. Ici aussi, il est question de la quête du bonheur, mais rien ne va plus entre Boris et Andrea et le couple Eric et Françoise ne vaut guère mieux. Quant à Yvonne, elle regrette sa jeunesse, parle de ses médicaments et de son sac... Pour corser le tout il semble que Françoise connaisse l’épouse de Boris et Andréa l’autorise à lui parler de cette soirée. En réalité une sorte d’incompréhension s’installe entre eux, avec , en contre-point, la solitude, une violence rentrée, la santé et le vieillissement d’Yvonne et sa future mort. Dans ces conditions faire « bella figura » relève de l’exploit. Je n’ai fait que lire cette pièce mais il me semble que si je l’avais vue au théâtre, j’aurais peut-être eu une approche plus favorable, la mise en scène sauvant parfois les dialogues. Je reconnais que cette pièces met en évidence des relations difficiles entre les gens qui pourtant devraient s’entendre.
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Heureux les heureux
- Par ervian
- Le 15/07/2024
- Dans Yasmina Reza
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N°1913 – Juillet 2024.
Heureux les heureux– Yasmina Reza – Flammarion.
C’est une suite de nouvelles dont le titre est emprunté à une citation de Borges. L’auteure met en scène 18 personnages qui ont en commun des liens familiaux, amicaux ou extra-conjugaux. Ce sont des gens ordinaires dans leur vie quotidienne et Yasmina Reza choisit, entre humour et causticité, de parler de leurs angoisses, de leurs obsessions, de leurs fantasmes, de leurs phobies , de leurs mystères, de leurs erreurs, de leur solitude. Le titre en forme de « béatitudes » évangélistes sonne pour moi autant comme une quête légitime du bonheur que comme un paradoxe puisque, parmi tous ces hommes et ces femmes je n’en ai pas vu beaucoup qui sont heureux, entre les couples qui se supportent et qui se déchirent et pour qui l’amour n’est plus qu’un vieux souvenir, ceux qui ont recours à un psychiatre, ceux qui vivent dans un monde parallèle, ceux qui préfèrent chercher ailleurs ce qu’ils ont peut-être chez eux, ceux qui sont tellement transparents qu’ils s’imaginent être le centre du monde... Le livre refermé, il m’apparaît que le bonheur est une chose qu’on poursuit et qui se révèle impossible à atteindre parce que notre parcours ici-bas est semés d’embûches, d’obligations, d’illusions sur un avenir incertain et surtout fantasmé. Après les certitudes qu’on se tisse soi-même pour l’avenir viennent les prises de conscience de nos contradictions, de nos fourvoiements que nous avons longtemps entretenus, parfois inconsciemment, , de nos exaltations d’un instant, de nos passades, de nos hypocrisies, de nos fuites, de nos erreurs, de notre bonne conscience, de notre fatalisme face aux échecs. Ce sont autant de morceaux de vie qu’on pourrait imaginer fictifs puisqu’ils s’inscrivent dans un roman par essence imaginaire, mais qui ont quelque chose de familier, qui ressemblent étonnamment à notre parcours à tous, dans le travail, la famille, le couple… Au bout du compte il y a le temps qui passe, inexorable avec la vieillesse, la laideur, les douleurs , l’abandon, les souvenirs et la mort parce que c’est notre condition. ... La mort est un thème récurrent chez Yasmina Reza et ce recueil ne fait pas exception avec ces nombreuses allusions aux cercueils, aux pierres tombales, à l’incinération, à la dispersion des cendres. La vraie vie quoi !. Le style est brut, haché, sans fioritures littéraires.
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Hammerklavier
- Par ervian
- Le 13/07/2024
- Dans Yasmina Reza
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N°1911(1)– Juillet 2024.
N°1911– Juillet 2024.
Hammerklavier – Yasmina Reza – Albin Michel.
Ce sont des souvenirs personnels un peu disparates que l’auteure choisit d’évoquer ici, celui de son père jouant l’adagio d’Hammerklavier mais aussi de son amie Marta. Ils sont morts et elle échange avec eux des propos post mortem sur la fuite inexorable du temps qui ravage toutes les choses humaines, transitoires et fragiles, sur le goût qu’on peut avoir pour la vie, pour les livres qui en retiennent la trace et la mémoire mais en soulignent aussi la perte. Il y a une sorte d’obsession pour cette vie au point de vouloir la faire perdurer par delà la mort, comme les religions, avec leurs rituels, leurs interdits et leurs dogmes tentent de nous le faire croire. Cette chimère de la continuation de la vie par delà la mort est légitimée par les moments de joie qu’elle nous procure même si nous gommons volontairement les autres par cette volonté irraisonnée de faire échec au trépas le plus longtemps possible, même si nous faisons semblant de déguiser notre nostalgie avec un décor artificiel, même si notre quotidien s’impose à nous et si le vieillissement joue contre nous, est synonyme d’abandon, de solitude. Il y a une peur de la mort qui nous frappe quand nous y attendons le moins, une phobie de l’au-delà et de son mystère, une obsession du temps qui passe parce qu’il est notre ennemi. Il nous mène vers notre disparition sans que nous y puissions rien. Que nous l’acceptions ou la redoutions, elle est notre terme et ce malgré notre attachement que nous pouvons avoir pour l ‘existence. L’auteure est une femme de lettres mais elle n’ignore pas que la notoriété dont elle jouit de son vivant ne résistera pas longtemps face au temps qui passe parce que l’espèce humaine est amnésique. Elle a des remarque sur l’écriture, l’art et la culture qui me laissent perplexe comme beaucoup de ses livres.
Nous ne faisons qu’un bref passage sur terre, le plus souvent anonyme malgré nos complexes de supériorité, notre sens de la logique, la part sombre de nous-mêmes, notre volonté de paraître et d’aimer...Je retire de cette lecture une impression pesante.
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Babylone
- Par ervian
- Le 11/07/2024
- Dans Yasmina Reza
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La Feuille Volante n° 1149
BABYLONE – Yasmina Reza – Flammarion.
Nous sommes dans un petit appartement parisien où Élisabeth, la narratrice vit avec Pierre. Ils sont tous deux âgés de soixante ans Élisabeth se souvient qu'ils avaient invité leurs amis pour une « fête de printemps » et y avaient aussi convié leurs voisins du dessus. Ils sont quelque chose d'intéressant, Lydie surtout avec ses faux-airs de diseuse de bonne aventure, vaguement thérapeute, axée sur « le bio » et la cause animale, quant à Jean-Lino, il attire l'attention d’Élisabeth par sa gentillesse extrême surtout qu'il cherche vainement à se faire aimer du petit-fils de Lydie, Rémi, qui n'est pas le sien mais qui est avant tout un sale gosse. Il fait ce qu'il peut mais en face l'enfant n'en a cure et n'en fait qu'à sa tête. La soirée a été arrosée et aussi superficielle et inintéressante que toutes celles du même genre où chacun prend un air inspiré pour agiter les grandes idées le plus souvent creuses et qui n'intéressent personnes mais dont chacun se croit obligé de rajouter une note personnelle pour donner l'impression qu'il s'est déjà penché sur la question et ainsi se mettre en valeur... Sauf que, après les libations de rigueur chacun rentre chez soi, mais Jean-Lino dans la nuit réveille ses voisins. Il vient d'étrangler Lydie ! Tel est le point de départ de ce livre qui oscille entre roman traditionnel sur le thème de la satire sociale et polar. Est-ce un coup de folie où l'alcool a sa part, ou la conséquence d'un banal malentendu ordinaire à l'intérieur d'un couple ? Passé un certain âge, il est difficile de se supporter et immanquablement, à propos de rien, resurgissent les petits mensonges et les grandes trahisons, symbolisés par les nombreux analepses, qui émaillent la vie d'un couple. Tout au long d'une vie commune les avanies s’accumulent, on fait semblant de les avoir oubliées, voire pardonnées mais en réalité il n'en est rien et elle s'incrustent dans la mémoire bien plus aisément et définitivement que les moments heureux. Je suis assez réservé sur l'affirmation qui consiste à dire que le hasard favorise la rencontre d'êtres qui sont « faits l'un pour l'autre » et qui s'unissent parce que cela se fait, qu'ils croient s'aimer où qu'ils redoutent la solitude. C'est pourtant elle qui s'installe dans le couple, d'autant plus difficile à vivre qu'elle bouscule secrètement les apparences et chacun, face à elle, se construit son univers personnel. Cette variation sur la solitude qu'on finit par appeler de ses vœux après tant d'années de vie commune sans oser se l'avouer à soi-même est pourtant présentée comme un fléau, quelque chose qu'on doit impérativement éviter, comme un véritable tabou. La séquence qui suit la mort de Lydie et qui met en scène la narratrice et Jean-Lino est démesurément longue et les digressions qui suivent insistent sur la fuite du temps.
Le titre évoque cette ville de Mésopotamie où les Juifs ont été exilés. Jean-Lino est juif mais ce détail qui aurait sans doute pu être développé me paraît avoir été abandonné. Je choisis de voir dans ce roman une évocation de la solitude personnelle qui confine à l'exil dans la société. Cela me paraît être souligné notamment par la cohabitation difficile entre lui et Rémi que sa grand-mère soutient systématiquement, ce qui contribue largement à envenimer la situation mais aussi par les différentes anecdotes qui parsèment ce récit.
J'ai eu beaucoup de mal à entrer dans ce roman où l'intrigue est mince et où les personnages m'ont paru manquer de consistance. C'est certes une peinture assez juste des relations difficiles entre un homme et une femme âgés et de la fuite du temps. Je l'ai choisi peut-être à cause du Prix Renaudot qui l'a récompensé en 2016 mais je n'ai guère été emballé par cette œuvre notamment à cause du style qui m'a paru bien quelconque et sans véritable recherche. Je ne suis qu'un simple lecteur mais l'attribution à ce roman d'un prix littéraire aussi prestigieux me laisse assez dubitatif.
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Anne-Marie la beauté
- Par ervian
- Le 09/07/2024
- Dans Yasmina Reza
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N°1910– Juillet 2024.
Anne-Marie la beauté – Yasmina Reza – Flammarion.
C’est un long monologue avec des phrases décousues, sans suite, l’une évoquant l’autre avec même des détails inutiles, pleines de nostalgie, de remords et d’amertume que tient Anne-Marie, cette ancienne actrice de théâtre qui n’a jamais réussi dans son art que pourtant elle aimait. Toujours des petits rôles dans l’ombre des « têtes d’affiche » pleins de suffisance et d’orgueil. Elle a beau se remémorer son parcours, ses rôles sur les planches, elle est toujours restée en retrait, loin de la lumière des projecteurs. Même son mariage ne lui a pas apporté le bonheur si ardemment voulu et l’épanouissement personnel qu’elle souhaitait légitimement pour elle est resté lettre morte. Son enfance banale, sa famille qui n’a pas cru en elle, les hommes qu’elle a aimés lui ont laissé un souvenir douloureux. Le rêve lentement tissé lui a échappé malgré elle, malgré sa fascination pour la Capitale, malgré l’aura de ceux qui ont réussi et qu’elle a croisés. Elle n’a simplement pas été chanceuse !
Sa fin de vie est triste mais celle des autres qu’elle a croisés et qui un temps ont connu le succès éphémère n’est pas moins vouée à la solitude, à l’abandon parce ce milieu est sans pitié et amnésique. Il n’y a pas de quoi l’apaiser même si leur sort n’est pas meilleur que le sien. Au moins eux ont connu le succès et peuvent peut-être s’en satisfaire. Celle qui n’a été qu’une femme banale et sans grande beauté dresse ce bilan désespéré plein de nostalgie de sa vie. Yasmina Reza a dû, dans son métier, connaître ce genre de destin manqué et que la mort a emporté. Elle en rend compte dans ce qui n’est sûrement pas une fiction mais bien plutôt un témoignage et je me suis dit que cela est aisément transposable à de nombre d’entre nous, Nous avons tous les rêves avortés, des tentatives non couronnées de succès et qui parfois sont gênées par d’autres, désireux de vous éliminer pour prendre votre place. Nous sommes tous mortels et l’espèce humaine est aussi oublieuse après la mort d’un être qu’elle a été cruelle et hypocrite de son vivant. J’aime qu’un auteur s’empare de ce sujet au relent d’échec parce que cela fait simplement partie de la vie et qu’on juge trop souvent la valeur de quelqu’un sur ses seuls succès.
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Hommes qui ne savent pas être aimés
- Par ervian
- Le 07/07/2024
- Dans Yasmina Reza
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N°1909– Juillet 2024.
Hommes qui ne savent pas être aimés – Yasmina Reza – Albin Michel.
Adam, la cinquantaine, est un écrivain qui n’a jamais vraiment connu le succès ou, pour dire les choses plus crûment, c’est un écrivain raté, qui vit très mal cet échec. Il a des états d’âme au sujet de son dernier livre. Il est aussi en crise avec sa femme qui, après avoir soutenu ses tentatives littéraires, ne l’aime plus et parce que son mariage n’est pas vraiment une réussite, et comme si cela ne suffisait pas on vient de lui diagnostiquer un glaucome qui affecte un de ses yeux et pire peut-être. Tout cela n’arrange pas son hypocondrie naturelle qu’il combat en allant méditer, en ce jour, au jardin des Plantes. Il y rencontre par hasard Marie-Thérèse, une copine de lycée célibataire qu’il n’avait pas revue depuis trente ans. Elle est représentante en objets publicitaires, n’a rien de commun avec Adam. Elle ne sait même pas qu’il est devenu écrivain ce qui accentue son mal-être .Elle n’est pas une intellectuelle comme lui, bien au contraire, elle n’a pas d’états d’âme, prend la vie comme elle vient et semble insensible à toutes les difficultés. Malgré cela on imagine facilement une passade rapide entre eux, mais rien ne se passe comme prévu. Lors de leur rencontre, le souvenir d’une autre camarade, Alice, est évoqué ou plus exactement sa mémoire puisqu’elle s’est suicidée à trente ans. Elle était l’amie de Marie-Thérèse et l’objet des fantasmes d’Adam. L’espace d’un instant, son fantôme revit à travers une lettre qu’elle a jadis envoyée à Marie-Thérèse et qu’elle montre à Adam.
le style, direct et indirect, volontairement haché ou s’étalant dans des phrases démesurément longues, mélangeant le passé et le présent, les détails et les idées générales, donne une ambiance à la fois malsaine, déprimante, distillant volontairement un ennui prégnant, une solitude pesante, une certaine lassitude de vivre .
Un peu comme à chaque fois avec Yasmina Reza, le livre un fois refermé, je sens une certaine perplexité m’envahir. Je la lis parce que j’ai bien aimé certains de ses romans,. Ici elle parle avec pertinence de la situation de cet écrivain raté, des états d’âme qu’il peut éprouver face à l’écriture, à la notoriété, à l’impossibilité d’écrire, au temps qui passe avec la nostalgie qui va avec, à la vieillesse qui vient et altère tout. S’y ajoutent l’impossibilité des rapports entre les gens, de l’amour qui est fongible et consomptible comme toutes les choses humaines, l’impossibilité d’être heureux...A titre personnel je partage ce que je viens de lire.
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Hommes qui ne savent pas être aimés
- Par ervian
- Le 07/07/2024
- Dans Yasmina Reza
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N°1909– Juillet 2024.
Hommes qui ne savent pas être aimés – Yasmina Reza – Albin Michel.
Adam, la cinquantaine, est un écrivain qui n’a jamais vraiment connu le succès ou, pour dire les choses plus crûment, c’est un écrivain raté, qui vit très mal cet échec. Il a des états d’âme au sujet de son dernier livre. Il est aussi en crise avec sa femme qui, après avoir soutenu ses tentatives littéraires, ne l’aime plus et parce que son mariage n’est pas vraiment une réussite, et comme si cela ne suffisait pas on vient de lui diagnostiquer un glaucome qui affecte un de ses yeux et pire peut-être. Tout cela n’arrange pas son hypocondrie naturelle qu’il combat en allant méditer, en ce jour, au jardin des Plantes. Il y rencontre par hasard Marie-Thérèse, une copine de lycée célibataire qu’il n’avait pas revue depuis trente ans. Elle est représentante en objets publicitaires, n’a rien de commun avec Adam. Elle ne sait même pas qu’il est devenu écrivain ce qui accentue son mal-être .Elle n’est pas une intellectuelle comme lui, bien au contraire, elle n’a pas d’états d’âme, prend la vie comme elle vient et semble insensible à toutes les difficultés. Malgré cela on imagine facilement une passade rapide entre eux, mais rien ne se passe comme prévu. Lors de leur rencontre, le souvenir d’une autre camarade, Alice, est évoqué ou plus exactement sa mémoire puisqu’elle s’est suicidée à trente ans. Elle était l’amie de Marie-Thérèse et l’objet des fantasmes d’Adam. L’espace d’un instant, son fantôme revit à travers une lettre qu’elle a jadis envoyée à Marie-Thérèse et qu’elle montre à Adam.
le style, direct et indirect, volontairement haché ou s’étalant dans des phrases démesurément longues, mélangeant le passé et le présent, les détails et les idées générales, donne une ambiance à la fois malsaine, déprimante, distillant volontairement un ennui prégnant, une solitude pesante, une certaine lassitude de vivre .
Un peu comme à chaque fois avec Yasmina Reza, le livre un fois refermé, je sens une certaine perplexité m’envahir. Je la lis parce que j’ai bien aimé certains de ses romans,. Ici elle parle avec pertinence de la situation de cet écrivain raté, des états d’âme qu’il peut éprouver face à l’écriture, à la notoriété, à l’impossibilité d’écrire, au temps qui passe avec la nostalgie qui va avec, à la vieillesse qui vient et altère tout. S’y ajoutent l’impossibilité des rapports entre les gens, de l’amour qui est fongible et consomptible comme toutes les choses humaines, l’impossibilité d’être heureux...A titre personnel je partage ce que je viens de lire.
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Hommes qui ne savent pas être aimés
- Par ervian
- Le 07/07/2024
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N°1909– Juillet 2024.
Hommes qui ne savent pas être aimés – Yasmina Reza – Albin Michel.
Adam, la cinquantaine, est un écrivain qui n’a jamais vraiment connu le succès ou, pour dire les choses plus crûment, c’est un écrivain raté, qui vit très mal cet échec. Il a des états d’âme au sujet de son dernier livre. Il est aussi en crise avec sa femme qui, après avoir soutenu ses tentatives littéraires, ne l’aime plus et parce que son mariage n’est pas vraiment une réussite, et comme si cela ne suffisait pas on vient de lui diagnostiquer un glaucome qui affecte un de ses yeux et pire peut-être. Tout cela n’arrange pas son hypocondrie naturelle qu’il combat en allant méditer, en ce jour, au jardin des Plantes. Il y rencontre par hasard Marie-Thérèse, une copine de lycée célibataire qu’il n’avait pas revue depuis trente ans. Elle est représentante en objets publicitaires, n’a rien de commun avec Adam. Elle ne sait même pas qu’il est devenu écrivain ce qui accentue son mal-être .Elle n’est pas une intellectuelle comme lui, bien au contraire, elle n’a pas d’états d’âme, prend la vie comme elle vient et semble insensible à toutes les difficultés. Malgré cela on imagine facilement une passade rapide entre eux, mais rien ne se passe comme prévu. Lors de leur rencontre, le souvenir d’une autre camarade, Alice, est évoqué ou plus exactement sa mémoire puisqu’elle s’est suicidée à trente ans. Elle était l’amie de Marie-Thérèse et l’objet des fantasmes d’Adam. L’espace d’un instant, son fantôme revit à travers une lettre qu’elle a jadis envoyée à Marie-Thérèse et qu’elle montre à Adam.
le style, direct et indirect, volontairement haché ou s’étalant dans des phrases démesurément longues, mélangeant le passé et le présent, les détails et les idées générales, donne une ambiance à la fois malsaine, déprimante, distillant volontairement un ennui prégnant, une solitude pesante, une certaine lassitude de vivre .
Un peu comme à chaque fois avec Yasmina Reza, le livre un fois refermé, je sens une certaine perplexité m’envahir. Je la lis parce que j’ai bien aimé certains de ses romans,. Ici elle parle avec pertinence de la situation de cet écrivain raté, des états d’âme qu’il peut éprouver face à l’écriture, à la notoriété, à l’impossibilité d’écrire, au temps qui passe avec la nostalgie qui va avec, à la vieillesse qui vient et altère tout. S’y ajoutent l’impossibilité des rapports entre les gens, de l’amour qui est fongible et consomptible comme toutes les choses humaines, l’impossibilité d’être heureux...A titre personnel je partage ce que je viens de lire.
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Tempête sur Kinlochleven
- Par ervian
- Le 04/07/2024
- Dans Peter May
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N°1907– Juillet 2024.
Tempête sur Kinlochleven – Peter May – Rouergue noir.
Traduit de l’anglais par Ariannne Bataille.
Avec le bouleversement climatique, l’Écosse est devenue pratiquement une région polaire. Dans ces montagnes des Higlands on a retrouvé le corps congelé de Karl Younger, un journaliste d’investigations et l’inspecteur Cameron Brodie, vieux et cancéreux se porte volontaire pour investiguer sur ce meurtre dans cette région qu’il connaît bien puisqu’il y a jadis pratiqué l’escalade. Il pourrait attendre la mort mais a choisi cette affaire, qui sera sans doute pour lui la dernière pour retrouver Addie, sa fille unique, dont il n’a plus de nouvelles depuis un dizaine d’années. C’est elle, spécialiste de la météo, qui a découvert le cadavre. Mais ce voyage n’est pas seulement destiné à ce qui sera sans doute leur ultime rencontre. Il veut s’expliquer avec elle sur ce qui a motivé cette séparation durable entre eux, le suicide de sa mère, intervenu à la suite d’un adultère supposé de son père. Leur rencontre va être houleuse.
Ce roman prend des allures d’anticipations puisque son auteur le situe en 2050, avec les conséquences du changement de climat, la montée des eaux, la disparition du Gulf Stream et la submersion de certaines contrées maritimes, les nouvelles technologies... Cela prend vite l’allure d’un roman policier classique version Peter May, c’est à dire qui s’inscrit dans les paysages tourmentés de son Écosse natale. Malgré ce contexte grandiose et les aléas de l’enquête, il y aura une sorte de huis-clos entre un père et sa fille et notamment me semble-t- il une réflexion incontournable sur la culpabilité, celle de Cameron pour avoir survécu à son épouse et surtout le fait de se sentir responsable de son suicide à la suite de l’attitude de sa fille au regard de ce qu’il présente comme malentendu.
Il y certes parfois quelques longueurs et les nouvelles technologies permettent des performances qui jouxtent la science-fiction mais j’ai lu avec avec intérêt ce roman fort bien écrit ( traduit?) et qui, avec pas mal de cadavres et des rebondissements, ménage de suspense jusqu’à la fin.
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Le mensonge
- Par ervian
- Le 25/06/2024
- Dans Nathalie Sarraute
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N°1906– Juin 2024.
Le mensonge – Nathalie Sarraute - Gallimard.
C’est un groupe d’amis qui discutent quand l’un d’entre eux, Pierre, révèle qu’il a pris Madeleine, une de leurs relations, absente de cette soirée, en flagrant délit de mensonge. Elle s’est plainte de l’augmentation des tickets de métro alors qu’elle est l’unique héritière du roi de l’acier et que cela n’affectera pas son budget. Tout le monde connaît la fortune de Madeleine et son habitude de se plaindre, c’est une sorte de jeu entre eux de la laisser faire mais Pierre n’a pas pu résister face à ce petit mensonge sans grande importance, rompant ainsi ce pacte tacite. Est-ce sa soif de vérité ou la volonté de jeter un pavé dans la mare qui a motivé son geste ? Il passe d’ailleurs pour un être intègre, mais cela ne va pas lui sourire. C’est par ailleurs quelque peu inconvenant de mettre des gens en face à leurs contradictions, les laisser dire évite les conflits même si personne n’est dupe. C’est une sorte de règle non écrite qui consacre une réalité sociale : Toute vérité n’est pas bonne à dire, les petits mensonges font partie du jeu sociétal et tout le monde ment en permanence, par action ou par omission, pour se mettre soi-même en valeur, en politique, au travail, en amour, en famille... il en résulte une sorte d’équilibre que personne ne veut rompre et chacun a la certitude de détenir la vérité. Par ailleurs on a tout à perdre à être honnête dans une société qui cultive l’hypocrisie et où plus le mensonge est gros plus il prend. Ainsi l’attitude de Pierre provoque une foule de questions et de reproches où chacun se positionne par rapport au mensonge, les siens, parfois inexistants, et ceux des autres et ils jouent entre eux une sorte de sorte de psychodrame où il devient difficile de faire la part des choses entre la farce et la sincérité de sorte que personne n’en sort indemne mais pas non plus amélioré. Que la vie soit une comédie, on ne nous l’a que trop dit et le mensonge fait intégralement partie de l’espèce humaine .
Cette courte pièce de théâtre écrite à l’origine pour la radio avec des intervenants personnalisés m’a paru pertinente.
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Une désolation
- Par ervian
- Le 24/06/2024
- Dans Yasmina Reza
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Une désolation - Yasmina Reza - Albin Michel
Ce livre est catégorisé « Roman » et je ne suis pas bien sûr que cela en soit un dans la mesure où il me semble bien éloigné de la fiction, bien coller à la réalité.
Un homme malade, au pas de la mort , s’adresse à son fils absent dans une sorte de plaidoyer pour déplorer le chemin qu’il a pris dans son existence , celui d’être « peinard », de ne rien chercher à bâtir ni à faire évoluer les choses. C’est d’une simplicité banale qui met en lumière la différence de génération, l’évolution des choses et des aspirations des jeunes et il ne sert à rien de regretter le temps où les enfants obéissaient à leur père jusque dans le choix de leur métier, de leur épouse et de leur mode de vie. Il ne veut pas l’avouer mais je suis sûr qu’il envie sa jeunesse et sa découverte d’un bonheur qui lui a échappé. Pendant qu’il y est, il porte un regard aigu sur la société qui l’entoure et qui a été son décor toute sa vie. Il fait un bilan bien pessimiste de son propre parcours, social, sentimental, professionnel, familial, ce n’est guère brillant et même plutôt déprimant. Même une liaison illusoire avec une femme longtemps désirée ne fut pas pour lui le symbole du bonheur. Il eut le sentiment d’être avec elle un étranger, seulement capable de meubler momentanément le vide amoureux de sa vie, sans être capable d’être pour elle autre chose qu’un amant de passage, sans la moindre trace de passion. Avoir vécu tant d’années pour en arriver là. L’aveu de cette faillite lui coûte mais il le fait. Même pas l’illusion de la réussite face à la mort inévitable, le constat est accablant. On le sent revenu de tout, désabusé, aigri, solitaire, accablé devant tant d’échecs qu’il avait sans doute voulu éviter mais qui se sont imposés à lui sans qu’il y puisse rien, comme une sorte de destiné funeste. Il peut toujours se dire qu’il a parfois failli dans l’éducation qu’il a donnée à son fils si différent de lui, cette culpabilisation judéo-chrétienne est inévitable et bien inutile dans notre société. On le sent résigné devant tant de souffrance et devant la mort. Il lui reste le dérisoire, son jardin par exemple et il le soigne avec attention et inutilité, s’attache à des détails comme s’ils avaient une importance capitale. Finalement, face à ce fiasco, la mort semble être une délivrance.
J’ai lu cela comme une sorte de testament de cet homme qui va bientôt quitter la vie et qui se justifie face à ses proches, une forme humaine du « jugement dernier » implacable et sans appel que nous promet le catholicisme, une façon d’être en règle avec sois-même au moment du grand départ.
Récit sans chapitres, presque sans réelle respiration, un peu comme si notre auteure voulait tout dire tout de suite, le style est percutant et la lecture facile.
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L'homme du hasard
- Par ervian
- Le 23/06/2024
- Dans Yasmina Reza
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N°1903– Juin 2024.
L’homme du hasard – Yasmina Reza - Albin Michel
J’ai toujours pensé que les trains sont le lieu privilégié des rencontres les plus improbables. Dans un compartiment, un homme fait face à une femme qu’il ne connaît pas , il n’y a aucun dialogue entre eux et dans le tangage des boggies, chacun regarde le paysage défiler entre Paris et Francfort tout en laissant aller ses propres pensées. Lui ne la connaît pas mais elle l’a reconnu, c’est Paul Parsky., l’auteur du livre qu’elle a dans son sac, « l’homme du hasard » et qu’elle craint de lire devant lui. Elle, Martha, connaît toute son œuvre et, en pensée elle s’adresse à lui sans qu’évidemment il le sache. Elle lui parle d’elle, de sa vie, de ce qu’elle sait de lui, de ses personnages, de ses livres, de ce qu’elle éprouve en les lisant… Elle s’imagine faisant un bout de chemin avec lui, commence à fantasmer Lui est plein amertume et après l’avoir ignorée en fait autant, après avoir;longtemps hésité, Martha sort son livre et Parsky s’intéresse à elle c’est une pièce de théâtre mais j’ai plutôt lu ce texte comme un roman avec cette mise en abyme qu’aime Yasmina Reza, avec ce jeu entre les deux personnages, Paul qui ne se déclare pas comme l’auteur et en dit même un peu de mal et Martha qui se lâche. J’ai lu ce texte comme une rencontre de hasard avec, pour Martha fascinée par l’écrivain et son aura créatrice avec tout ce qu’un simple lecteur prête à un auteur, avec peut-être pour elle une volonté de séduction. Quant à Paul, le fait de voir quelqu’un qui, dans une sorte de huit-clos, lit son dernier livre est à la fois flatteur et frustrant parce lui qui écrit pour lui et dans le secret de son imagination ne voit jamais son lecteur, ne parle donc jamais avec lui, n’a peut-être pas la moindre envie d’en rencontrer un, mais en a l’occasion. Pourtant il est tentant pour l‘auteur, surtout quand ce lecteur est une lectrice, évidemment attirante, de jouer ce jeu de l’anonymat ne serait-ce que pour mesurer ponctuellement l’intérêt de son public et recueillir éventuellement des critiques. J’ai écouté cette pièce dans son adaptation radiophonique avec les voix de Jeanne Moreau et e Michel Piccoli. Un régal.
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Le silence
- Par ervian
- Le 23/06/2024
- Dans Nathalie Sarraute
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N°1902– Juin 2024.
Le silence – Nathalie Sarraute – Gallimard.
Pièce étonnante, originellement prévue en 1964 pour la radio avant que Jean Louis Barrault ne la mette en scène en 1967. Cette œuvre, uniquement orale à l’origine et donc sans jeu d’acteurs, liait donc par la parole six personnages, 4 femmes et deux hommes, individualisés, si on peut dire, par une lettre et un chiffre (H1, F2...) face un autre homme, Jean-Pierre qui lui garde le silence, sauf à la fin. C’est un huis-clos ou tout commence par l’évocation par un homme de maisons en bois, puis chacun apporte quelque chose qu’il puise dans sa mémoire, sa sensibilité, on évoque le bonheur, l’amour, la littérature, on rit aussi et la conversation s’égare parfois pour revenir à la fin aux fameuses petites maisons. Chacun participe, souvent par des remarques sans grande importance, sauf Jean-Pierre qui reste impassible. Pourtant, il est le point de mire de cette petite assemblée et ne consent à sortir de son silence que sur une précision de nature culturelle. Son mutisme étonne, dérange même En général, les gens s’affirment par la parole, généralement pour se mettre en valeur quand à ceux qui restent silencieux c’est qu’ils n’ont rien à dire ou que, ce qui est dit autour d’eux de les intéresse pas ou c’est la volonté de ne pas prendre position, par timidité, par incompréhension, par mépris, par ennui. Si la parole soûle, le silence oppresse les uns et provoque des réactions contradictoires des autres. J’avoue avoir été surpris par ce court texte aux échanges quelque peu dérisoires face au silence de Jean-Pierre qui bouscule et dérange des autres intervenants. Ces conversations de salons sans la moindre importance tiennent difficilement du dialogue mais le silence de Jean-Pierre agit comme un « tropisme » sur les autres protagonistes. Les quelques mots banals qu’il exprime à la fin semblent conclure un psychodrame pesant où l’abondance de mots le disputaient au vide du silence.
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Lo sciamano delle Alpi
- Par ervian
- Le 22/06/2024
- Dans Michele Marsia
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N°1895 – Juin 2024.
Lo sciamano delle alpi – Michele Marziani – Bottega Errante Edizioni.
Il libro comincia alla fine di questa storia un po’ complicata della famiglia Beltrami, . In questo romanzo c’e il narratore, Anfio, un medico , professore di oncologia, divorziato da Roberta, poi Ciccia (Clitemnstra) sua sorella, divorziata, finanziaria a Londra,divorziata, Gildo, suo fratello, avvocato a Milano. Tutti e tre sono invitati dalla mamma, in la sua casa. Manca Adrasto, il fratello maggiore del quale gli altri fratelli non sanno niente da un sacco di tempo. A causa della crisi enonomica, Ciccia ha un progetto di investimento a proposito di terreni dove c’é una vecchia miniera d’oro abbandonata, proprietà della famiglia. Bisogna l’accordo di Adrasto dunque è indispensabile cercarlo subito. Fininscono per scoprire che Adrasto ha lasciato il mestiere di medico, fa il pastore in montagna d’estate e frabbrica se stesso i formaggi. Lo trovano , vive in una baita con sua moglie Heidi, piu giovane di ventidue anni di lui e bellissima madre di tre figli che hanno nomi greci presi dall’Iliade e dall’Odisea. :Telemaco, Paride e Ermione. C’é una tradizione famigliale. Ma lui ha un cancro al viso che gli deforma la faccia e che cura con oppio e vischio ; E un metodo di medicina « antroposofica » di Rudolf Steiner, una specie di filosofo, padre dell’agricoltura biodinamica. Anfio pensa che suo fratello abbia letto troppi fumetti di Asterix a causa del druido Panoramix e del suo vischio, ma si innamora di Heidi a prima vista. Adrasto ha avuto il coraggio di abandonnare tutto per vivere vicino alla natura et Ciccia dice che questa vita piacerebbe anche a lei. Nella discussione, Adrasto si rende conto che questa storia della miniera é solo un’operazione finanziaria perché devono mettere alla disposizione della società creata da Ciccia il terreno e la baita di Andrasto. Dunque i tre fratelli decidono di rimanere un po’ da Adrasto, cancellando tutti i loro appuntamenti, per provare di convincerlo. Ma non é così facile All'inizio la storia mi è sembrata banale ma nel corso della lettura l'interesse è venuto .Mi é piaciutto questo libro specificamente a causa dello studio dei personaggi e in particolare quello del narratore. Anfio é divorziato, se sente un po’ solitario e ne soffre. Dunque non puo vedere una donna senza fantasticare. E un po’ donnaiollo, ma ciò che gli manca di più è una famiglia, dei bambini.Le relazioni familiari non sono sempre facili ma tra i fratelli c'è il dolce profumo dell'infanzia che passa troppo in fretta. Tiene il lettore in sospeso con momenti poetici. Una bella scrittura, facile da leggere anche per uno che impara l'italiano [io stesso], questo romanzo non é tradotto in francese. Ho gia letto dei romanzi di quel autore ( « La signora del caviale »- « Umberto Dei -biografia non autorizata di una bicicletta » – « La trotta ai tempi di Zorro ») .
Le chaman des Alpes
Le livre commence à la fin de cette histoire un peu compliquée de la famille Beltrami.
Dans ce roman, il y a un narrateur, Anfio, un médecin, professeur d’oncologie, divorcé de Roberta, puis Ciccia (Clitemnestre), sa sœur, divorcée, financière à Londres, Gildo, son frère, avocat à Milan. Tous les trois sont invités par la mère, chez elle. Il manque Adrasto, le frère aîné , dont les autres frères sont sans nouvelles depuis pas mal de temps.
A cause de la crise économique, Ciccia a un projet d’investissement à propos de terrains où il y a une vieille mine d’or abandonnée, propriété de la famille. Il faut donc l’accord d’Adrasto et il est indispensable de le chercher immédiatement. Ils finissent par découvrir que Adrasto qui a abandonné son métier de médecin, est berger dans la montagne l’été et fait lui-même ses fromages. Ils le trouvent. Il vit dans une cabane avec sa femme Heidi, plus jeune que lui de 22 ans, une ravissante mère de trois enfants qui portent des prénoms grecs de l’Iliade et de L’Odyssée. C’est une tradition familiale.
Il a un cancer qui lui déforme le visage et qu’il soigne avec de l’opium et du gui. C’est une méthode de médecine « anthroposophique » de Rudolf Steiner, une sorte de philosophe, père de « l’agriculture biodynamique ». Anfio pense que son frère a lu trop de bandes dessinées d’Astérix, à cause du druide Panoramix et de son gui, ce qui ne l’empêche pas de tomber amoureux d’Heidi au premier regard. Adrastro a eu le courage de tout abandonner pour vivre dans la nature et Ciccia se dit que cette vie ne lui déplairait pas. Dans la discussion, Adrasto se rend compte que cette histoire de mine est seulement une opération financière parce qu’ils doivent mettre à la disposition de la société crée par Ciccia le terrain et la cabane d’Arostro. Les trois frères décident donc de rester un peu chez Adrasto, modifiant tous leurs rendez-vous, pour tenter de la convaincre, mais ce n’est pas chose facile. Au commencement l’histoire m’a semblé banale mais au cours de ma lecture l’intérêt est venu J’ai aimé ce livre spécialement à cause de l’étude des personnages et en particulier celui du narrateur. Anfio est divorcé, se sent un peu seul et en souffre. Il ne peut par conséquent croiser une femme sans fantasmer. C’est un peu un Don Juan mais ce qui lui manque c’est une famille, des enfants. Les relations familiales ne sont pas toujours faciles mais entre les frères il reste le doux parfum de l’enfance qui passe trop vite. Ce roman tien le lecteur en haleine avec des moments poétiques. Un belle écriture, facile à lire même pour quelqu’un ( moi en l’occurrence) qui apprend l’italien .Ce roman n’est pas traduit ne français.
J’ai déjà lu des romans de cet auteur « La signora del caviale- Umberto Dei, biografia non autotorisata di una bicicleta- Ta trotta ai tempi di Zorro)Gloria – Un film de Margherita Vicario.
Pie VII vient d’être élu pape et va venir visiter le vieil orphelinat de jeunes filles de Sant’Ignazio à proximité de Venise. Elles y reçoivent une éducation musicale approfondie mais leur seul espoir d’émancipation est le mariage, évidemment arrangé. L’établissement est dirigé par un prêtre âgé, maître de chapelle, surnommé « Maestro », à qui le gouverneur demande une composition originale pour honorer la visite pontificale. Faute d’inspiration, l’ecclésiastique peine à honorer cette commande qui devra être exécutée par le petit orchestre à cordes des pensionnaires.
Teresa, humble servante anonyme et solitaire, est vouée dans cette institution aux tâches matérielles les plus humbles et personne ne connaît son histoire sordide. Rendue orpheline par la guerre, elle est placée chez le gouverneur qui la viole et se charge de l’éducation de son enfant dont elle est séparée. On lui intime l’ordre de ne parler à personne, ce qui lui vaut le surnom de « La muette ». Par hasard, dans une dépendance, elle découvre un piano et révèle un talent étonnant pour la musique qu’elle joue à l’oreille , traduisant en mélodies les sons du quotidien. Malgré son état de domestique, elle s’intègre à la formation musicale des jeunes pensionnaires et étudie avec elles la musque baroque qui semble avoir leur préférence. Ce qui devait être un concert de musique religieuse destinée à s’attirer les bonnes grâces du pape prend rapidement des chemins de traverse.
J’ai personnellement apprécié la musique , les décors et les costumes. Ce drame est remarquablement servi par Gallea Bellugi (Teresa) , Carlotta Gamba ( Lucia).
Ce film italio-suisse sorti en juin 2024 en France, s’inscrit dans le même esprit du cinéma italien actuel, quoique dans des registres différents et qui célèbre l’émancipation des femmes trop souvent oubliées, face à l’intolérance de la société incarnée ici par la toute puissance de l’Église catholique. Ainsi « Il reste encore demain » (2023) de Paola Cortellesi et « La nouvelle femme » (2023) de Lea Todorov.
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Pour un oui ou pour un non
- Par ervian
- Le 22/06/2024
- Dans Nathalie Sarraute
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N°1901 – Juin 2024.
Pour un oui ou pour un non – Nathalie Sarraute – Gallimard.
Cette petite pièce de théâtre met en scène deux hommes, H1 et H2 (on peut difficilement faire plus anonyme) qui, après avoir extrêmement proches se sont brouillés pour des raisons assez obscures et qui semblent s’être perdues dans les arcanes de leur mémoire. Pour l’heure le premier reproche au second sa condescendance, sa jalousie, ses apparences arrogantes. Tous les deux vont s’efforcer de clarifier les choses, d’y mettre des mots, de les exprimer mais c’est surtout ce qui n’est pas dit qui importe parce que le silence aussi fait partie de cette démarche. Les points de suspension, nombreux dans cette pièce ont leur importance. A ce petit jeu on perd toujours et ces deux hommes se retrouvent alternativement dans une position d’accusateur et d’accusé dans un procès surréaliste où chacun n’a rien à gagner. Ils n’en sortiront pas indemnes. Cette expérience est très humaine, nous l’avons tous faite un jour ou un autre, nous avons tous prononcé ces mots, connu ce genre d’impasse même si, à la réflexion, il pouvait nous être nous être difficile de savoir les circonstances de ce différent, l’attitude éventuellement agressive, les lointaines pulsions, les rancœurs amassées dans un replis de la mémoire et qui les ont suscités . C’est souvent à la suite d’un petit rien, mal compris, mal interprété, que cette incompréhension éclate. Ici J’ai eu le sentiment que l’ amitié, fut-elle ancienne et apparemment indestructible, a souvent, comme la plupart des choses humaines, la solidité d’un château de cartes dans un courant d’air, que la parole n’est pas forcément synonyme de thérapie
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Le dieu du carnage
- Par ervian
- Le 20/06/2024
- Dans Yasmina Reza
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N°1900 – Juin 2024.
Le dieu du carnage– Yasmina Reza – Albin Michel.
Dans un appartement parisien deux familles, les Reille et les Houlliez se rencontrent pour rédiger des déclarations d’assurance relatives a une bagarre entre leurs deux jeunes fils. Bilan, deux incisives cassées pour Bruno Houlliez. Au cours de cette rencontre les parents parlent librement du « vivre ensemble », de la morale, de la responsabilité, de la liberté. La conciliation et le compréhension mutuelle sont de rigueur et chacun cherche à trouver un terrain d’entente pour clore ce qui n’est qu’une bagarre de gosses.On parle de tout et de rien, de la recette du clafoutis, d’une cruelle histoire de hamster ou de médicaments, des relations dans le couple, le ton monte puis redescend, le téléphone sonne sans arrêt ce qui interrompt cette rencontre et agace tout le monde, une des deux femmes a ses vapeurs... avec vomissures. Puis on en vient à l’incontournable culpabilité, la morale, les remords, les mesquineries, rapidement, l’alcool aidant, les masques tombent et les vrais visages se révèlent, parfois violents . Je ne sais pas trop s’il s’agit d’une comédie, au sens de « la comédie de la vie » faite, comme nous le savons, de violences et d’hypocrisies quotidiennes ou d’une critique de la vie en société. Quant au titre de cette cette courte pièce de théâtre, j’ai bien senti le carnage mais je n’ai pas bien compris ce que ce dieu venait faire la-dedans, à part si on considère, comme l’un des intervenants qu’il y a un dieu qui gouverne la destiné des hommes. Cela dit, je suis un peu déçu.
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Nulle part
- Par ervian
- Le 19/06/2024
- Dans Yasmina Reza
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N°1899 – Juin 2024.
Nulle part– Yasmina Reza – Albin Michel.
Le livre refermé, je suis perplexe après cette lecture assez courte. Il est question du temps qui passe et spécialement ici de l’enfance de l’auteure. C’est souvent l’apanage des gens d’un certain âge qui voient les années défiler de pouvoir évoquer leur enfance. J’ai souvent sous des plumes souvent illustres que cette période ressemblait souvent à un paradis perdu avec de la nostalgie à chaque ligne, des souvenirs, évoqués avec des paroles lointaines, ou gravés en photos datées au dos et montrant des personnes qui n’existent plus dans des lieux maintenant inconnus. Apparemment Yasmina Reza qui revisite son enfance, s’accroche à des moments fugaces, parfois à un petit détail sans importance et les écrit pour en fixer la réalité et leur éviter de sombrer dans l’oubli. C’est une des fonctions de l’écriture que de faire cette démarche de la mémoire même si c’est à l’aune de cela qu’on mesure le temps passé . Apparemment pour elle, cette évocation est empreinte de tristesse non pas tant à cause de cette fuite des jours mais peut-être plus sûrement parce que cette période est à ses yeux sans aucun intérêt, digne de la froideur d’une archive qu’on ne prend aucun plaisir à regarder. Antoine de Saint-Exupéry a écrit « On est de son enfance comme on est d’un pays ». C’est attacher sa vie à une terre, mais la vraie terre est celle qui implique notre mort qui est l’issue normale et inévitable de chacun d’entre nous. En ouvrant ce petit livre, je ne m’attendait pas à entrer ainsi en complicité avec cette auteur ,à partager à ce point sa vision de l’enfance. .
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la traversée de l'hiver
- Par ervian
- Le 16/06/2024
- Dans Yasmina Reza
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N°1898 – Juin 2024.
La traversée de l’hiver – Yasmina Reza – Albin Michel.
Dans une villégiature hôtelière des montagnes suisses en fin de saison se retrouvent six personnages, des sexagénaires et des trentenaires, dans une relative solitude. Chacun vient avec sa propre histoire et ses passions qui éclatent dans cette sorte de microcosme. Certains sont amoureux d’autres qui ne partagent pas cette attirance malgré les tentatives de séduction et chacun semble s’ennuyer ferme, malgré les parties de scrabble, la musique classique et le bridge, la façon de faire le chocolat chaud et l’évocation de l’écriture. Ce qui résulte de tout cela c’est une grande solitude Cette pièce a été créée en 1989 ;
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conversations après un enterrement
- Par ervian
- Le 15/06/2024
- Dans Yasmina Reza
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N°1897 – Juin 2024.
Conversations après un enterrement – Yasmina Reza – Albin Michel.
Simon Weinberg vient de mourir, il est enterré selon son souhait dans sa propriété familiale du Loiret. A cette occasion sa famille se retrouve, ses deux fils Nathan et Alex, sa fille Édith. Ils ont tous la quarantaine, son frère Pierre et sa femme Julienne sont plus âgés. Il y a même Élisa, l’ex maîtresse d’Alex qui est aussi amoureuse de Nathan. En ouvrant ce livre j’avais l’impression de devoir assister à des conversations ordinaires sur le défunt à qui on trouve subitement toutes les qualités qu’on lui contestait de son vivant, des choses qu’on dit et qu’on ne pense pas… Rien de tout cela, on rit beaucoup ce qui n’est pas mal, à peine quelques allusions furtives au défunt, un retour sur le passé comme un exorcisme, une évocation du présent dans tout ce qu’il a de plus quotidien et banal comme éplucher des légumes, un huit-clos familial où chacun parle mais aussi se tait et cultive ses non-dits, ses secrets et ses rancœurs et Élisa qui n’en finit pas de partir … et de revenir ! Je ressors de cette lecture pourtant attentive avec une impression d’incompréhension et peut-être même de déception par rapport à la première approche que j’avais eue de cette auteure avec sa pièce intitulée « Art ». Mais, je n’ai peut-être rien compris.
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Lo sciamano delle Alpi
- Par ervian
- Le 12/06/2024
- Dans Michele Marziani
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Lo sciamano delle Alpi – Michele Marziani – Bottega Errante Edizioni.
Il libro comincia alla fine di questa storia un po’ complicata della famiglia Beltrami, . In questo romanzo c’e il narratore, Anfio, un medico , professore di oncologia, divorziato da Roberta, poi Ciccia (Clitemnstra) sua sorella, divorziata, finanziaria a Londra,divorziata, Gildo, suo fratello, avvocato a Milano. Tutti e tre sono invitati dalla mamma, in la sua casa. Manca Adrasto, il fratello maggiore del quale gli altri fratelli non sanno niente da un sacco di tempo. A causa della crisi enonomica, Ciccia ha un progetto di investimento a proposito di terreni dove c’é una vecchia miniera d’oro abbandonata, proprietà della famiglia. Bisogna l’accordo di Adrasto dunque è indispensabile cercarlo subito. Fininscono per scoprire che Adrasto ha lasciato il mestiere di medico, fa il pastore in montagna d’estate e frabbrica se stesso i formaggi. Lo trovano , vive in una baita con sua moglie Heidi, piu giovane di ventidue anni di lui e bellissima madre di tre figli che hanno nomi greci presi dall’Iliade e dall’Odisea. :Telemaco, Paride e Ermione. C’é una tradizione famigliale. Ma lui ha un cancro al viso che gli deforma la faccia e che cura con oppio e vischio ; E un metodo di medicina « antroposofica » di Rudolf Steiner, una specie di filosofo, padre dell’agricoltura biodinamica. Anfio pensa che suo fratello abbia letto troppi fumetti di Asterix a causa del druido Panoramix e del suo vischio, ma si innamora di Heidi a prima vista. Adrasto ha avuto il coraggio di abandonnare tutto per vivere vicino alla natura et Ciccia dice che questa vita piacerebbe anche a lei. Nella discussione, Adrasto si rende conto che questa storia della miniera é solo un’operazione finanziaria perché devono mettere alla disposizione della società creata da Ciccia il terreno e la baita di Andrasto. Dunque i tre fratelli decidono di rimanere un po’ da Adrasto, cancellando tutti i loro appuntamenti, per provare di convincerlo. Ma non é così facile All'inizio la storia mi è sembrata banale ma nel corso della lettura l'interesse è venuto .Mi é piaciutto questo libro specificamente a causa dello studio dei personaggi e in particolare quello del narratore. Anfio é divorziato, se sente un po’ solitario e ne soffre. Dunque non puo vedere una donna senza fantasticare. E un po’ donnaiollo, ma ciò che gli manca di più è una famiglia, dei bambini.Le relazioni familiari non sono sempre facili ma tra i fratelli c'è il dolce profumo dell'infanzia che passa troppo in fretta. Tiene il lettore in sospeso con momenti poetici. Una bella scrittura, facile da leggere anche per uno che impara l'italiano [io stesso], questo romanzo non é tradotto in francese. Ho gia letto dei romanzi di quel autore ( « La signora del caviale »- « Umberto Dei -biografia non autorizata di una bicicletta » – « La trotta ai tempi di Zorro ») .
Le chaman des Alpes
Le livre commence à la fin de cette histoire un peu compliquée de la famille Beltrami.
Dans ce roman, il y a un narrateur, Anfio, un médecin, professeur d’oncologie, divorcé de Roberta, puis Ciccia (Clitemnestre), sa sœur, divorcée, financière à Londres, Gildo, son frère, avocat à Milan. Tous les trois sont invités par la mère, chez elle. Il manque Adrasto, le frère aîné , dont les autres frères sont sans nouvelles depuis pas mal de temps.
A cause de la crise économique, Ciccia a un projet d’investissement à propos de terrains où il y a une vieille mine d’or abandonnée, propriété de la famille. Il faut donc l’accord d’Adrasto et il est indispensable de le chercher immédiatement. Ils finissent par découvrir que Adrasto qui a abandonné son métier de médecin, est berger dans la montagne l’été et fait lui-même ses fromages. Ils le trouvent. Il vit dans une cabane avec sa femme Heidi, plus jeune que lui de 22 ans, une ravissante mère de trois enfants qui portent des prénoms grecs de l’Iliade et de L’Odyssée. C’est une tradition familiale.
Il a un cancer qui lui déforme le visage et qu’il soigne avec de l’opium et du gui. C’est une méthode de médecine « anthroposophique » de Rudolf Steiner, une sorte de philosophe, père de « l’agriculture biodynamique ». Anfio pense que son frère a lu trop de bandes dessinées d’Astérix, à cause du druide Panoramix et de son gui, ce qui ne l’empêche pas de tomber amoureux d’Heidi au premier regard. Adrastro a eu le courage de tout abandonner pour vivre dans la nature et Ciccia se dit que cette vie ne lui déplairait pas. Dans la discussion, Adrasto se rend compte que cette histoire de mine est seulement une opération financière parce qu’ils doivent mettre à la disposition de la société crée par Ciccia le terrain et la cabane d’Arostro. Les trois frères décident donc de rester un peu chez Adrasto, modifiant tous leurs rendez-vous, pour tenter de la convaincre, mais ce n’est pas chose facile. Au commencement l’histoire m’a semblé banale mais au cours de ma lecture l’intérêt est venu J’ai aimé ce livre spécialement à cause de l’étude des personnages et en particulier celui du narrateur. Anfio est divorcé, se sent un peu seul et en souffre. Il ne peut par conséquent croiser une femme sans fantasmer. C’est un peu un Don Juan mais ce qui lui manque c’est une famille, des enfants. Les relations familiales ne sont pas toujours faciles mais entre les frères il reste le doux parfum de l’enfance qui passe trop vite. Ce roman tien le lecteur en haleine avec des moments poétiques. Un belle écriture, facile à lire même pour quelqu’un ( moi en l’occurrence) qui apprend l’italien .Ce roman n’est pas traduit ne français. J’ai déjà lu des romans de cet auteur « La signora del caviale- Umberto Dei, biografia non autotorisata di una bicicleta- Ta trotta ai tempi di Zorro)
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Gloria
- Par ervian
- Le 11/06/2024
- Dans Margherita Vicario
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N°1894 – Juin 2024.
Gloria – Un film de Margherita Vicario.
Pie VII vient d’être élu pape et va venir visiter le vieil orphelinat de jeunes filles de Sant’Ignazio à proximité de Venise. Elles y reçoivent une éducation musicale approfondie mais leur seul espoir d’émancipation est le mariage, évidemment arrangé. L’établissement est dirigé par un prêtre âgé, maître de chapelle, surnommé « Maestro », à qui le gouverneur demande une composition originale pour honorer la visite pontificale. Faute d’inspiration, l’ecclésiastique peine à honorer cette commande qui devra être exécutée par le petit orchestre à cordes des pensionnaires.
Teresa, humble servante anonyme et solitaire, est vouée dans cette institution aux tâches matérielles les plus humbles et personne ne connaît son histoire sordide. Rendue orpheline par la guerre, elle est placée chez le gouverneur qui la viole et se charge de l’éducation de son enfant dont elle est séparée. On lui intime l’ordre de ne parler à personne, ce qui lui vaut le surnom de « La muette ». Par hasard, dans une dépendance, elle découvre un piano et révèle un talent étonnant pour la musique qu’elle joue à l’oreille , traduisant en mélodies les sons du quotidien. Malgré son état de domestique, elle s’intègre à la formation musicale des jeunes pensionnaires et étudie avec elles la musque baroque qui semble avoir leur préférence. Ce qui devait être un concert de musique religieuse destinée à s’attirer les bonnes grâces du pape prend rapidement des chemins de traverse.
J’ai personnellement apprécié la musique , les décors et les costumes. Ce drame est remarquablement servi par Gallea Bellugi (Teresa) , Carlotta Gamba ( Lucia).
Ce film italio-suisse sorti en juin 2024 en France, s’inscrit dans le même esprit du cinéma italien actuel, quoique dans des registres différents et qui célèbre l’émancipation des femmes trop souvent oubliées, face à l’intolérance de la société incarnée ici par la toute puissance de l’Église catholique. Ainsi « Il reste encore demain » (2023) de Paola Cortellesi et « La nouvelle femme » (2023) de Lea Todorov.
© Hervé GAUTIER
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Perspective(s)
- Par ervian
- Le 09/06/2024
- Dans Laurent Binet
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N°1893 – Juin 2024.
Perspective(s) – Laurent Binet – Grasset.
Dans la Florence de 1557, le vieux peintre Jacopo da Pontorno est retrouvé assassiné dans la chapelle San Lorenzo au pied d’un fresque pour laquelle il travaillait depuis onze années. L’examen du corps ne laisse aucun doute sur l’homicide et le duc Cosimo de Medicis a chargé le peintre ,architecte et historien, Giorgo Vasari, d’éclaircir cette affaire tout en laissant courir le bruit du suicide de Jacopo, éternel insatisfait de son travail.
Dans une série de 176 lettres savoureusement perverses, échangées entre une vingtaine d’épistoliers, tant en France qu’en Italie, l’auteur recrée à l’occasion d’une fiction policière sertie dans un contexte historique, l’ambiance délétère qui règne dans cette ville, entre une période de crise créatrice, les luttes politiques pour le pouvoir et la représentation ouvrière, les guerres incessantes, les pressions moralisatrices et pudibondes inspirées par l’Église et le pape contre la nudité des corps et les homosexuels, l’ombre de l’hérésie, la défense de la vertu, le poids de l’Inquisition, le souvenir des incantations punitives du moine Jérôme Savonarole, la crainte du retour de la peste comme un châtiment divin, une crue de l’Arno... Dans le petit cénacle des peintres, on se pose des questions sur cette mort de plus en plus étrange et les spéculations les plus folles fleurissent puisque l’insécurité et la peur règnent dans la ville. On se trahit, on se critique, on s’espionne entre concurrents, avec l’intransigeance jalouse des uns et la flagornerie cupide des autres, des investigations sont menées, des délations sont chuchotées, des conspirations sont fomentées, des complots sont ourdis et tout le monde est suspect, ouvriers, peintres, nonnes, bourgeois ou nobles. Apparemment la clé de cette mort mystérieuse résiderait dans un tableau de Michel-Ange, jugé licencieux, odieusement surchargé par une main anonyme et apparemment subtilisé. Sa recherche, également confiée à Vasari, est de plus en plus problématique, laborieuse et n’évite ni les impasses ni la violence, ni le sang. Le prochain mariage arrangé de la jeune Maria de Médicis qui n’arrange pas tout le monde, l’éclaircissement d’une énigmatique visite féminine nocturne le soir de la mort de Pontorno, le tout dans la préparation du carnaval, la fréquentation des tavernes voire des bordels, les ferveurs religieuses d’un couvent avec son inévitable culpabilité judéo-chrétienne et la repentance face à la permanence du péché, la toute puissance de l’Église dont le pape, ancien inquisiteur et créateur de « l’index » et pourfendeur des « sodomites » tient à ce que la société revienne à un respect de la morale et de la religion un peu oublié lors de la période précédente où la Renaissance a correspondu à une période plus laxiste.
Le titre de ce roman rappelle que la perspective, cette technique qui consiste à créer une illusion de profondeur sur une surface plane par la mise en œuvre du « point de fuite », fut inventée à Florence au Quattrocento. Cette innovation s’invite dans ce roman d’une manière inattendue, paradoxalement liée à la mort. En outre, ce titre comporte un « s » entre parenthèses, comme une éventualité, une façon de rendre les choses passées ou de les imaginer.
Dans ce roman captivant, agréable à lire, richement documenté et érudit, l’auteur, nous transporte dans l’atmosphère cette ville exceptionnelle par la richesse de son histoire et la beauté de ses monuments et qui fut pour Stendhal le lieu du syndrome qui porte son nom et dont l’ombre plane sur ce livre.
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Six personnages en quête d'auteur
- Par ervian
- Le 06/06/2024
- Dans Luigi Pirandello
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N°1892 – Juin 2024.
Six personnages en quête d'auteur – Luigi Pirandello. L'avant-scène théâtre.
C'est une pièce de théâtre écrite par Pirandello en 1921. .
Elle est particulière à commencer par son titre un peu surprenant. Ensuite elle montre un scénario original, la survenue impromptue d'étrangers, des personnages qui ne sont pas des acteurs et qui perturbent une répétition. D'autre part la pièce ne comporte pas d'actes ni de scène et quand le rideau se baisse c'est à la suite d'une erreur du machiniste..
C'est surtout une mise en abyme. A l'occasion d'une répétition d'une pièce programmée pour un spectacle, « le jeu des rôles », l'entrée en scène d'étrangers qui souhaitent jouer une pièce qui n'est pas encore écrite mais qu'ils portent en eux. Cette pièce c'est leur profond drame intime et familial. Peu à peu cette pièce non écrite va prendre le pas sur celle qui était prévue, s'écrire au rythme de l'improvisation, avec la complicité du directeur et au grand désarroi des acteurs professionnels. C'est aussi une réflexion sur la création théâtrale entre la fiction, l'illusion et la réalité, sur la technique théâtrale, le rôle des acteurs, la différence entre le « personnage » du manuscrit qui est vrai parce qu'il porte son drame en lui-même et l'acteur qui l'incarne, qui « joue » son rôle sur la scène. Il semble qu'ici il y a une véritable opposition entre eux, les acteurs n'étant définitivement que des interprètes.
Veut-il nous dire que le théâtre est le miroir de la vie ? On verra ce qu'on voudra dans cette mise en scène baroque qui n'a pas manqué, à l'origine de faire crier le public au scandale, à l’escroquerie à la trahison ou au génie. Le théâtre comme le roman mettent en scène des personnages fictifs, qui n'ont jamais existé parce qu'ils sont nés certes de l’imagination de l'auteur mais que ce dernier construits à sa manière avec son témoignage, son message humain, ses drames, ses rêves, ses échecs et ses joies. Ce sont les malheurs humains qui nourrissent la création qu'elle soit littéraire ou théâtrale. C'est tout le problème de l'écriture qui est le reflet de la condition humaine dont chacun de nous porte en lui la marque mais qu'il n'est pas forcément capable d'exprimer, de mettre des mots sur ses maux pour les exorciser. Ici les six personnages, heureux sans doute d'avoir trouvé un auteur pour être leur interprète, Le directeur, le torturent pour qu'il exprime leur tragédie intime en s'opposant aux acteurs. Pour autant, pour que le message passe, il faut que le metteur en scène fasse des choix en rapport avec la technique du spectacle qui doit être donné au public qui, lui aussi, fait partie du jeu puisque c'est pour lui que le spectacle est écrit et joué .
Il y a aussi, me semble-t-il toute une réflexion sur la faute et aussi la honte, à travers cette famille éclatée, l'attitude du Père, de la Belle-Fille, de la la Mère et l'indifférence du Fils.
Sa première représentation à Rome en 1921 a été un four ce qui ne l'a pas empêchée d'être légèrement remaniée et traduite en plusieurs langues, mise en scène dans plusieurs pays, quant à son auteur il a obtenu le prix Nobel de Littérature en 1934. Pourtant sa carrière d'auteur n'a pas vraiment été un long fleuve tranquille puisqu'il a, un temps, envisagé d'abandonner l'écriture.
Le titre a quelque chose d’étrange qui a piqué ma curiosité. Je crois avoir apprécié cette thématique opposant les personnages de fiction aux acteurs de théâtre, la fiction contre la réalité mais je ne suis quand même pas sûr d’avoir tout compris.
Le cinéaste italien Roberto Ando s'est inspiré de cette pièce en mettant en scène un Pirandello incarné par l'excellent acteur Toni Servillo, à l'étonnante ressemblance avec son personnage.
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Le vase étrusque
- Par ervian
- Le 06/06/2024
- Dans Prosper Mérimée
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N°1891 – Juin 2024.
Le vase étrusque - Prosper Mérimée- Librio.
C’est une nouvelle de Prosper Mérimée, publiée en 1830.
Au fil des pages, le récit révèle une histoire d’amour comme on les vivait « dans le monde » comme on disait à l’époque. Ce n’était pas pour me déplaire, non à cause du thème appréhendé d’une manière bien différente d’aujourd’hui où, dans ce domaine comme dans bien d’autres, les choses ont bien changé mais notamment parce que je demande avant tout à un écrivain d’être le témoin de son temps. On a même prétendu que cette nouvelle avait été inspirée à son auteur par un épisode de sa propre vie.
Renouant avec Mérimée, je me suis dit, au début, que la relation de cette aventure, dont les ressorts sont éternels, seraient faite de mièvrerie, de naïveté et d’hypocrisie… Elle met en présence Auguste Saint-Clair, un bourgeois renfermé qui ne recherche pas vraiment la sympathie de ses semblables et qui croise Mathilde de Coursy, une jeune et belle comtesse veuve dont il tombe follement amoureux et qui devient sa maîtresse. Leur amour est donc partagé. Lors d’un dîner de célibataires, il apprend qu’elle a été l’amante de Massigny, un être fat bien différent de Mathilde, femme d’esprit et qui lui a offert un vase étrusque d’une grande valeur exposé sur la cheminée. Saint-Clair qui avait, Dieu sait pourquoi, supposé qu’elle n’avait jamais aimé que lui, et ce malgré l’existence de son ancien mari, devint maladivement jaloux mais n’en parla pas à la comtesse. Cette dernière, lui rendant sa montre qu’elle avait fait réparée, y a ajouté son portait miniature peint sur le fond de la boite et l’informe que c’est Massigny qui lui a indiqué le peintre qui a réalisé le travail. Il n’en faut pas plus pour provoquer la jalousie d’Auguste. De plus en plus soupçonneux, malgré les dénégations de la comtesse, Saint-Clair, lors d’une promenade à cheval provoque un de ses anciens rivaux et meurt dans le duel qui les oppose. Mathilde, désespérée s’éteint trois ans plus tard dans un état de délabrement physique désastreux.
Je ne suis pas nostalgique mais c’est sans doute la marque d’une époque révolue où on pouvait encore mourir d’amour, à l’heure des divorces faciles, des unions libres et des famille recomposées. On retrouve là une constante de la société de cette époque qui accordait toute licence à l’homme, même marié, et exigeait que la femme fût pure. Quant à Saint-Clair, il était à la fois pleins d’illusions, de sentimentalisme et sans doute aussi d’exigences. Cette courte nouvelle aurait peut-être mérité une étude psychologique un peu plus poussée .
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Tamango
- Par ervian
- Le 05/06/2024
- Dans Prosper Mérimée
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N°1890 – Juin 2024.
Tamango - Prospère Mérimée- Librio.
C’est une nouvelle assez bien documentée de Prosper Mérimée, publiée en 1829 qui ne semble pas avoir recueilli la faveur du public.
C’est un réquisitoire contre l’esclavage et met en présence un blanc, le capitaine Ledoux, un marin expérimenté devenu officier qui, en fin de carrière, se reconvertit dans le commerce négrier, et un chef de tribu sénégalais, un guerrier redoutable et amateur d’alcool, Tamango, qui fait commerce de ses ennemis en les vendant aux blancs. Lors d’une tractation un peu arrosée avec Ledoux, il lui donne sa femme, Ayché, aussitôt embarquée. A son réveil un peu embrumé Tamango cherche son épouse, la poursuit jusqu’au bateau et se retrouve capturé comme esclave par la capitaine négrier. Tamango se retrouvait donc avec ceux qu’il avait vendus, à fond de cale, avec pour seul avenir l’esclavage dans les Antilles françaises. Au cours de la traversée Tamango prend l’ascendant sur les autres prisonniers et réussit à s’emparer du navire en tuant tout l’équipage, mais, ignorant la navigation, l’affaire tourne au désastre et le brick dont ils s’étaient emparé devient rapidement une épave où seul Tamango survit. Sauvé par un navire anglais, soigné, il terminera sa vie tragiquement dans l’armée anglaise, victime de son addiction à l’alcool.
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Mateo Falcone
- Par ervian
- Le 05/06/2024
- Dans Prosper Mérimée
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N°1889 – Juin 2024.
Mateo Falcone - Prospère Mérimée- Librio.
C’est une nouvelle de Prosper Mérimée publiée en 1829 bien que l’auteur n’ait visité la Corse que 10 ans plus tard contrairement à ce qu’il écrit dans sa nouvelle. Il s’est donc informé des coutumes locales et s’est inspiré d’un fait réel.
Mateo Falcone est un notable respecté qui habite en lisière du maquis de Porto Vecchio qui est un havre de paix pour tous ceux qui sont en délicatesse avec la justice et souhaitent échapper aux gendarmes. Il part avec sa femme visiter un de ses troupeaux en laissant la maison à la garde de son jeune fils, dernier né et héritier du nom, Fortunato. Auparavant il avait eu trois filles actuellement mariées, ce qui ne l’enchantait pas. L’enfant voit arriver un homme blessé et poursuivi par la maréchaussée, Gianetto , et accepte de le cacher contre une pièce d’argent. Bientôt les gendarmes arrivent et le garçon, cupide, dénonce celui qu’il a caché contre une montre que lui offre l’adjudant. De retour Mateo voit Gianetto prisonnier qui accuse son fils de trahison et maudit sa famille. Le père brise la montre de Fortunato et l’emmène dans la maquis et après lui avoir fait dire ses prières, le tue purement et simplement malgré les supplications de son fils. Il lui fera cependant dire une messe en espérant que Dieu lui pardonnera sa traîtrise.
En Corse l’hospitalité est sacrée, une trahison amène inévitablement une vendetta, et on n’aime guère les gendarmes. D’autre part la Corse est, à l’époque, depuis peu française, l’île ayant été été vendue à la France par la république de Gêne mais les Corse se sentent avant tout Corses. Cette nouvelle qui est une tragédie illustre Les coutumes ancestrales de cette province au XIX° siècle , son sens de l’honneur, sa fierté.
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L'abbé Aubin
- Par ervian
- Le 30/05/2024
- Dans Prosper Mérimée
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N°1889 – Mai 2024.
L’abbé Aubin - Prospère Mérimée- Éditions Garnier frères..
En cinq lettres, une aristocrate parisienne ruinée, réfugiée avec son mari dans l’île de Noirmoutier raconte à son amie, Sophie, sa nouvelle vie. C’est triste à mourir et cela met bien en évidence ce qu’était le sort de la plupart des femmes de cette époque et de cette classe, la souffrance intime et l’église. Sauf qu’elle s’intéresse au jeune curé de la paroisse à qui elle trouve bien des qualités dont son mari semble dépourvu. Elle en devient intime au point qu’elle provoque chez lui des révélation très personnelles sur sa vie, de solliciter des cours de latin, de botanique, de théologie.. de lui prêter des livres bien différents de ceux qu’un jeune prêtre lit d’ordinaire.. Elle s’imagine des choses tout à fait impossibles, lui obtient une meilleure cure sans qu’il ait rien demandé. La sixième lettre, écrite par ce curé à un confrère après son départ de Noirmoutier semble remettre les choses à leur place.
C’est une histoire sans grand intérêt, vraie selon Mérimée, où le lecteur peut, si le désire, voir une critiques des bigotes désœuvrées, sentir l’esprit voltairien de Mérimée ou au contraire voir dans ce texte une louange de ce jeune abbé, qui n‘est cependant pas ennemi de la bonne chère. Il est précisé que ce texte est paru en 1846 dans « Le Constitutionnel » ou il était indiqué qu’y serait publié un texte anonyme « où il n’est question ni de l’Université ni des jésuites. ».